Administrateur
Inscrit: 14/12/2011 15:49
De Montpellier
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Peut-on rire de tout ?
Ta question ne pouvait être plus opportune qu'aujourd'hui, elle fait écho à une actualité qui personnellement me touche beaucoup : La mort de François Cavanna Cavanna qui avait apporté par son action un début de réponse à cette question : pouvons nous rire de tout et de tous ? C'était dans une France déjà multiple, mais une France française, et fière de l'être, une France qui croyait encore en elle, fière de son beau passé et confiante dans l'avenir. Une France de migration accueillante qui avait su intégrer en son sein des vagues successives, de russes, de chiliens, de portugais, de polonais, de chinois, d'espagnol, d'Italiens ...et ... Italiens dont François Cavanna était issu. C'était une France laïque, unie, et qui n'avait pas encore connu le choc de la déculturation avec les coups de boutoirs de l'obscurantisme religieux et son cortège d'interdits, de censure malsaine, et de procès d'intention. Dans ces décennies de liberté, la culture était vigoureuse et joyeuse, le phénomène journalistique de Charlie Hebdo et Hara kiri faisait trembler les rigoristes et allait plus loin que l'on aurait jamais oser aller. Et toute la France se "marrait" ! Sévissaient pour le bien de tous : Reiser, Wollinsky, le professeur Choron, Cabu, Fred et leur dessins " bêtes et méchants " ... Henri Tisot, lui, mimait et faisait rire du général de Gaulle, Jean-Christophe Averti passait les bébés à la moulinette, Philippe Bouvard et Jacques Chazot tenaient des combats de duettistes d'esprit dans un tout petit écran noir et blanc, se renvoyant la balle avec insolence et vivacité. Jacques Brel hurlait que les bourgeois étaient comme les cochons, Léo Ferré et Brassens chantaient les " anars " et les anti-conformistes, Barbarella énervait tous les mâles Français ... Plus tard Coluche et ses enfoirés sont venus dire pis que pendre du pape, de la curie romaine, mais aussi des z'hommes politiques, du show-biz, des publicitaires ... à cette époque rien n'était sacré pour Le Luron, pas plus que pour Pierre Desproges, ou son complice Bernard Mabille ... Tous, absolument tous portaient très haut l'humour et le bel esprit français. Fleurissait, alors, dans la presse, dans les radios devenues libres depuis peu, l'esprit gaulois, cet esprit populaire de résistant, rebelle, réfractaire et provocateur qui fait feu de tout bois, on voyait Gavroche libre tenait le crachoir, pendant que dans le même temps de liberté, s'exprimait aussi un habile esprit de morgue, hérité d'une certaine aristocratie de notre culture, qui faisait naître avec insolence, ce goût fin de l'a propos, du trait qui fait mouche, de la réplique qui laisse sans réplique, cet art de la dialectique que la France, plus vieux pays d'Europe (1500 ans) a pratiqué dans ses salons, boudoirs bourgeois et cours royales. La tolérance avait grandi, certains apprenaient la surdité, et les" bof " !! "vaut mieux entendre ça qu'être sourd " , le respect régnait et rappelait que la parole n'engage que celui qui la prononce, que penser différemment est un droit humain indéfectible, les croyants priaient dans les églises dans l'indifférence générale, la France était saine et heureuse, notre culture tolérante était au summum.
Pourquoi rions nous ?
Nous allions sur les traces des fous du rois, qui avaient le rôle important de la dérision et de la désacralisation, nous étions sur les traces de nos philosophes et de de nos savants médecins comme Rabelais qui savait tout de la nécessité du rire qui apporte la joie, mais qui, aussi limite les pouvoirs et apporte sur les évènements un éclairage nouveau, l'humour est un antidote à la rigidité sclérosante qui appauvrit. Une société qui ne sait pas rire, une société qui censure l'humour, est condamnée à ne plus penser et régresse inexorablement. C'est pour cette dernière raison que le refus du rire et de l'humour est l'apanage des dictatures, et qu'il sert toujours aux despotes qui asservissent les masses non-pensantes. On ne rit pas dans une dictature, donner aux choses un caractère sacré, immuable, intouchable, est un procédé pour les imposer par la force. Nietzsche avait une violente aversion pour les philosophes qui, comme il le dit, "ont cherché à donner mauvaise réputation au rire" .C'est pourquoi Il luttait et voyait dans les écrits de Hobbes un puritanisme anglais dangereux pour la pensée. Pour preuve, le respect autoritaire des dogmes religieux, leur côté intouchable sont des freins, des empêchements majeurs à l'évolution, à la science, à la connaissance et bien évidement à la libre-pensée. Nous ne devons donc rien tenir pour sacré ou tabou, et nous devons rire de tout, y compris de notre propre mort, cette suprême peur atavique. C'est une nécessite absolue pour notre esprit, pour notre santé mentale, c'est un besoin que nous expérimentons souvent involontairement dans les enterrements qui sont les lieux des plus grandes crises de fou-rire, tant notre besoin d'évacuer nos révoltes, colères ou angoisse passe le rire. Le rire qui désacralise et qui rend tout accessible, humain. La vraie question pour moi, n'est pas pouvons nous rire de tout, mais, pouvons nous rire de tout n'importe comment ? La réponse est en chacun de nous, dans ce précepte :
" Ne fais pas à autrui ce que tu ne veux pas que l'on te fasse".
C'est la seule restriction que nous devons nous imposer à nous même, en tenant compte, comme dans toutes les relations humaines, de l'effet produit sur autrui. Ce qui fait que rire d'une institution est toujours moins dévastateur que rire d'un individu isolé.Tout ici est question d'humanité et de mesure. Castiglione pense que :
" À chaque fois que nous rions, nous nous moquons de nous et nous méprisons toujours quelqu’ un, nous cherchons toujours à railler et à nous moquer des vices. "
et aussi :
" C’est lorsque les gens fanfaronnent et se vantent et qu’ils ont des manières orgueilleuses et hautaines que nous avons raison de nous moquer d’eux et de les mépriser pour faire rire. "
Ceci affirme le rire comme contre-pouvoir et confirme sa nécessite surtout devant l'administration et les croyances autoritaires. Le rire est alors critique, opposition, dérision mais surtout défense. Et Descartes remarque justement " Or encore qu’il semble que le Ris soit l’un des principaux signes de la Joye, elle ne peut toutefois le causer que lorsqu’elle est seulement médiocre, et qu’il y a quelque admiration ou quelque haine meslée avec elle. "
Et oui, quoi de plus drôle, qu ' y- a -t-il de plus irrésistible, devant des 2éme classe soumis et silencieux qu'un gradé pédant, suffisant et tyrannique qui se plante lourdement le nez dans une belle flaque de boue ? La scène est classique, mais voilà soudain les choses revenues à leur place, les voici rééquilibrées. L'humour est un régulateur social irrépressible et sa censure est toujours un dommage pour la société qui la pratique. Par exemple, dans le film le dictateur de Chaplin, une scène culte nous montre les deux dictateurs Mussolini et Hitler, remonter leur siège pour toujours être au dessus de l'autre, quand soudain le siège de Hitler, monté trop haut, s'écrase brutalement et tombe au sol mettant son occupant en position ridicule. Au delà du symbole, le côté cocasse de cet individu redoutable écrasé sur son siège déclenche un fou-rire joyeux comme une promesse, comme une libération. C'est ce mécanisme du rire qu'il faut préserver à tous prix, quand bien même il y aurait quelques " dégâts" collatéraux.
Sur Dieudonné, dont la citation du nom de famille est une attaque, puisque les artistes ne sont connus, que, sous leur nom d'artiste. La loi les autorisant à l'usage d'un pseudonyme officiel, pseudonyme qui garantie la préservation de leur vie privée ce qui est un droit pour tous. Au début de cette affaire, voyant la violence de l'attaque, et ne connaissant pas du tout cet humoriste, j'ai passé une soirée entière à regarder ces vidéos et films. (Je refuse de parler sans savoir et encore moins de porter un jugement dans l'ignorance) Après plus de trois 3 H de visionnage, dont des vidéos supprimées depuis, je n'ai vu " Aucune ", absolument aucune attaque raciste. J'ai vu des attaques sur toutes les religions, sur les femmes, j'ai vu un humour qui n'est pas vraiment le mien mais rien, absolument rien qui justifiait ce lynchage débridé et haineux, ni cette croisade de Valls qui en a profité pour trôner avec sa Kipa, et qui a, en franquiste complet, piétiné gravement nos institutions françaises, la justice populaire, la liberté d’expression, la présomption d'innocence, la séparation des pouvoirs de la constitution Française, et qui a rétablit une censure disparue de notre pays depuis plus de 100 ans. C'est la première fois depuis 1906 que le conseil d'état annule un jugement populaire pour un délit encore non commis.
Valls, en se déclarant, à la porte du CRIF qui l'invite, " être éternellement liée à Israël ", en portant la KIpa, ce ministre si peu français, a joué une communauté contre les autres et a rallumé le feu de la haine. Ce personnage est l'ennemi des libertés et doit être surveillé de très prés. Je rappelle que l' antisionnisme n'est pas de l'antisémitisme, que c'est une opinion politique et non pas du raciste, et en temps que telle cette opinion doit se discuter librement, à moins que nous ne soyons déjà en dictature ? Vraiment la question se pose.
Contre les débordements racistes, les insultes, l'homophobie etc.. il existe en France une kirielle de lois efficaces et qui dépendent de la justice populaire. En conclusion, la limite, la réponse à " peut-on rire de tout ? ", se trouve juste là , dans nos lois nationales.
Posté le : 30/01/2014 16:18
Edité par Loriane sur 31-01-2014 13:09:41 Edité par Loriane sur 31-01-2014 13:32:41 Edité par Loriane sur 31-01-2014 13:33:09 Edité par Loriane sur 31-01-2014 13:34:55 Edité par Loriane sur 11-03-2014 17:08:39
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