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Jacques-Louis David 1
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Le 30 août 1748 naît Jacques-Louis David à Paris

peintre, artiste et homme politique, conventionnel français mort le 29 décembre 1825 à 77 ans à Bruxelles. Il est formé à l'académie royale, il a pour maîtres François Boucher, Joseph-Marie Vien, il a pour élèves Jean-Germain Drouais, Antoine-Jean Gros, Jean-Auguste-Dominique Ingres, Girodet, François Gérard, Johan Stephan Decker, François Topino-Lebrun
il appartient au mouvement peinture néoclassique, influencé par François Boucher, Nicolas Poussin, Valentin de Boulogne et il a influencé François Gérard, Georges Rouget
Il reçut pour distinction, le second et premier prix de Rome, le premier prix décennal du tableau National, le second prix décennal du tableau d'Histoire. Il est fait Chevalier de la Légion d'honneur en 1803, officier de la Légion d'honneur en 1808 et commandeur de la Légion d'honneur en 1815. Ses Œuvres les plus réputées
sont : Le Serment des Horaces, La Mort de Marat, Le Sacre de Napoléon, Les Sabines, Le Serment du Jeu de Paume, La Douleur d'Andromaque, La Mort de Socrate, Bonaparte franchissant les Alpes. Il est considéré comme le chef de file de l’École néoclassique, dont il incarne le style pictural et l’option intellectuelle. Il opère une rupture avec le style galant et libertin de la peinture rococo du XVIIIe siècle représentée à l'époque par François Boucher et Carl Van Loo, et revendique l’héritage du classicisme de Nicolas Poussin et des idéaux esthétiques grecs et romains, en cherchant, selon sa propre formule, à régénérer les arts en développant une peinture que les classiques grecs et romains auraient sans hésiter pu prendre pour la leur.

Formé à l'Académie royale de peinture et de sculpture, il devient en 1784 un peintre renommé avec le Serment des Horaces. Membre de l'Académie royale, il combat cette institution sous la Révolution et entame en parallèle à sa carrière artistique une activité politique en devenant député à la Convention et ordonnateur des fêtes révolutionnaires. Son engagement l'amène à voter la mort du roi Louis XVI, et son amitié pour Maximilien de Robespierre lui vaudra, à la chute de celui-ci, d'être emprisonné lors de la réaction thermidorienne. Ses activités politiques prennent fin sous le Directoire, il devient membre de l'Institut et se prend d'admiration pour Napoléon Bonaparte. Il se met à son service quand celui-ci accède au pouvoir impérial, et il réalise pour lui sa plus grande composition Le Sacre de Napoléon.
Sous la Restauration, son passé de révolutionnaire régicide et d'artiste impérial lui vaut d'être exilé. Il se réfugie à Bruxelles et continue jusqu'à sa mort en 1825 son activité artistique.
Son œuvre, importante par le nombre, est exposée dans la plupart des musées d'Europe et aux États-Unis, et pour une grande partie au musée du Louvre. Elle est constituée principalement de tableaux d'histoire et de portraits. Il fut un maître pour deux générations d’artistes, venues de toute l’Europe pour se former dans son atelier qui, à son apogée, comptait une quarantaine d’élèves, dont Girodet, Gérard, Gros et Ingres furent les plus réputés.
Il fut l’un des artistes les plus admirés, enviés et honnis de son temps, autant pour ses engagements politiques que pour ses choix esthétiques. Par le passé, rarement un artiste a épousé à ce point les grandes causes de son temps en mêlant intimement art et politique.

En bref

La place du peintre David n'est désormais plus discutée : il compte parmi les artistes français les plus illustres, et son rôle capital dans le renouveau classique de la fin du XVIIIe siècle est reconnu par tous. L'artiste est-il cependant vraiment aimé ? Les réactions parfois mitigées qui ont accueilli la rétrospective qui lui a été consacrée en 1989 permettent d'en douter. La date même de cette exposition, qui faisait partie des célébrations du bicentenaire de la Révolution française, est révélatrice des ambiguïtés que David suscite chez les critiques et les historiens d'art, ambiguïtés qui se cristallisent sur l'activité politique qu'il déploya entre 1789 et 1794 et sur la mobilisation de son art au service de la Convention puis de l'Empire. Il serait pourtant trop simple de le réduire au prototype de l'artiste engagé, et de juger toute sa carrière à l'aune d'opinions changeantes, qui ne sont pas, d'ailleurs, toujours précisément attestées ou connues. David est sans doute aujourd'hui pour nous plus présent dans son œuvre que par ses engagements politiques.
Les débuts de David furent quelque peu laborieux et difficiles. Choisir une carrière artistique n'avait pourtant pas posé pour lui de réel problème. Né dans une famille parisienne aisée, il avait manifesté très tôt un goût affirmé pour le dessin. La famille de sa mère, qui avait charge de lui son père avait été tué dans un duel alors que l'enfant n'avait que neuf ans, était assez bien introduite dans le monde des arts et ne s'opposa pas à sa vocation. Deux de ses oncles étaient architectes et le peintre François Boucher leur était apparenté. C'est vers ce dernier qu'ils se tournèrent lorsqu'il devint clair que leur neveu voulait être peintre. Mais Boucher se jugea trop vieux et il leur recommanda Joseph-Marie Vien, dont le style sévère et épuré, à l'antique, commençait à s'imposer. Son atelier était réputé, et devait être l'un des principaux foyers du néoclassicisme français, alors naissant. David y entra en 1766, travaillant en même temps, comme c'était l'usage, à l'Académie royale de peinture et de sculpture. Cette formation traditionnelle lui fournit un cadre conceptuel dont il ne s'affranchit en fait jamais, principalement marqué par la prééminence de la peinture d'histoire au sein de la hiérarchie des genres, par l'importance du dessin dans le processus créatif et du nu dans la recherche du beau idéal. Mais cet élève attentif mit du temps à trouver son style et à s'imposer. Sa première manière, connue presque uniquement par ses morceaux de concours, poursuit en effet le genre aimable de Boucher, et il ne se disciplina que progressivement, avec effort. Il échoua d'ailleurs trois fois au grand prix de peinture, couronnement des études académiques et passage obligé pour une carrière brillante, puisqu'il ouvrait sur un séjour à Rome, aux frais du roi. David obtint un second prix en 1771, avec le Combat de Minerve contre Mars Louvre, Paris, et fut l'année suivante, où il présenta Diane et Apollon perçant de leurs flèches les enfants de Niobé coll. part., privé, à la suite d'intrigues et de rivalités internes à l'Académie, du succès que tous lui prédisaient. Sa déception violente David allant jusqu'à vouloir se suicider est sans doute à l'origine de sa rancœur contre une institution incapable de promouvoir le talent. Il subit un nouvel échec en 1773 avec La Mort de Sénèque Petit Palais, Paris, le tableau de son concurrent Jean François Pierre Peyron, plus sobre, plus ordonné, ayant été préféré au sien. Il remporta enfin le prix, à sa quatrième tentative, avec Antiochus et Stratonice École nationale supérieure des beaux-arts, Paris. Ce succès lui permit de partir parfaire sa formation à l'Académie de France à Rome. David avait alors vingt-six ans. Lui qui, avant son départ, disait l'antique ne me séduira pas, il manque d'entrain, il ne remue pas, reviendra de Rome marqué par la découverte de l'antique, qui sera désormais sa source d'inspiration privilégiée. Il y aura aussi trouvé son style, tout en s'affirmant comme un des peintres les plus prometteurs de l'école française. Les cinq ans passés en Italie, d'octobre 1775 à août 1780, ont donc été pour lui déterminants. Ce premier séjour est en réalité inséparable du contexte très particulier dans lequel il se situe. Rome avait toujours été, depuis la Renaissance, un des lieux de rencontres favoris des artistes, des amateurs d'art et des savants de toute l'Europe ; la seconde moitié du XVIIIe siècle voit se multiplier les découvertes archéologiques et s'approfondir la réapparition de l'art gréco-romain, provoquant une effervescence intellectuelle à laquelle David a été sensible. Plus qu'il ne l'avait fait à Paris dans l'atelier de Vien, il se familiarise alors avec les principes et les sources du nouveau classicisme. Son travail était d'ailleurs étroitement dirigé et surveillé par son premier maître : chargé de réorganiser l'Académie de France, Vien en avait été nommé le directeur au moment où David remportait son prix. Le surintendant des bâtiments du roi, le comte d'Angiviller, désireux de redonner toute sa place à la grande peinture d'histoire, tombée en décadence selon l'opinion générale, avait décidé de donner plus de rigueur et d'efficacité à l'enseignement des arts. David semble avoir assez bien accepté cette conception qui obligeait non sans difficulté les élèves à un certain nombre de travaux d'école – académies ou copies d'après les maîtres – exposés à Rome avant leur envoi à Paris, où ils devaient être jugés par un jury d'académiciens appréciant les progrès de chacun. Sont ainsi attestées une Cène d'après Valentin (perdue) et deux académies d'homme, Hector 1778, musée Fabre, Montpellier et Patrocle 1780, musée Thomas-Henry, Cherbourg, qui, avec d'autres tableaux, en particulier les Funérailles de Patrocle 1779, National Gallery, Dublin et Saint Jérôme 1780, musée du séminaire, Québec illustrent à la fois la maturation de David, cristallisée semble-t-il après un voyage à Naples à la fin de son séjour, et révèlent ses modèles, l'antique et les peintres italiens du XVIIe siècle. À cela s'ajoute l'étude du modèle vivant et de la campagne romaine, ces différents aspects se retrouvant dans son activité, intense, de dessinateur. C'est par le dessin, jour après jour, que David s'épure et se discipline en même temps qu'il se constitue un répertoire dans lequel il ne cessera ensuite de puiser. La grande Frise dans le genre antique 1780, aujourd'hui en deux morceaux, au musée des Beaux-Arts de Grenoble et à la Crocker Art Gallery de Sacramento témoigne de cette évolution, qui n'alla pas sans périodes de doute ou de découragement. Mais la mutation était évidente au terme de ces années italiennes. David s'y était réellement révélé, et les peintures exécutées ou commencées à la fin de son séjour – Saint Roch intercède auprès de la Vierge pour la guérison des pestiférés 1780, musée des Beaux-Arts, Marseille, ou le monumental portrait équestre du comte Stanislas Potocki 1781, Musée national, Varsovie – témoignent de sa maîtrise autant que de son originalité.
L'affirmation d'un style :David revint à Paris précédé d'une flatteuse réputation, et il s'imposa en quelques années seulement. Sa position artistique, sociale, financière celle-ci due en grande partie à son mariage, était considérable à la fin de l'Ancien Régime. Soutenu par d' Angiviller, qui lui commanda, dans le cadre de son programme d'encouragement, deux de ses plus importants tableaux d'histoire Le Serment des Horaces, 1784 ; Les Licteurs rapportent à Brutus les corps de ses fils, 1789, Louvre, il avait aussi la faveur des particuliers, qui lui demandaient portraits et tableaux d'histoire, comme le comte d'Artois, frère du roi Les Amours de Pâris et d'Hélène, 1788, Louvre, le maréchal de Noailles Christ en croix, 1782, Église Saint-Vincent, Mâcon ou encore Trudaine de la Sablière, représentant typique des milieux riches et éclairés de la France d'avant 1789, dont le peintre était proche La Mort de Socrate, 1787, Metropolitan Museum, New York.
Il fut remarqué dès le Salon de 1781 avec son Bélisaire demandant l'aumône musée des Beaux-Arts, Lille. Son morceau de réception à l'Académie, La Douleur et les regrets d'Andromaque sur le corps d'Hector son mari, exposé en 1783, eut encore plus de succès. Mais c'est avec les Horaces que sa célébrité atteignit un sommet. David était reparti en Italie pour peindre ce tableau au contact de l'antique et il l'exposa à Rome avant de le montrer à Paris. L'émotion fut énorme : par son sujet, exemplum virtutis qui exaltait l'héroïsme et le dévouement patriotiques, par sa composition rigoureuse, par la sévérité de son style qui n'exclut pas une facture énergique mais maîtrisée par exemple dans l'éclaircissement du coloris, la toile prenait figure de manifeste. Dans sa conception comme dans les divers aspects de son exécution, elle synthétisait aussi toutes les recherches du peintre depuis le Bélisaire. David s'affirmait ainsi comme le véritable héritier de Nicolas Poussin et de la grande peinture classique, ce qu'il ne fit que confirmer par un nouveau chef-d'œuvre, le Socrate exposé en 1787, puis par le Brutus de 1789. La force de chacune de ces toiles est le fruit d'une patiente recherche. David, très respectueux des diverses sources sur lesquelles il s'appuie, épure progressivement la composition, intensifie l'expressivité des figures, sait fondre le coloris, riche et varié, dans une tonalité d'ensemble, et allier l'idéalisation aux détails réalistes –comme la corbeille à ouvrage du Brutus –, qui ont fait le bonheur des exégètes.
Les portraits qu'il réalise alors sont tout aussi révélateurs de cette évolution, aboutissant aux grandes réussites de la fin des années 1780 : Les Époux Lavoisier 1788, Metropolitan Museum, La Comtesse de Sorcy-Thélusson et La Marquise d'Orvilliers 1790, Alte Pinakothek, Munich et Louvre. La fermeté de la mise en page, l'austérité du décor et des accessoires, réduits à l'essentiel, s'accompagnent d'une grande sensibilité et d'une extraordinaire finesse de touche et de coloris qui mettent David au rang des plus grands portraitistes.
Son renom était désormais européen, mais il continuait à se heurter à la sourde animosité de l'Académie, jalouse d'une ascension aussi rapide, rendue manifeste par le développement de l'atelier du peintre et, en 1784, le succès au prix de Rome de son élève favori, Jean Germain Drouais 1763-1788, que devaient suivre François-Xavier Fabre 1766-1837 en 1787 et Girodet en 1789. L'animosité était réciproque : David jugeait routinier et dépassé l'enseignement de l'Académie, qu'il aurait voulu réformer. Il espéra ainsi, en 1787, être nommé directeur de l'Académie de France, à Rome, mais d'Angiviller lui préféra François Guillaume Ménageot. Il s'ensuivit un conflit larvé sur lequel se greffait la question de l'accès au Salon qui devait beaucoup compter lorsque l'Académie fut dissoute en 1793, David ayant, après quatre ans de lutte ouverte, joué un rôle majeur dans sa disparition. On aurait tort, cependant, de voir en lui avant cette période un révolutionnaire. L'interprétation dans ce sens de ses grands tableaux d'histoire, y compris par lui-même, est en effet postérieure à 1789, et les milieux qu'il fréquentait étaient plutôt ceux de la bourgeoisie et de l'aristocratie libérales. On ne sait en fait exactement vers quelles opinions il penchait, ni si, d'ailleurs, elles étaient très affirmées. Il n'était pas alors le Raphaël des sans-culottes, et rien en lui ne laissait présager le régicide
L'épisode révolutionnaire : Si David se rangea dès l'origine parmi les partisans de la Révolution, il ne se rapprocha que progressivement des Jacobins. Élu à la Convention, siégeant parmi les Montagnards, il vota la mort du roi, fut membre du Comité de sûreté générale et du Comité d'instruction publique. Il eut, à ce dernier titre, un rôle important dans l'administration des arts, en particulier dans la suppression de l'Académie, dans la mise en place du Muséum et plus généralement dans la sauvegarde des richesses artistiques menacées par les évènements. Il participa également à l'organisation des fêtes révolutionnaires (son influence fut grande dans le théâtre de son temps) – commémoration du 10-Août, glorification des armées de la République, fête de l'être suprême – réglant le déroulement des cortèges, donnant le dessin des décors et des costumes.
Il fit aussi des projets pour vêtir les différents corps de l'État, travailla à des sceaux et à des médailles et fournit le dessin de caricatures contre les ennemis de la Révolution. L'engagement de David se concrétisa donc dans une activité de propagandiste, liée cependant pour l'essentiel à ses préoccupations artistiques. Il en alla de même de sa peinture proprement dite, qui prit alors un tour nettement politique. Les tableaux antérieurs à 1789 désignaient naturellement David pour l'exécution d'œuvres commémoratives de la Révolution. Un projet en ce sens avorta à Nantes durant l'été 1790 et, curieusement, il fut aussi question de lui pour la réalisation d'un portrait de Louis XVI présentant la Constitution à son fils, qui aurait été placé dans la salle des séances de l'Assemblée et auquel David travailla jusqu'au printemps de 1792. Le projet le plus abouti de cette première période est Le Serment du Jeu de paume, dont l'idée, lancée en octobre 1790 au club des Jacobins – traiter directement et non par l'allégorie un évènement contemporain, mais en le hissant au niveau de la grande peinture d'histoire –, était très nouvelle en France. Le projet devait être réalisé par souscription. David exposa un dessin d'ensemble au Salon de 1791 Louvre avant de s'engager dans la réalisation de la toile définitive (Musée national du château de Versailles, mais celle-ci resta inachevée, à l'état d'ébauche, abandonnée très probablement au printemps de 1792 : les fonds réunis étaient maigres et, surtout, la marche des évènements rendait problématique la représentation de l'unanimité manifestée en 1789. Mirabeau, Barnave, Jean Sylvain Bailly, Rabaut-Saint-Étienne, d'autres encore n'avaient-ils pas plus ou moins failli depuis cette date ? Il en alla tout autrement lorsqu'il s'agit de glorifier les martyrs de la Révolution : Le Peletier de Saint-Fargeau, régicide tué par un ancien garde du roi 1793, tableau disparu, Marat assassiné 1793, musée des Beaux-Arts, Bruxelles. Dérivant à l'évidence du thème traditionnel de la déposition de croix, ces tableaux, tous deux placés à la Convention, s'inspiraient aussi étroitement de l'antique les deux hommes sont représentés nus dans un décor très dépouillé, mais les quelques éléments narratifs suffisent à en faire des modèles de vertu modernes. David exécuta également, selon des principes analogues, une Mort de Bara inachevée, 1793, musée Calvet, Avignon. L'aspect militant de ces icônes ne doit pas, toutefois, faire oublier leurs éminentes qualités artistiques. David servait la Révolution, mais il était d'abord peintre. Après Thermidor, les contemporains retinrent essentiellement le premier aspect : l'artiste, trop engagé du côté de Robespierre, fut arrêté puis emprisonné plusieurs mois au Luxembourg. Mais, la tempête passée, il ne fut pas autrement inquiété et put revenir à la peinture, le Directoire se montrant d'ailleurs relativement bienveillant à son égard : il fut nommé membre du nouvel Institut en novembre 1795, et put rouvrir son atelier au Louvre, où afflua une nouvelle génération d'artistes, parmi lesquels le jeune Étienne-Jean Delécluze, qui a laissé sur cette époque des témoignages précieux et pleins de vie. David, en pleine possession de son métier, comme le démontrent quelques portraits virtuoses Les Époux Sériziat, 1795, Louvre, Paris n'avait donc rien perdu de son prestige, mais il lui fallait s'imposer de nouveau sur la scène artistique. Ce fut l'objet des Sabines 1799, Louvre. Il avait aussi pensé à composer un tableau représentant Homère récitant ses vers aux Grecs dessin préparatoire au Louvre et il prit sa décision au sortir d'un nouvel emprisonnement août 1795. Le sujet retenu possédait une portée symbolique volontairement plus claire, appelant, après plusieurs années de discorde, les Français des différents partis à une réconciliation générale, à l'image des Romains et des Sabins interrompant le combat sur l'instance des Sabines qui s'interposent avec leurs enfants entre les combattants. Le tableau eut un retentissement considérable, et d'abord par son mode même d'exposition : il ne fut pas présenté au Salon, qui était gratuit, mais dans l'atelier de David, au Louvre, et moyennant un droit d'entrée. David inaugurait, selon l'exemple anglais, un nouveau mode de relations entre le peintre et le public, tout en donnant une réponse originale à la question du mécénat et des problèmes financiers inhérents au métier d'artiste. Les visiteurs affluèrent, mais une polémique vint se porter sur le style et l'esthétique de la toile. David avait voulu faire du « grec pur », disposant ses personnages en frise, comme dans un bas-relief, arrangeant rigoureusement les plans, modérant une palette pourtant vibrante et, surtout, choisissant le nu pour les personnages masculins principaux du premier plan, notamment Romulus et Tatius. Cela fut violemment critiqué, à la fois pour des raisons de décence le fourreau de l'épée de Tatius fut déplacé par David lors d'une reprise ultérieure du tableau, en 1808, d'archéologie, puisque, si les Grecs combattaient nus, les Romains le faisaient habillés, mais aussi du fait d'un sentiment diffus de lassitude chez le public devant des figures qui sentaient trop, finalement, l'académisme. David répondit point par point dans une Note sur la nudité de mes héros. Toutefois le débat vaut peut-être essentiellement pour ce qu'il révèle de la position de l'artiste à cette date : admiré, loué mais aussi controversé, loin d'exercer en réalité un magistère aussi indiscuté qu'on le pense généralement.

Sa vie

Jacques-Louis David naît à Paris le 30 août 1748, quai de la Mégisserie, dans une famille de la petite bourgeoisie. Son père, Louis-Maurice David, est marchand-mercier de fers en gros à Paris. Pour s’élever socialement, il acquiert une charge de commis aux aydes équivalent de receveur fiscal à Beaumont-en-Auge dans la Généralité de Rouen actuellement dans le département du Calvados. Sa mère, Marie-Geneviève, née Buron, appartient à une famille de maîtres-maçons ; son frère François Buron est architecte des Eaux et Forêts, son beau-frère Jacques-François Desmaisons est architecte et son second beau-frère Marc Desistaux est maître-charpentier. Elle est aussi, du côté maternel, cousine issue de germain du peintre François Boucher.
Jacques-Louis David est baptisé le 30 août 1748, jour de sa naissance, en l'église Saint-Germain-l'Auxerrois en présence de Jacques Prévost, marchand potier d'étain, et de Jeanne-Marguerite Lemesle, épouse de Jacques Buron, maître-maçon, ses parrain et marraine, comme indiqué dans son acte de baptême.
Le jeune David est mis en pension au couvent de Picpus jusqu’au 2 décembre 1757, date à laquelle son père meurt, à l’âge de trente ans. Parmi les premiers biographes de David, Coupin, suivi par Delécluze et Jules David, attribuait la cause du décès à un duel à l’épée. Mais A. Jal constatait que l'acte de décès ne donnait aucune indication sur les circonstances de la mort de Louis-Maurice David. David a alors neuf ans et sa mère fait appel à son frère François Buron pour l’aider à s’occuper de l’éducation de son fils. Après lui avoir fait suivre des cours chez un répétiteur, elle le fait entrer au collège des Quatre-Nations dans la classe de rhétorique. Dès lors, elle se retire à Évreux et laisse l’entière éducation de David à la charge de son frère. Ayant remarqué ses dispositions pour le dessin, sa famille envisage d’abord de lui faire embrasser la carrière d’architecte, comme ses deux oncles.

Formation

En 1764, après avoir appris le dessin à l’Académie de Saint-Luc11, David est mis en relation par sa famille avec François Boucher, premier peintre du roi, afin d’être formé au métier de peintre. Boucher étant malade et trop âgé pour enseigner il meurt en 1770, celui-ci estime qu'il pourrait tirer un meilleur bénéfice de l’apprentissage des nouvelles tendances picturales que peut lui apporter Joseph-Marie Vien, artiste dont le style antiquisant n’est pas encore exempt d’inspirations galantes.
En 1766, entré à l’atelier de Vien, mais encore influencé par l’esthétique de Boucher, David commence à étudier l’art à l’Académie royale, dont l’enseignement devait permettre aux élèves de concourir pour le Prix de Rome. Jean Bardin compte parmi les autres professeurs de l’académie qui lui enseignent les principes de la composition, de l’anatomie et de la perspective, et il a comme condisciples Jean-Baptiste Regnault, François-André Vincent et François-Guillaume Ménageot.
Michel-Jean Sedaine, ami proche de la famille, secrétaire de l’Académie d’architecture et auteur de théâtre, devient son protecteur et s’occupe de parfaire son éducation intellectuelle en le faisant rencontrer quelques-unes des personnalités culturelles de l’époque. C’est peut-être lors de ces années d’apprentissage qu’il développe une tumeur dans la joue gauche, consécutive à un combat à l’épée avec l’un de ses condisciples d’atelier.
En 1769, la troisième médaille qu’il reçoit au Prix de quartier lui ouvre la voie vers le concours du grand Prix de Rome.
En 1771, il obtient le second prix avec son œuvre le Combat de Mars contre Minerve, dans un style hérité du Rococo et d’une composition jugée faible par le jury de l’académie ; le lauréat fut Joseph-Benoît Suvée.
En 1772, il manque à nouveau le premier prix avec Diane et Apollon perçant de leurs flèches les enfants de Niobé, le grand prix étant décerné ex-æquo à Pierre-Charles Jombert et Gabriel Lemonnier, à la suite d’un vote arrangé du jury. Après cet échec, qu’il vécut comme une injustice, il résout de se laisser mourir de faim, mais après deux jours, l’un des jurés, Gabriel-François Doyen, le convainc d’abandonner sa tentative de suicide. En 1773, c’est encore un échec avec La Mort de Sénèque, sujet inspiré de Tacite ; le lauréat fut Pierre Peyron, dont le style antique était récompensé pour sa nouveauté, la composition de David étant jugée trop théâtrale. Ne pouvant recevoir deux fois le second prix, en guise de consolation, l’Académie lui décerne le prix de l'Étude des têtes et de l'expression pour son pastel intitulé La Douleur.
Ces échecs successifs ont une incidence sur l’opinion de David contre l’institution académique. En 1793, il s’en sert d'argument lorsqu'il fait adopter le décret pour la suppression des académies.
À la fin de l’année 1773, Marie-Madeleine Guimard, première danseuse de l’Opéra, charge David de reprendre la décoration de son hôtel particulier transformé en théâtre privé, que Fragonard avait laissé inachevé à la suite de mésententes.

Pensionnaire de l’Académie à Rome

En 1774, il gagne finalement le premier prix de Rome, qui lui permet de séjourner pendant quatre ans au palais Mancini, alors résidence de l’Académie de France à Rome L’œuvre présentée, Érasistrate découvrant la cause de la maladie d’Antiochius, Paris, École nationale supérieure des beaux-arts, est conforme au nouveau canon de la composition dramatique.
Vers le 2 octobre 1775, David accompagne son maître Joseph-Marie Vien, qui vient d’être nommé directeur de l’Académie de France à Rome, et deux autres lauréats, le premier prix de sculpture en 1774, Pierre Labussière, et Jean Bonvoisin, second prix de peinture en 1775. Lors de son périple, il s’enthousiasme pour les peintures de la Renaissance italienne qu’il voit à Parme, Bologne et Florence. La première année de son séjour à Rome, David suit le conseil de son maître en se consacrant essentiellement à la pratique du dessin. Il étudie attentivement les Antiques, réalisant des centaines de croquis de monuments, de statues et de bas-reliefs. L’ensemble de ses études compose cinq volumineux recueils in-folio.
Il réalise en 1776 un grand dessin, Les Combats de Diomède Vienne Graphische Sammlung Albertina, qui représente un de ses premiers essais dans le genre historique, essai qu’il concrétise deux ans plus tard avec Les Funérailles de Patrocle Dublin, National Gallery of Ireland, une étude de grandes dimensions peinte à l’huile, destinée à la commission de l’Académie des beaux-arts, qui était chargée d’évaluer les envois des pensionnaires de Rome. Celle-ci encouragea le talent de David, mais souligna des faiblesses dans le rendu de l’espace et déplora l’obscurité générale de la scène, ainsi que le traitement de la perspective. Il peint aussi plusieurs tableaux dans un style emprunté au caravagisme : deux académies d’homme, l’une intitulée Hector 1778 et la seconde dite Patrocle 1780, inspirée du marbre Galate mourant du musée du Capitole, un Saint Jérôme, une Tête de philosophe et une copie de la Cène de Valentin de Boulogne.
De juillet à août 1779, David se rend à Naples en compagnie du sculpteur François Marie Suzanne. Durant ce séjour, il visite les ruines d’Herculanum et de Pompéi. Il attribua à ce voyage l'origine de sa conversion au nouveau style inspiré de l’Antiquité ; il écrit en 1808 : Il me sembla qu’on venait de me faire l’opération de la cataracte ... je compris que je ne pouvais améliorer ma manière dont le principe était faux, et qu’il fallait divorcer avec tout ce que j’avais cru d’abord être le beau et le vrai. Le biographe Miette de Villars suggère que l’influence de l’amateur d’Antiquité Antoine Quatremère de Quincy, adepte des idées de Winckelmann et Lessing, dont David, selon lui, fait la connaissance à Naples, n’y fut pas étrangère, mais aucune source contemporaine ne confirme une rencontre entre les deux hommes à cette époque. En 1780,il revient à Paris, et se marie avec Marguerite Pécoul, dont le père dirigeait les travaux de construction du Louvre.
Après ce voyage, il est sujet à une profonde crise de dépression qui dure deux mois, dont la cause n’est pas clairement définie. Selon la correspondance du peintre à cette époque, elle est due à une relation avec la femme de chambre de madame Vien, associé à une période de doute après la découverte des vestiges de Naples. Pour le sortir de cette crise de mélancolie, son maître lui fait avoir une commande pour un tableau à thème religieux commémorant l’épidémie de peste survenue à Marseille en 1720, Saint Roch intercédant la Vierge pour les malades de la peste, destiné à la chapelle du Lazaret de Marseille (musée des beaux-arts de Marseille. Même si l’on perçoit quelques résurgences du caravagisme, l’œuvre témoigne d’une nouvelle manière de peindre chez David, et s’inspire directement du style de Nicolas Poussin, en reprenant la composition en diagonale de l'Apparition de la Vierge à saint Jacques le majeur 1629, musée du Louvre. Achevé en 1780, le tableau est présenté dans une salle du palais Mancini et produit une forte impression sur les visiteurs romains. Lors de son exposition à Paris en 1781, le philosophe Diderot est impressionné par l’expression du pestiféré au pied de saint Roch.

Agrément par l’Académie

Pompeo Batoni, doyen des peintres italiens et un des précurseurs du néoclassicisme, tenta sans succès de le convaincre de rester à Rome, mais David quitte la ville éternelle le 17 juillet 1780 en emportant avec lui trois œuvres, le Saint Roch, et deux toiles alors inachevées, Bélisaire demandant l'aumône et le Portrait du comte Stanislas Potocki. Stanislas Potocki est un gentilhomme et esthète polonais qui a traduit Winckelmann ; le peintre l’avait rencontré à Rome et il le représente en s’inspirant des portraits équestres d'Antoon Van Dyck.
Il arrive à Paris à la fin de l’année et termine son Bélisaire Lille, musée des beaux-arts, tableau de grandes dimensions destiné à l’agrément de l’artiste par l’Académie royale de peinture et de sculpture, seul moyen pour les artistes de l’époque d’obtenir ensuite le droit d’exposer au Salon de l’Académie, à la suite de la décision du comte d’Angiviller, directeur général des Bâtiments du Roi, de limiter l’accès du Salon aux seuls artistes reconnus par l’Académie et à interdire les autres expositions publiques.
C’est après avoir vu le tableau sur le même sujet peint pour le cardinal de Bernis par Pierre Peyron, ancien concurrent pour le prix de Rome, que David décide de réaliser lui aussi une toile sur le général byzantin déchu. Tous les deux s’inspirent du roman de Marmontel. L’œuvre témoigne de sa nouvelle orientation picturale et de son affirmation du style néoclassique. Reçu à l’unanimité, il peut présenter ses trois peintures ainsi que sa grande étude des Funérailles de Patrocle au Salon de 1781, où elles sont remarquées par la critique, en particulier par Diderot qui, paraphrasant Jean Racine dans Bérénice, avoue sa fascination pour le Bélisaire : Tous les jours je le vois et crois toujours le voir pour la première fois.
Il épouse, en 1782, Marguerite Charlotte Pécoul, de dix-sept ans plus jeune que lui. Son beau-père, Charles-Pierre Pécoul, est entrepreneur des bâtiments du Roi, et dote sa fille d’une rente de 50 000 livres, fournissant à David les moyens financiers pour installer son atelier au Louvre où il dispose aussi d’un logement. Elle lui donnera quatre enfants, dont l’aîné Charles-Louis Jules David qui naîtra l’année suivante.
Il ouvre son atelier, où il reçoit des candidatures de la part de jeunes artistes désirant faire leurs apprentissages sous son enseignement. Fabre, Wicar, Girodet, Drouais, Debret sont parmi les premiers élèves de David.
Après l’agrément, David peint en 1783 son Morceau de réception, La Douleur d'Andromaque musée du Louvre, sujet qu’il choisit d’après un épisode de l'Iliade et dont le motif est inspiré du décor d’un sarcophage antique, La Mort de Méléagre, qu’il avait copié sur ses carnets à Rome. Avec cette œuvre, David est reçu comme membre de l’Académie le 23 août 1783, et, après la confirmation, il prête serment entre les mains de Jean-Baptiste Pierre, le 6 septembre.

Chef de file de la nouvelle école de peinture

Depuis 1781, David pensait faire, pour répondre à la commande des Bâtiments du Roi, une grande peinture d'histoire inspirée du thème du combat des Horaces et des Curiaces et indirectement de la pièce de Pierre Corneille, Horace. Mais c’est trois ans plus tard qu’il mène à bien ce projet en choisissant un épisode absent de la pièce, Le Serment des Horaces 1785, musée du Louvre, qu’il reprend peut-être de l’Histoire romaine de Charles Rollin, ou s’inspire d’une toile du peintre britannique Gavin Hamilton Le Serment de Brutus. Grâce à une aide financière de son beau-père, David part pour Rome en octobre 1784, accompagné de son épouse et d’un de ses élèves et assistant Jean-Germain Drouais, qui concourt pour le grand prix de Peinture. Il poursuit dans le Palazzo Costanzi la réalisation de son tableau, qu’il avait commencé à Paris.
David ne s’est pas tenu à la dimension de dix pieds sur dix 3,30 m sur 3,30 m imposée par les Bâtiments du Roi, mais agrandit le tableau, lui donnant une largeur de treize pieds sur dix 4,25 m sur 3,30 m. Sa désobéissance aux instructions officielles lui vaut une réputation d’artiste rebelle et indépendant. Il prend l’initiative d’exposer sa toile à Rome, avant la présentation officielle au Salon, où elle connaît un grand retentissement dans le milieu des artistes et des archéologues.
Malgré son succès à Rome, et le soutien du marquis de Bièvre, il doit se contenter d’un mauvais emplacement pour sa toile au Salon de 1785, qu’il impute à ses mauvaises relations avec Jean-Baptiste Pierre, premier peintre du roi et directeur de l’Académie royale de Peinture et de Sculpture, mais qui en fait est dû au retard pris pour envoyer l’œuvre à Paris après l’ouverture du Salon. Cela n’empêche pas Le Serment des Horaces de connaître un grand succès public et critique, et de faire considérer David comme le chef de file de la nouvelle école de peinture, que l’on ne nomme pas encore le néoclassicisme.
Les succès de David comme artiste établi et reconnu par ses pairs, comme portraitiste de la haute société de son temps et comme professeur, l’exposent cependant aux jalousies de l’Académie. Le concours de 1786 pour le Prix de Rome est annulé, car les artistes candidats sont tous des élèves de son atelier, et sa candidature pour le poste de directeur de l’Académie de France à Rome est refusée.
Cette même année, en l’absence de commande officielle du roi, il satisfait à celle de Charles Michel Trudaine de la Sablière, un aristocrate libéral, seigneur du Plessis-Franc et conseiller au parlement de Paris, en peignant La Mort de Socrate 1787, New York, Metropolitan Museum of Art, un tableau de demi-figure 1,29 mètre sur 1,96 mètre. Le geste de la main dirigée vers la coupe fut suggéré au peintre, selon le biographe P. A. Coupin, par son ami le poète André Chénier :
" Dans l’origine, David avait peint Socrate tenant déjà la coupe que lui présentait le bourreau. — Non ! non ! — lui dit André Chénier qui mourut également victime de l’injustice des hommes ; — Socrate, tout entier aux grandes pensées qu’il exprime, doit étendre la main vers la coupe ; mais il ne la saisira que lorsqu’il aura fini de parler."
Exposée au Salon de 1787, l’œuvre se trouve en concurrence avec la version que Peyron présente de la même scène, et qui était commandée par les Bâtiments du Roi. De fait, en choisissant sciemment le même sujet, David se confronte à nouveau avec son ancien rival du prix de Rome de 1773 et prend sa revanche par le succès qu’il rencontre lors de son exposition.
Il peint en 1788 Les Amours de Pâris et d’Hélène 1788, musée du Louvre pour le comte d’Artois, futur Charles X, qu’il avait commencé deux ans auparavant. C’est la seule commande émanant directement d’un membre de la famille royale ; celle d’un portrait de Louis XVI montrant la Constitution au Dauphin, que le roi lui demande en 1792, ne serjamais réalisée. L’année 1788 fut troublée par la mort précoce de son élève favori Jean-Germain Drouais, des suites de la petite vérole. À l’annonce de cette nouvelle, le peintre écrivit : J’ai perdu mon émulation.

Époque révolutionnaire

En 1788, David fait le Portrait d'Antoine-Laurent Lavoisier et de sa femme. Le chimiste Antoine Lavoisier, qui est aussi fermier général et occupe à l’époque la fonction d’administrateur de la régie des Poudres et salpêtres, a provoqué en août 1789 une émeute à l’arsenal de Paris pour y avoir entreposé de la poudre à canon. À la suite de cet incident, l’Académie Royale de Peinture et de sculpture juge plus prudent de ne pas exposer le tableau au Salon de 1789.
C’est aussi ce qui faillit arriver pour le tableau Les licteurs rapportent à Brutus les corps de ses fils. D’Angiviller, craignant une comparaison entre l’intransigeance du consul Lucius Junius Brutus sacrifiant ses fils qui conspiraient contre la République romaine et la faiblesse de Louis XVI face aux agissements du comte d’Artois contre le tiers état, ordonna de ne pas l’exposer, alors qu’il s’agissait d’une commande des Bâtiments du roi. Les journaux de l’époque se saisirent de l’affaire, y voyant une censure des autorités. Peu après cette campagne de presse, le tableau est exposé au Salon, mais le peintre consent à enlever les têtes tranchées des fils de Brutus plantées sur des piques, qui figuraient initialement sur la toile. Le Brutus connaît une grande popularité auprès du public, allant jusqu’à influencer la mode et le mobilier. On adopte des coiffures à la Brutus, les femmes abandonnent les perruques poudrées, et l’ébéniste Jacob réalise des meubles romains dessinés par David.
David fréquente depuis 1786 le milieu des aristocrates libéraux. Par l’intermédiaire des frères Trudaine, il fait la connaissance entre autres de Chénier, Bailly et Condorcet ; au salon de Madame de Genlis, il rencontre Barère, Barnave et Alexandre de Lameth, futurs protagonistes de la Révolution. Deux anciens condisciples nantais rencontrés à Rome, l’architecte Mathurin Crucy et le sculpteur Jacques Lamarie, lui proposent de faire une allégorie pour célébrer les événements pré-révolutionnaires qui se sont déroulés à Nantes à la fin de l’année 1788 : le projet n’aboutit pas, mais affirme la sympathie de David pour la cause révolutionnaire. En septembre 1789, prenant la tête, avec Jean-Bernard Restout, des Académiciens dissidents, un groupe fondé pour réformer l’institution des Beaux-arts, il demande la fin des privilèges de l’Académie, et notamment le droit pour les artistes non agréés de pouvoir exposer au Salon.
En 1790, il entreprend de commémorer le Serment du jeu de paume. Ce projet inspiré à David par Dubois-Crancé et Barère, est la plus ambitieuse réalisation du peintre. L’œuvre qui, une fois terminée, devait être le plus grand tableau de David dix mètres de large sur sept mètres de haut, soit un peu plus grand que le Sacre, représente les 630 députés présents lors de l’événement. Le projet est d’abord proposé, par son premier secrétaire Dubois-Crancé, à la Société des amis de la Constitution, premier nom du Club des Jacobins, à laquelle David vient d’adhérer. Une souscription pour la vente d’une gravure d’après le tableau pour le financement du projet est lancée, mais celle-ci ne permet pas de réunir les fonds nécessaires pour l’achèvement de la peinture.
En 1791, Barère proposa à l’Assemblée constituante de prendre la suite du financement du Serment, mais, malgré le succès de l’exposition du dessin au Salon de 1791, le tableau ne fut jamais achevé, David abandonnant définitivement le projet en 1801. Selon les biographes, les causes sont multiples, d’abord financières : la souscription est un échec, une somme de 6 624 livres est réunie au lieu des 72 000 livres prévues ; ensuite pour des raisons politiques : l’évolution des évènements fait que parmi les personnages du groupe principal, Barnave, Bailly et Mirabeau mort en avril 1791 sont discrédités par les patriotes pour leurs modérantismes et leurs rapprochements avec Louis XVI ; et pour des raisons esthétiques, David n’étant pas satisfait de la représentation de costumes modernes dans un style antique.
Tout en poursuivant son activité artistique, il entre en politique, en prenant la tête en 1790 de la Commune des arts, issue du mouvement des Académiciens dissidents. Il obtient en 1790 la fin du contrôle du Salon par l’Académie royale de peinture et de sculpture et participe comme commissaire adjoint au premier Salon de la liberté, qui ouvre le 21 août 1791. En septembre 1790, il milite auprès de l’Assemblée pour la suppression de toutes les Académies. La décision n’est entérinée, par un décret soutenu par le peintre et l’abbé Grégoire, que le 8 août 1793 ; entre-temps, il fait aussi supprimer le poste de directeur de l’Académie de France à Rome.
Le 11 juillet 1791, a lieu le transfert des cendres de Voltaire au Panthéon ; des doutes subsistent quant au rôle de David dans son organisation. Il semble en fait n’avoir été qu’un conseiller et ne pas avoir pris une part active à la cérémonie.

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Posté le : 29/08/2015 18:59
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Jacques -Louis David 2
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Peintre et conventionnel

Dès août 1790, Charlotte David, en désaccord avec les opinions de son mari, engage leur séparation et se retire un temps dans un couvent. Le 17 juillet 1791, David fait partie des signataires de la pétition demandant la déchéance de Louis XVI, réunis au Champ de Mars juste avant la fusillade ; il fait à cette occasion la connaissance du futur ministre de l'Intérieur, Roland. En septembre de la même année, il tente sans succès de se faire élire comme député à l'Assemblée législative. Son activité artistique se fait moins présente : s'il trouve le temps de faire son deuxième autoportrait dit Autoportrait aux trois collets 1791, Florence, Galerie des Offices, il laisse inachevés plusieurs portraits, dont ceux de Madame Pastoret et de Madame Trudaine.
En 1792, ses positions politiques se radicalisent : le 15 avril, il organise sa première fête révolutionnaire en l'honneur du régiment suisse de Chateauvieux, qui s’étaient mutinés dans leur garnison de Nancy. Son soutien à cette cause provoque la rupture définitive avec ses anciennes relations libérales, notamment André Chénier et Madame de Genlis.
Le 17 septembre 1792, il est élu 20e député de Paris à la Convention nationale, avec 450 voix aux élections du second degré68, et le soutien de Jean-Paul Marat qui le classe parmi les excellents patriotes. Représentant du peuple à la section du muséum, il siège avec le parti de la Montagne.
Peu après le 13 octobre, il est nommé au Comité d'instruction publique et, à ce titre, est chargé de l'organisation des fêtes civiques et révolutionnaires, ainsi que de la propagande. Au Comité, de 1792 à 1794, il s'occupe de l'administration des arts, qui s'ajoute à son combat contre l'Académie. Également membre de la Commission des monuments, il propose l'établissement d'un inventaire de tous les trésors nationaux et joue un rôle actif dans la réorganisation du Muséum des Arts. Il conçoit au début de l'année 1794 un programme d'embellissement de Paris et fait installer les chevaux de Marly de Guillaume Coustou à l'entrée des Champs-Élysées.
Du 16 au 19 janvier 1793 27 au 30 nivôse an I, il vote pour la mort du roi Louis XVI, ce qui provoque la procédure de divorce intentée par son épouse. Le 20 janvier, le conventionnel Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau est assassiné pour avoir, lui aussi, voté la mort du roi. David est chargé par Barère de la cérémonie funéraire et fait exposer le corps place des Piques. Il représente ensuite le député sur son lit de mort dans un tableau Les Derniers Moments de Michel Lepeletier, exposé à la Convention. Cette œuvre, qui est ensuite récupérée par le peintre en 1795, a probablement été détruite en 1826 par Suzanne Lepeletier de Mortefontaine la fille du conventionnel assassiné. Elle reste connue par un dessin de son élève Anatole Devosge, et une gravure de Pierre Alexandre Tardieu.
À l'annonce de l'assassinat de Marat le 13 juillet 1793, la Convention, par la voix de l'orateur François Élie Guirault, porte-parole de la Section du Contrat-Social, commande à David de faire pour Marat ce qu'il avait fait pour Lepeletier. Proche relation du conventionnel, David avait fait partie des derniers députés à l'avoir vu vivant, la veille de l'assassinat. Il peint, avec Marat assassiné 1793, un de ses tableaux les plus célèbres et emblématiques de sa période révolutionnaire, exposant l'assassinat dans sa crudité. Il s'occupe aussi des funérailles en organisant le 16 juillet une cérémonie quasi religieuse dans l'église des Cordeliers, précédée par un cortège funèbre. En octobre 1793, David annonce l'achèvement de sa toile. De novembre 1793 jusqu'à février 1795, les tableaux de Lepeletier et Marat vont siéger dans la salle des séances de la Convention.
Avec La Mort du jeune Bara David fait son troisième et dernier tableau sur le thème du martyr révolutionnaire, en prenant cette fois comme exemple le cas d'un jeune tambour de treize ans, Joseph Bara, tué lors de la guerre de Vendée pour avoir, selon la légende, refusé de crier Vive le Roi. Il était aussi chargé d'une célébration révolutionnaire pour sa panthéonisation et celle de Viala, mais les événements du 9 thermidor, date de la chute de Robespierre, font abandonner le projet.
David avait aussi envisagé de célébrer le général marquis de Dampierre, dont il a fait quelques croquis préparatoires à une toile qui ne sera pas réalisée ; le projet fut peut-être interrompu à l'annonce de l'assassinat de Marat.
À partir de la seconde moitié de l'année 1793, David occupe plusieurs postes à responsabilité politique. En juin, il est nommé président du club des Jacobins ; le mois suivant, il est secrétaire de la Convention. Il prend une part active dans la politique de la Terreur en devenant le 14 septembre 1793 membre du Comité de sûreté générale et président de la section des interrogatoires. À ce titre, il contresigne environ trois cents mandats d'arrestation, et une cinquantaine d'arrêtés traduisant les suspects devant le tribunal révolutionnaire. Il présida le comité lors de la mise en accusation de Fabre d'Églantine, et cosigna l'arrestation du général Alexandre de Beauharnais, et dans le cadre du procès de Marie-Antoinette, il participe comme témoin à l'interrogatoire du Dauphin, et fait peu après un célèbre dessin de la reine déchue alors qu'elle est conduite vers l'échafaud. Il n'empêche pas l'exécution d'anciens amis ou commanditaires comme les frères Trudaine, Lavoisier, la duchesse de Noailles, pour qui il avait peint un Christ en Croix, ou André Chénier. Carle Vernet lui imputa la responsabilité de l'exécution de sa sœur Marguerite Émilie Vernet qui avait épousé l'architecte Chalgrin. Cependant, il protège Dominique Vivant Denon en le faisant rayer de la liste des émigrés et en lui procurant un poste de graveur, appuie la nomination de Jean-Honoré Fragonard au conservatoire du Muséum des Arts, et aide son élève Antoine Jean Gros, dont les opinions royalistes pouvaient en faire un suspect, en lui donnant les moyens de partir en Italie. En 1794, David est nommé président de la Convention, fonction qu'il occupe du 5 au 21 janvier 16 nivôse au 2 pluviôse an II.
Comme ordonnateur des fêtes et cérémonies révolutionnaires, il conçoit avec l'aide de l'architecte Hubert, du menuisier Duplay (qui est aussi le logeur de Robespierre, du poète Marie-Joseph Chénier, frère d'André Chénier, et du compositeur Méhul, la fête de la réunion du 10 août, la translation des cendres de Marat au Panthéon qui ne sera organisée qu'après la chute de Robespierre, la fête de la reprise de Toulon, et, l'année suivante, le 8 juin, il organise la cérémonie de l'Être suprême dont il dessine les chars du cortège et les éléments de la cérémonie. Il fait aussi des caricatures de propagande pour le Comité de salut public, et dessine les projets de costumes pour les représentants du peuple, les juges… et même pour les simples citoyens un temps invités par les autorités révolutionnaires à arborer un habit républicain. Une tradition lui attribue aussi d'avoir en 1794, dessiné le pavillon national de la marine qui deviendra ensuite le drapeau tricolore français et d'avoir choisi l'ordre des couleurs bleu à la hampe, blanc et rouge flottant au vent.

Pendant le Directoire

Le 8 thermidor an II 26 juillet 1794, Robespierre est mis en difficulté par les députés de la Convention pour avoir refusé de nommer les membres des comités qu'il accuse de conspiration. Lors de cette séance, David déclare publiquement son soutien à l'incorruptible quand celui-ci prononce comme défense la phrase s'il faut succomber, eh bien ! mes amis, vous me verrez boire la ciguë avec calme, en lui répondant je la boirai avec toi. Le 9 thermidor, jour de la chute de Robespierre, David est absent de la convention pour des raisons de santé selon ses propres dires ; étant malade, il avait pris un émétique. Mais Barère, dans ses mémoires, affirme l'avoir prévenu de ne pas se rendre à l'assemblée : ne viens pas, tu n'es pas un homme politique. Par son absence, il échappe ainsi à la première vague d'arrestations qui entraîne les partisans de Robespierre dans sa chute.
Le 13 thermidor, à la Convention, David est sommé par André Dumont, Goupilleau et Lecointre, d'expliquer son soutien à Robespierre ainsi que son absence à la séance du 9 thermidor. Celui-ci tente maladroitement, selon le témoignage de Delécluze de se défendre et de renier son passé robespierriste. Lors de cette séance, il est exclu du Comité de sûreté générale, ce qui marque la fin de ses activités politiques. Décrété d'accusation le 15 du même mois en même temps que Joseph Le Bon, son arrestation déclenche la réaction contre les terroristes. David est emprisonné à l'ancien hôtel des Fermes générales, puis, le 10 fructidor, il est transféré au Luxembourg, mais on lui permet de disposer de son matériel de peinture durant son incarcération. Le 29 frimaire 30 novembre 1794 ses élèves se mobilisent, et, avec le soutien de Boissy d'Anglas, font une pétition pour demander sa libération. Entre-temps, Charlotte Pécoul, pourtant divorcée, apprenant son arrestation, revient auprès de son ancien époux ; le remariage sera prononcé le 12 novembre 1796. Le 10 décembre, après l'examen par les trois comités salut public, sûreté générale et instruction publique des pièces d'accusation de Lecointre contre David, Barère, Billaud-Varenne, Vadier et Collot d'Herbois constatant l'insuffisance de charges, le non-lieu et la mise en liberté du peintre sont décrétés.
David se retire en banlieue parisienne, à la ferme Saint-Ouen Favières, Seine-et-Marne, dans la maison de son beau-frère Charles Sériziat. Mais à la suite des émeutes de prairial, et d'une nouvelle mise en accusation émanant de la Section du Muséum, il est de nouveau arrêté, et emprisonné, le 11 prairial 29 mai 1795, au Collège des Quatre-Nations son ancienne école, devenue alors maison d'arrêt. À la demande de Charlotte David, il est transféré et mis sous surveillance à Saint-Ouen, avant de bénéficier le 4 brumaire an IV 26 octobre 1795 de l'amnistie politique des faits relatifs à la Révolution, qui marque la séparation de la Convention.
Durant son emprisonnement, David peint l'Autoportrait du Louvre 1794, et revient à la peinture d’histoire classique en concevant le projet d’un Homère récitant ses vers aux Grecs, qui n’aboutira pas et n'est connu seulement que par un dessin au crayon et lavis 1794, Paris, musée du Louvre, cabinet des dessins ; il fait aussi une première esquisse inspirée par le thème des Sabines, et peint de la fenêtre de sa cellule du Luxembourg un paysage, dont les historiens d'art pensent avec réserves qu’il s’agit de celui exposé au Louvre. Durant son second emprisonnement, il fait les portraits de conventionnels qui sont, comme lui, emprisonnés, notamment celui de Jeanbon Saint-André 1795, Chicago, Institut d'art de Chicago. Peu après son amnistie, il accepte d'être membre de l'Institut, nouvellement créé par le Directoire, dans la section peinture de la Classe de Littérature et Beaux-arts. En octobre 1795, il revient au Salon, où il n’avait pas exposé depuis 1791, avec deux portraits des membres de la famille Sériziat, réalisés lors de ses séjours à Saint-Ouen dans la résidence familiale. Il peint cette même année les portraits de Gaspar Mayer et Jacobus Blauw, les deux diplomates chargés de faire reconnaître par la France la jeune République batave.
Mais son activité sous le Directoire sera principalement accaparée par la réalisation des Sabines, qu'il peint de 1795 à 1798, et dans lequel sont symbolisées les vertus de la concorde. En revendiquant le retour vers le grec pur, David fait évoluer son style par le choix considéré à l'époque comme audacieux de représenter les héros principaux nus, ce qu'il justifie par une notice qui accompagne l'exposition de l'œuvre Notes sur la nudité de mes héros. Cet exemple est suivi et radicalisé par une faction de ses élèves qui se constituent autour de Pierre-Maurice Quays sous le nom des Barbus, ou groupe des primitifs, qui prônent un retour encore plus extrême au modèle grec, au point d’entrer en dissidence et de s’opposer à leur maître, lui reprochant le caractère insuffisamment archaïque du tableau. David finit par renvoyer les meneurs du groupe, Pierre-Maurice Quays et Jean-Pierre Franque, son assistant pour Les Sabines, qu’il remplace par Jérôme-Martin Langlois. Un autre élève collabore à sa réalisation, Jean-Auguste Dominique Ingres, nouvellement entré à l’atelier en 1797.
La présentation des Sabines est pour David l'occasion d’innover. Refusant de participer au Salon de peinture, et s'inspirant de l’exemple des peintres américains Benjamin West et John Singleton Copley, il organise une exposition payante de l’œuvre dans l’ancienne salle de l’Académie d'architecture, prêtée par l’administration du Louvre. Il installe en face du tableau un miroir où par un effet d'illusion, les visiteurs peuvent se croire intégrés dans l’œuvre. À cause du retentissement dû à la nudité des personnages et à la rumeur que les sœurs de Bellegarde, célèbres dans la société du Directoire, ont posé comme modèles, et à la controverse liée à son caractère payant, l’exposition, qui se déroule jusqu’en 1805, connaît un grand succès, attirant près de 50 000 visiteurs et rapportant 66 627 francs, ce qui permet à David de s’acheter en 1801 un ancien prieuré devenu une propriété de 140 hectares, la ferme des Marcoussis, à Ozouer-le-Voulgis en Seine-et-Marne.

David peintre de Bonaparte

L’admiration de David pour Bonaparte prend son origine à l’annonce de la victoire de Lodi le 10 mai 179698. L’artiste projetant de faire un tableau sur la prise du pont de Lodi, envoie une lettre au général pour lui demander un dessin du site. Un an plus tard, lors du coup d'État du 18 fructidor an V, prévenu des attaques dont David fait l’objet de la part du parti royaliste, Bonaparte envoie son aide de camp pour proposer au peintre de venir se mettre sous sa protection dans son camp de Milan, mais David décline l’invitation, devant se consacrer à son tableau des Sabines. C’est à la fin de l’année 1797, au retour triomphal de Bonaparte après la signature du traité de Campo-Formio, que les deux hommes se rencontrent lors d’une réception donnée par le Directoire ; à cette occasion, David propose à Bonaparte de faire son portrait, qui demeure inachevé 1798, Louvre. À la suite de l'unique séance de pose que Bonaparte ait acceptée, David manifeste auprès de ses élèves son enthousiasme pour celui qu'il nomme son héros.
Après le coup d’État de brumaire, qu’il accueille avec fatalité : J’avais toujours bien pensé que nous n’étions pas assez vertueux pour être républicains, David entreprend un nouveau projet de grande peinture d’histoire, avec comme sujet la résistance des spartiates de Léonidas au passage des Thermopyles, qu’il commence en 1800, mais qu’il n’achèvera que quatorze ans plus tard ; de même, à la suite d’insatisfactions et peut-être de l’impatience du modèle, il ne termine pas le portrait de Madame Récamier.
En août 1800, le roi d'Espagne Charles IV, dans le contexte d’une consolidation des relations diplomatiques et de coopération avec le nouveau pouvoir lié aux récentes victoires de Napoléon Bonaparte, commande, par l’intermédiaire de l’ambassadeur Charles-Jean-Marie Alquier, à l'ancien régicide David un portrait du Premier Consul pour son palais royal. Il peint Bonaparte franchissant le Grand-Saint-Bernard, qui est suivi de trois répliques exécutées à la demande du modèle, faisant de cette œuvre le premier portrait officiel du Premier Consul, qui sera largement diffusé par la gravure, ce qui contribue à en faire l’un des portraits les plus célèbres de Napoléon. David décide de présenter les deux premières versions du portrait équestre dans le cadre de l’exposition payante des Sabines, ce qui provoque un tollé dans la presse qui critique le peintre de ne pas les avoir exposés au Salon dont l'accès est libre, alors que les deux toiles ont été payées par leurs commanditaires. Cela vaut à David une réputation de cupidité, aggravée par l’affaire de la gravure du Serment du jeu de paume, dont des souscripteurs, encouragés par Lecointre, réclament le remboursement. David fera paraître une lettre de justifications dans plusieurs journaux.
Sous le Consulat, David est sollicité par le pouvoir comme conseiller artistique ; il conçoit un costume pour les membres du gouvernement, qui n’est pas retenu, participe à la décoration des Tuileries, et il est chargé de réfléchir sur le projet de colonnes nationales et départementales. Il prépare aussi un projet de réforme des institutions artistiques, dont il envisage de devenir administrateur des arts, qui est refusé par le ministre de l’Intérieur Lucien Bonaparte. Ce dernier lui propose à la place de devenir Peintre du gouvernement, mais l’artiste refuse, selon Delécluze, par dépit de n’avoir pu accéder à de plus hautes fonctions. Il refuse aussi de devenir membre de la Société libre des arts du dessin, créée par le ministre Chaptal.
Indirectement impliqué dans la conspiration des poignards, une tentative d’assassinat contre Bonaparte qui devait avoir lieu en octobre 1800 à l’Opéra de la rue de Richelieu, notamment pour avoir laissé distribuer dans son atelier des billets de la représentation des Horaces pièce lyrique de Bernardo Porta inspiré par son tableau Le Serment des Horaces, à des membres de la conspiration, David doit expliquer lors du procès ses relations avec deux des conjurés, son ancien élève François Topino-Lebrun, ancien partisan babouviste et le sculpteur romain Giuseppe Ceracchi. Son témoignage à décharge n’empêche pas leur exécution en janvier 1801 peu de temps après l’attentat de la rue Saint-Nicaise, et réveille le passé jacobin du peintre qui voit son atelier mis sous surveillance par la police de Fouché.
Plusieurs voyageurs britanniques profitent de la paix d'Amiens pour voyager en France, visiter entre autres le Louvre, et rencontrer David considéré par John Carr, l’un de ces voyageurs, comme le plus grand artiste français vivant. C’est dans ces circonstances que l’entrepreneur et quaker irlandais, Cooper Penrose, demanda au peintre son portrait. La commande fut acceptée pour une somme de 200 louis d’or 1802, San Diego, Californie, Timken Museum of Art.

Le Premier peintre de l'empereur

Le 18 décembre 1803, David est nommé chevalier de la Légion d’honneur et est décoré le 16 juillet de l’année suivante. En octobre 1804, David reçoit de Bonaparte devenu empereur sous le nom de Napoléon Ier, la commande de quatre tableaux de cérémonie : Le Couronnement, La Distribution des Aigles, L’Intronisation et l’Arrivée à l’hôtel de ville. Peu après la cérémonie il l'investit dans la fonction de Premier peintre, mais sans disposer des mêmes attributions liées à ce titre que Charles Le Brun auprès de louis XIV. En fait, depuis 1802, l’administration des arts était confiée à la seule charge de Dominique Vivant Denon.
Il dispose d'une loge à Notre-Dame d'où il peut suivre les épisodes et les détails de la cérémonie du sacre. Il y prend des croquis, et réalise Le Sacre de Napoléon en trois ans. Il a relaté lui-même comment il opéra :
J'y dessinai l'ensemble d'après nature, et je fis séparément tous les groupes principaux. Je fis des notes pour ce que je n'eus pas le temps de dessiner, ainsi on peut croire, en voyant le tableau, avoir assisté à la cérémonie. Chacun occupe la place qui lui convient, il est revêtu des habillements de sa dignité. On s'empressa de venir se faire peindre dans ce tableau, qui contient plus de deux cents figures...
David, qui, comme les autres artistes résidents, venait d’être expulsé du Louvre où il possédait deux ateliers, disposa de l’ancienne église de Cluny pour les besoins de la réalisation du tableau, dont les dimensions importantes 9,80 mètres sur 6,21 mètres nécessitaient un grand local.
Détail du Sacre, deuxième à partir de la gauche, David dessinant le couronnement, à ses côtés son élève Rouget.
Si David a conçu seul la composition de l’œuvre, qui à l’origine devait montrer l’empereur se couronnant lui-même, mais qui fut remplacé par le couronnement de Joséphine de Beauharnais sur la suggestion de son ancien élève François Gérard110, Napoléon lui fait subir d’autres modifications, dont la plus remarquée est d’ajouter la mère de l'empereur Letizia Bonaparte, qui, en réalité, n’avait pas assisté à la cérémonie. Il fait aussi attribuer au pape Pie VII un geste de bénédiction, alors que David lui avait fait prendre une attitude passive : Je ne l'ai pas fait venir de si loin, pour qu'il ne fasse rien. David profite de la venue du souverain pontife pour faire aussi son portrait 1805, Paris, musée du Louvre, ce qui mécontente Napoléon. De même, celui-ci refuse un portrait impérial destiné à la ville de Gênes qu'il juge : ... si mauvais, tellement rempli de défauts, que je ne l'accepte point et ne veux l'envoyer dans aucune ville surtout en Italie où ce serait donner une bien mauvaise idée de notre école.
Napoléon félicitant David lors de l'exposition du Sacre, lithographie de Motte d'après Norblin Cabinet des estampes Paris.
L’exposition du Sacre est l’événement du Salon de 1808 ; Napoléon, voyant l’œuvre terminée, témoigne de sa satisfaction et promeut l'artiste, qui est fait officier de la Légion d’honneur.
Dans le tableau La Distribution des Aigles, David doit, sur ordre de l'empereur, réaliser deux modifications importantes : il vide le ciel de la Victoire qui fait pleuvoir sur la tête des Drapeaux une pluie de laurier et, après 1809, il fait disparaître de la scène Joséphine répudiée, la première modification rendant sans objet le mouvement de tête des maréchaux qui regardent désormais le vide à l'emplacement où se trouvait l'allégorie.
À partir de 1810, les relations entre David et le pouvoir se distancient, principalement à cause des difficultés de paiements des tableaux du Sacre et de La Distribution des Aigles, qui fut son dernier travail pour Napoléon. Le pouvoir, par l'intermédiaire de l'administration des arts, conteste les prétentions financières du peintre, jugées exorbitantes. Par ailleurs, il est exclu de la commission pour la réorganisation de l'école des Beaux-arts. Le dernier portrait qu'il peint de l'empereur, Napoléon dans son cabinet de travail, est une commande privée émanant d'un politicien et collectionneur écossais, Alexander, marquis de Douglas et Clydesdale futur dixième duc de Hamiltonn .
La même année, l'Institut organise le concours des Prix décennaux, qui distinguait les œuvres considérées comme marquantes pour la décennie 1800-1810. Le Sacre est récompensé du prix du meilleur tableau national, mais David considéra comme un affront de voir les Sabines classé deuxième derrière la Scène de déluge de Girodet, primé meilleur tableau d'histoire de la décennie.
Vers la fin de l'Empire, David reprend les commandes privées, dont une scène mythologique, Sapho, Phaon et l'Amour, destinée au prince et collectionneur Nicolas Youssoupov, où le peintre renoue avec une antiquité galante déjà traitée avec Les Amours de Pâris et d'Hélène. Il achève en mai 1814 Léonidas aux Thermopyles, commencé quatorze ans auparavant, inspiré de l'antiquité grecque, et dont il renforce l'esthétique du retour au grec pur qu'il avait prôné quinze ans plus tôt avec les Sabines, et qui en constitue le pendant. Conçu dès 1800, le sujet du tableau prend une signification particulière en 1814, année de la première abdication de Napoléon après la campagne de France.
Durant les Cent-Jours, David est réintégré dans son rang de Premier peintre, dont il avait été déchu sous la première Restauration, et est élevé à la dignité de commandeur de la Légion d'honneur. En mai 1815, David reste fidèle au régime impérial en signant les Actes additionnels aux constitutions de l'Empire, d'inspiration libérale.

Exil et mort à Bruxelles

Si ses anciens élèves Antoine-Jean Gros, François Gérard et Girodet, se rallient à la monarchie, David, pressentant des représailles dues à son passé révolutionnaire et son soutien à Napoléon, décide, après Waterloo, de mettre en sûreté ses tableaux des Sabines, du Sacre, de la Distribution des Aigles et Léonidas, et de se réfugier en Suisse ; il revient en France en août 1815. Malgré la proposition du ministre de la police Élie Decazes de le soustraire à la loi du 12 janvier 1816 qui exclut de l'amnistie et qui proscrit du royaume les régicides ayant signé l'Acte additionnel, le peintre décide de s'y soumettre, et après avoir confié la gestion de son atelier à Antoine Gros, il quitte définitivement la France. Deux mois après, son nom est rayé du registre de l'Académie des beaux-arts.
Dans un premier temps, il sollicite l'asile auprès de Rome, qui le lui refuse. Il choisit alors la Belgique, qui l'accueille le 27 janvier 1816, et il retrouve à Bruxelles d'autres anciens conventionnels régicides : Barère, qui avait suggéré le projet du Serment du Jeu de paume, Alquier, qui avait été à l'origine de la commande du portrait équestre de Bonaparte, et Sieyès, dont il fait le portrait. Il retrouve aussi plusieurs anciens élèves belges, Navez, Odevaere, Paelinck et Stapleaux, qui l'assiste dans la réalisation de plusieurs tableaux.
Refusant les nombreuses interventions de Gros et de ses élèves, qui ont fait une pétition pour obtenir son retour en France, et les offres de pardon du roi Louis XVIII, ainsi que la proposition du roi de Prusse Frédéric-Guillaume III qui désire faire de David son ministre des arts, il choisit de rester en Belgique.
Il devient un spectateur privilégié du théâtre de la Monnaie et s'enthousiasme pour les œuvres des maîtres hollandais et flamands, qu'il voit à Bruxelles, et qui font évoluer sa manière en ravivant sa palette. Il peint à cette époque un nombre important de portraits d'exilés et de notables belges, et plusieurs tableaux inspirés de la mythologie. Il fait les portraits des filles de Joseph Bonaparte de passage avec leur mère à Bruxelles, et pour qui il donne aussi à l'une des filles, Charlotte Bonaparte, des cours de dessin. Il peint deux tableaux inspirés de l’Iliade et l’Odyssée, La Colère d'Achille 1819 et Les Adieux de Télémaque et d'Eucharis 1822, qui tire son origine du texte de Fénelon Les Aventures de Télémaque, ainsi que L'Amour et Psyché 1817, Cleveland Museum of Art pour le comte Sommariva, qui, lors de son exposition à Bruxelles, choque les visiteurs par le traitement réaliste de Cupidon directement peint d'après modèle et loin de l'idéalisme antique dont le peintre est coutumier. En 1822, assisté de Georges Rouget, il peint pour des commanditaires américains une copie du Sacre 1822, musée national du château de Versailles et de Trianon.
À 75 ans, il exécute Mars désarmé par Vénus et les grâces 1824, Musées royaux des beaux-arts de Belgique, tableau de plus de trois mètres de haut qui est sa dernière grande peinture d'histoire. Il organise l'exposition du tableau à Paris, qui attire neuf mille cinq cent visiteurs. À l'occasion de cette exposition, paraît la deuxième biographie du peintre, Notice sur la vie et les ouvrages de M. J.-L. David, dont l'auteur est anonyme.
À partir de 1820, David connaît plusieurs problèmes de santé qui s'aggravent quand, en 1824, revenant du théâtre de la Monnaie, il est renversé par une calèche, ce qui provoque un œdème. En novembre 1825, il est paralysé des mains à la suite d'une congestion cérébrale et ne peut plus peindre. À son retour du théâtre, il prend froid. Peu avant de mourir, il a le temps de donner à Stapleaux des indications pour la gravure d'après Léonidas. Il expire dans son lit le 29 décembre 1825, au numéro 7 de la rue Léopold, située à l'arrière du théâtre de la Monnaie.
Son corps gît dans l'église Sainte-Gudule, dans l'attente d'une réponse du gouvernement français à la demande de sa famille de faire revenir sa dépouille en France. Le 11 octobre 1826, après que le gouvernement français eut refusé son rapatriement, il est d'abord enterré au cimetière du Quartier Léopold à Saint-Josse-ten-Noode; seul le cœur du peintre repose à Paris au cimetière du Père-Lachaise, auprès de son épouse Charlotte David, morte peu après lui, le 26 mai 1826. En 1882 les restes de David furent transférés au cimetière de Bruxelles à Ever.

Personnalité La tumeur de David

David est souvent identifié par ses contemporains par la tumeur à la joue gauche qui lui déformait le visage, et qui enfla avec le temps. Ce qui lui valut le surnom de Grosse-Joue ou la grosse joue par la presse royaliste pendant le Directoire. Dans ses autoportraits il dissimulait ce défaut physique par une ombre, mais d’autres artistes comme Jérôme-Martin Langlois dans le dernier portrait du peintre fait de son vivant et François Rude montrent sans complaisance la déformation causée par le kyste.
Selon les biographies, l'origine de cette tumeur est consécutive d'une blessure dans la bouche due à un combat à l'épée ou un exercice d'escrime qui se serait déroulé dans l'atelier de son maître Vien. Hormis la déformation de la joue cette tumeur eut aussi des conséquences sur son élocution, l'empêchant de s'exprimer normalement13, difficulté ajoutée à un grasseyement dans la prononciation qui lui rendait difficile la lecture des discours en public. J. Wilhelm attribue cette déformation à une exostose de la parotide, ou d'après Hautecœur à « une tumeur mixte de la parotide à évolution lente.
Un article du Journal of the Royal Society of Medicine, Jacques-Louis David and his post-traumatic facial pathology, précise que la profonde blessure sur le pourtour gauche de la lèvre supérieure provoqua une asymétrie du visage et une paralysie partielle rendant difficiles et éprouvants les mouvements de mastication et la parole. Il remarque aussi dans l'autoportrait de 1794 une cicatrice traversant la joue sous l'orbite gauche qui peut justifier la présence d'un granulome ou d'un neurome résultant d'un traumatisme du nerf facial.

Revenus et patrimoine

David doit en partie le lancement de sa carrière à l'importante dot que son beau-père procura à sa fille Charlotte pour son mariage. Ce qui lui permit d'installer son atelier au Louvre, et d'organiser l'exposition des Horaces à Rome. Il vendait ses peintures à des prix élevés pour l'époque, le Serment des Horaces lui rapporta 6 000 livres, le Bonaparte au Grand-Saint-Bernard lui fut payé 25 000 livres tournoi par la Couronne d'Espagne. Comme autre source de revenus, ses élèves lui payaient douze livres mensuelles pour recevoir son enseignement, ce qui lui faisait selon les calculs d'Antoine Schnapper de 4 à 5 000 livres par an. Il initia en France la pratique des expositions payantes pour ses Sabines, dont la présentation durant cinq années dans une salle du Louvre lui permit de se constituer une fortune de 66 627 francs. L'autre exposition payante qu'il organisa pour Mars désarmé par Vénus en 1824 attira 9 538 personnes qui payèrent deux francs la visite. Sous l'Empire il bénéficiait d'un traitement de Premier peintre de 12 000 francs annuels. Une autre source de revenus importante lui était procurée par le droit de gravure » que lui rapportait la reproduction de ses tableaux. Pierre Rosenberg indique que les David étaient quasiment millionnaires.

Appartenance à la franc-maçonnerie

Le thème du serment que l’on retrouve dans plusieurs œuvres comme Le Serment du jeu de paume, La Distribution des aigles, Léonidas aux Thermopyles, fut peut-être inspiré à David par les rituels de la franc-maçonnerie. À la suite de l'historien d'art Jacques Brengues, Luc de Nanteuil et Philippe Bordes avec des réserves, reprochant à Brengues l’absence de preuves, ont avancé que le peintre avait été franc-maçon. En 1989 lors du colloque David contre David Albert Boime a pu attester sur la base d'un document daté de 1787 de l’appartenance du peintre à la loge maçonnique de la Modération comme membre affilié.

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Posté le : 29/08/2015 18:52
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Jacques-Louis David 3
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Mariage et descendance

Jacques-Louis David se marie en 1782 avec Marguerite Charlotte Pecoul, et postérité :
Charles, baron David 1783-1854, diplomate, archéologue, philologue. Il reconnaît pour fils Jérôme David 1823-1882, en réalité fils naturel de Jérôme Bonaparte et de son épouse, Marie Capinaki décédée en 1879, d'où postérité éteinte ;
Eugène, baron David 1784-1830, dont deux fils : Eugène et Jacques Louis Jules, sans postérité ;
Laure David 1786-1863, qui épouse le général Claude Marie Meunier, dont postérité : Jules, 2e baron Meunier 1813-1867, notaire et ancien maire de Lille, Alfred et Émilie ;
Pauline David 1786-, qui épouse le général baron Jean-Baptiste Jeanin 1771-1830, dont postérité : Louis-Charles, 2e baron Jeanin 1812-1902, préfet de Côte-d'Or, et nombreuse descendance, notamment dans les familles Bianchi, Fleury, de Hauteclocque et Ustinov.

Titre

Chevalier David et de l'Empire à la suite du décret du 26 frimaire an XII le nommant membre de la Légion d'honneur, lettres patentes du 10 septembre 1808 signées à Saint-Cloud ;

Distinctions

Légion d'honneur:
Légionnaire décret du 26 frimaire an XII : 18 décembre 1803, puis,
Officier décret du 22 octobre 1808, puis,
Commandant de la Légion d'honneur décret du 6 avril 1815,
Rayé des registres matricules par décision royale du 2 mars 1816,
Réintégré par décision du 22 novembre 1830 en conformité de la loi du 2 septembre précédent.

Armoiries


Figure Blasonnement et livrée
Armes de chevalier de l'Empire

Le Serment des Horaces, détail du groupe principal, David, 1784-1785, musée du Louvre.
D'or à la palette de peintre de sable chargée de deux bras de carnation mouvant à dextre d'un manteau de gueules, la main dextre apaumée, la sénestre tenant trois sabres de fer poli ; le tout soutenu d'une champagne de gueules au signe des chevaliers.
Ornements extérieurs : Toque de velours noir, retroussée de sinople, avec porte-aigrette d'argent, et aigrette de même métal.
Livrée : bleu, jaune, rouge, blanc et noir.
Armes parlantes Ces armes reprennent le motif du tableau Le Serment des Horaces.

Å’uvres

Genres et thèmes dans la peinture de David David peintre d'histoire

Sa formation académique et son parcours artistique, ont fait de David un peintre d'histoire, genre considéré depuis le xviie siècle, selon la classification de Félibien, comme le grand genre. Jusqu'à son exil, les œuvres auxquelles il accorde le plus d'importance sont des compositions historiques inspirées par les sujets tirés de la mythologie Andromaque, Mars désarmé par Vénus ou l'histoire de l'Antiquité romaine et grecque Brutus, Les Sabines, Léonidas. À partir de la Révolution, il essaye d'adapter son inspiration antique aux sujets de son temps en peignant aussi des œuvres à sujet contemporain. Les œuvres les plus caractéristiques sont Le Serment du jeu de paume, La Mort de Marat et Le Sacre.
Élie Faure définit ainsi le style du peintre d'histoire : Dans ses scènes d'histoire … tout ce qui est chose actuelle, accessoire impossible à modifier dans la matière, est peint avec le plus dense et le plus opaque éclat. Faure compare sa précision, son souci du détail à l'art du conteur ... par quelque figure fleurie de chantre, par quelque ventre obèse de chanoine, qu'il faut chercher patiemment dans le coin le moins visible de telle toile solennelle, mais que trouverait La Fontaine et que Courbet n'a pas manqué de voir

David portraitiste

Le portrait est l'autre genre pictural qui fait reconnaître sa peinture. Du début de sa carrière jusqu'à l'exil en Belgique, il portraiture ses proches et relations ainsi que des notables de son entourage ; ses essais dans le portrait officiel concernent ses portraits équestres de Napoléon et en costume du sacre, celui du pape Pie VII, et ses portraits de quelques membres du régime, comme Estève et Français de Nantes. Son style dans ce genre préfigure les portraits d'Ingres. On lui connaît aussi trois autoportraits. La redécouverte de David à la fin du xixe siècle est principalement due à l'exposition de ses portraits.
Les portraits de David se caractérisent par sa manière de montrer la figure dans le choix de poses simples, souvent représentés en buste et assis Alphonse Leroy, la comtesse Daru, Sieyès, plus rarement en pied portraits des époux Lavoisier, du général Gérard et de Juliette de Villeneuve. L'économie dans le choix des accessoires, et le traitement du fond souvent résumé à un ton neutre. Une assurance dans le dessin et les lignes. Une recherche du réalisme dans la représentation des costumes, un souci de la ressemblance et des expressions peu marquées voire sèches, sauf pour les portraits féminins plus gracieux.
Élie Faure donne une appréciation de sa technique de portraitiste : les portraits... avec leurs fonds troubles et gris et leur matière hésitante, avec leur vigueur expressive et leur fidélité au modèle...ils vivent, et pourtant leur vie tient dans des limites précises. Ils sont bâtis comme des monuments et cependant leur surface remue. Ils respirent en même temps la force et la liberté.
Le souci du réalisme qui caractérise ses portraits a amené la plupart des critiques à considérer qu'il y avait une dualité chez David, d'un côté le peintre d'histoire, théoricien du beau idéal entrant en conflit avec le portraitiste, peintre du réalisme intimiste. Ce second aspect de son art étant souvent considéré comme supérieur, résumé par ces mots d'André Chamson : ce qui classe David au premier rang de nos peintres, c'est avant tout le portrait. Peintre de la passion rationaliste, il fut l'excellence dans la reproduction fidèle et objective des choses, mais échoua à y insuffler le germe fécond de la vie. ...une confusion permanente entre la vérité qu'il rencontra et la vie qu'il croyait atteindre.

Autres genres

Il fait trois peintures à sujet religieux, un Saint Jérôme, le Saint Roch intercédant la vierge, et un Christ en croix. Il ne peint pas de nature morte, et on ne lui attribue qu'un seul paysage peint qu'il a fait de la fenêtre du palais du Luxembourg en 1794 quand il fut emprisonné.

Dessins État des dessins

Vue de l'église San Saba à Rome, lavis à l'encre sur pierre noire 1785, Paris, musée du Louvre.
L'œuvre graphique de David est très importante par le nombre. On recense un millier de dessins, au moins, regroupés en douze albums romains, plus quatorze carnets constituant 680 folios et 468 dessins isolés faits à des périodes diverses, dont 130 dessins lors de son exil à Bruxelles. Le Louvre possède une grande collection avec 415 feuillets dont huit carnets et deux albums romains.

Technique

Les techniques employées vont du fusain aux lavis, en passant par la pierre noire qu'il privilégiait, et le dessin à l'encre rehaussé de lavis et plus rarement le pastel et la sanguine. Dans ses grandes compositions, il combine plusieurs techniques. Selon l'état d'avancement des dessins David les désigne selon la classification d'Antoine Joseph Dezallier d'Argenville en pensées pour les moins élaborés, viennent ensuite les dessins arrêtés, les études pour le travail sur l'anatomie ou sur une partie d'un corps, les académies, et les cartons pour les dessins constituant l'état final d'une œuvre comme celui à l'encre et au lavis pour Le Serment du jeu de paume seul dessin que David exposa pour le Salon de 1791. Dans la pratique David ne peut se dispenser de modèles pour ses dessins et l'élaboration de ses œuvres.

Types de dessins

L'œuvre graphique de David se divise en plusieurs types, il utilise le dessin pour faire des copies d'après l'Antique. Lors de son séjour à Rome il se constitua ainsi une collection de dessins qui lui sert plus tard comme sources et modèles pour ses œuvres ultérieures156. On répertorie un grand nombre de paysages romains, principalement des vues urbaines réalisées entre 1775 et 1785, alors qu'il a très peu traité ce genre en peinture157. Des frises d'inspiration antique, des caricatures dont un célèbre dessin représentant Marie-Antoinette conduite à l'échafaud 1793, Louvre et des projets de médailles ou de costumes.

Style

Delecluze considérait qu'il n'y avait pas chez David un style unique, mais une évolution qui s'observait à travers quatre périodes stylistiques représentées par le Serment des Horaces 1784, la Mort de Marat 1793, les Sabines 1799 et le Sacre de Napoléon 1808.

Première période rococo

David né en 1748 en pleine période du rococo commence par être influencé par ce style, dont le chef de file est François Boucher. La première peinture attribuée au peintre, découverte en 1911 par Saunier, Jupiter et Antiope avant 1770, montre l'influence qu'a eue sur David la manière de Boucher. Ce style marque encore l'enseignement académique de cette fin du xviiie siècle, et imprègne la peinture de David quand il concourt pour le prix de Rome. Ses trois premiers travaux combat de Mars contre Minerve, Diane et Apollon perçant de leurs flèches les enfants de Niobé et la Mort de Sénèque combinent à la fois l'influence de Boucher, et de Doyen. Il est difficile de déduire à partir de ces toiles, l'évolution vers la rigueur antique qui caractérisera David, tant elles sont marquées par l'esthétique rococo, avec une palette vive, voire criarde, et une composition grandiloquente.
L'art français amorce à l'époque un changement esthétique, le rococo tombe en désuétude, l'antique est à la mode. Les Bâtiments du roi conscients de ce changement encouragent les artistes en ce sens. En comparaison à ses condisciples Vincent, Peyron et Suvée, la peinture de David, qui est pourtant élève de Vien, peintre symbolisant ce renouvellement, paraît en retard ; en témoignent ses échecs pour obtenir le Grand prix de Rome. Par contraste ses premiers portraits des membres des familles Buron et Sedaine, montrent une facture plus réaliste et une composition plus simple, malgré d'évidentes maladresses anatomiques.
L'enseignement de Vien va porter ses fruits, et obliger David à discipliner sa peinture avec Érasistrate découvrant la cause de la maladie d’Antiochius, qui lui permet d'obtenir le grand prix. Cette toile marque un changement manifeste par rapport à ses précédents essais, autant dans le choix d'une palette moins vive, que dans une composition plus rectiligne et moins grandiloquente. Ce succès n'empêche pas David alors en partance pour Rome, d'émettre à l'époque des réserve. De Saint-Roch à Bélisaire, la conversion au néoclassicisme
s contre le style hérité de l'antique : L'antique ne me séduira pas ; il manque d'entrain et ne remue pas.

Maturation artistique et rejet du style français

Entre son départ pour Rome et la fin de son séjour marqué par son Bélisaire, David va radicalement changer son style pictural, et se convertir sans réserve au néoclassicisme. Mais cette maturation stylistique se fera en plusieurs étapes, avant d'aboutir à la manière qui caractérise les derniers tableaux de la période romaine.
Sur le chemin de Rome, il s'arrête à Parme, Bologne, et Florence, et est frappé par les maîtres de la Renaissance italienne et du baroque, Raphaël Le Corrège Guido Reni entre autres, qui mettent en doute son attachement pour le style français166. Il est plus particulièrement attiré par l'école bolonaise dont il remarque la simplicité des compositions et la vigueur du dessin. Il dira plus tard, sur ses révélations : À peine fus-je à Parme que voyant les ouvrages de Corrège, je me trouvai déjà ébranlé ; à Bologne, je commençai à faire de tristes réflexions, à Florence, je fus convaincu, mais à Rome, je fus honteux de mon ignorance. Cette révélation ne se concrétise pas immédiatement dans sa peinture ou ses dessins. À Rome il doit d'abord s'astreindre à faire des copies d'après l'antique, selon les directives de son maître Vien.
C'est de cette époque 1776-1778 que datent deux grandes compositions d'histoire, le dessin Les Combats de Diomède et la peinture Les Funérailles de Patrocle. Par comparaison avec ses précédentes compositions historiques, David montre une approche moins théâtrale, un modelé et des couleurs plus franches, mais reste encore influencé par le style français et baroque que désormais il rejette. On peut y reconnaître l'influence des batailles de Charles Le Brun autant dans le choix d'un format allongé que dans la profusion des personnages, mais on y décèle aussi les marques d'artistes modernes qu'il a vus à Rome, ceux de l'école bolognaise et les compositions de Gavin Hamilton, premier représentant du néoclassicisme dont il fait référence.
L'année 1779 marque un tournant dans l'évolution du style davidien, principalement due à l'influence des caravagesques, Le Caravage, José de Ribera et surtout Valentin de Boulogne dont il copie la Cène. Cette copie, qui a disparu depuis, montrait des coloris sombres, une atmosphère dramatique dans le traitement des ombres, qui tranchait avec ses précédentes productions169. Datent aussi de cette période une étude de tête de philosophe et une académie de saint Jérôme dont le réalisme fait référence à Ribera. Pour Schnapper, c'est en 1779 que son style change vraiment et que David devient David169. David expliqua plus tard, à Delécluze comment il avait perçu ce style réaliste et comment il en fut imprégné :
Aussi quand j'arrivai en Italie avec M Vien ... fus-je d'abord frappé, dans les tableaux italiens qui s'offrirent à ma vue, de la vigueur du ton et des ombres. C'était la qualité absolument opposée au défaut de la peinture française, et ce rapport nouveau des clairs aux ombres, cette vivacité imposante de modelé dont je n'avais nulle idée, me frappèrent tellement que, dans les premiers temps de mon séjour en Italie, je crus que tout le secret de l'art consistait à reproduire comme l'ont fait quelques coloristes italiens de la fin du XVIe siècle, le modelé franc et décidé qu offre presque toujours la nature. J'avouerai, ... qu'alors mes yeux étaient encore tellement grossiers que, loin de pouvoir les exercer avec fruit en les dirigeant sur des peintures délicates comme celles d Andréa del Sarto, du Titien ou des coloristes les plus habiles, ils ne saisissaient vraiment et ne comprenaient bien, que les ouvrages brutalement exécutés, mais pleins de mérite d'ailleurs des Caravage, des Ribera, et de ce Valentin qui fut leur élève.

De Saint-Roch à Bélisaire, la conversion au néoclassicisme

David connaît à cette période des moments d'exaltations suivis de découragements, qui se manifestent dans son travail artistique. Paradoxalement, c'est dans ces moments de crise et de doutes que va aboutir son style, et qu'il va atteindre la maîtrise. Pourtant, les modèles antiques qu'il a copiés à Rome, ne sont pas encore pour lui des références plastiques et stylistiques, il s'en tient aux modèles picturaux modernes. C'est le séjour de Naples et la découverte des antiquités d'Herculanum qui vont le faire changer d'avis, et lui faire l'effet d'une révélation. Il avoua plus tard avoir été comme opéré de la cataracte. Il est difficile de savoir si cette révélation fut aussi brutale, David ayant probablement amplifié a posteriori l'importance de l'événement. Cependant, à son retour de Naples, il réalise deux œuvres majeures qui témoignent d'une nouvelle orientation.
Saint Roch intercédant la Vierge expose sa manière de restituer le réalisme assimilé à travers les exemples bolonais et caravagesques. Cette œuvre de commande, premier chef-d'œuvre dans sa peinture, marque son originalité par la figure du pestiféré au premier plan, dont le réalisme fait rupture avec la figure désincarnée de la vierge. Dans le traitement abrupt des clairs-obscurs, les ombres franches, l'abandon de coloris décoratifs pour des tons éteints presque gris ce qui lui fut reproché, à travers ces procédés David concentre le regard sur la composition centrale. Par son sujet la toile n'est pas originale en elle-même, elle fait référence autant à Poussin dans l'ordonnance des figures, qu'au Caravage dans le caractère ascensionnel de la composition et Raphaël pour la figure de la vierge, mais c'est son traitement pictural qui révèle une originalité qui surprit les observateurs et les condisciples de David.
Si le Saint Roch montrait comment David avait compris et restitué les styles réalistes hérités des écoles italiennes modernes, la Frise dans le style antique, un long dessin de plus de deux mètres depuis coupé en deux morceaux, montre par sa composition avec des figures profilées, l'assimilation des enseignements d'après l'antique que David a reçus depuis 1776, voire l'acculturation à l'antiquité romaine comme le souligne Philippe Bordes. Il fait directement référence aux bas-reliefs ornant les sarcophages romains. En comparaison avec son précédent dessin, Les Combats de Diomède, les différences témoignent du chemin parcouru. La sobriété des gestes et des expressions, la composition en frise au lieu de la ligne pyramidale en vigueur dans la peinture française d'alors, ne laissent plus percevoir aucune référence au style rococo français.
Entre Saint Roch et Bélisaire David peint le seul portrait de sa période romaine celui équestre du comte Potocki, qui tranche dans cette période, par le choix d'une palette plus vive et d'un style plus léger, qui montre par le traitement du drapé et du cheval, une autre influence sur sa peinture, celles des maîtres flamands qu'il voit à Turin et à Rome, et plus particulièrement Antoine van Dyck. L'expressivité et l'éloquence du geste qu'il fait adopter à son modèle deviennent alors la marque de fabrique du style davidien. On y perçoit aussi un élément antique, la base des deux colonnes sur le mur piranésien de pierre, allusion à la personnalité du modèle, amateur d'antiquités et surnommé le Winckelmann polonais .
Bélisaire demandant l'aumône, commencé à Rome, et qu'il termine à Paris pour le salon de 1781, marque plus encore que le Saint Roch la forte influence de la peinture de Nicolas Poussin et de la tradition du style classique, influence qui se remarque dans le traitement du paysage romain en arrière-plan du tableau, et la répartition des personnages. Il prend conscience de cette influence par l'intermédiaire de son condisciple et rival, Peyron : C'est Peyron qui m'a ouvert les yeux. La composition résolument orthogonale se caractérise par l'espace séparé en deux, délimité par les colonnades. Seul reproche que lui font les observateurs contemporains, le choix de couleurs sourdes et sombres. Mais le tableau marque une date dans l'histoire de la peinture néoclassique, c'est la première fois que le sujet par son caractère moral typique de l'exemplum virtutis, prôné par le directeur des Bâtiments du roi d'Angiviller, s'accorde parfaitement avec la manière picturale de le représenter.

Retour à Paris, période de transition

La période courte du retour à Paris qui va jusqu'au Serment des Horace, tableau qui marque son retour à Rome entre 1781 et 1784, confirme l'attachement de David au style hérité de l'antique et à la manière sombre des caravagesques. Mais elle se caractérise aussi par un sentimentalisme que l'on discerne dans la Douleur d'Andromaque, notamment par le traitement emphatique du personnage féminin et l'ordonnance du décor proche du Septime Sévère et Caracalla de 1769, qui montrent une inspiration empruntée à Jean-Baptiste Greuze. Ce sentimentalisme est tempéré par une composition géométrique d'une rigueur toute poussinienne. La découverte en 1985 d'une étude de vestale, datée de cette époque confirme cette tendance greuzienne. Le style pictural est alors complètement affirmé, dans le traitement des fonds dont les frottis, pas encore aussi apparents que dans le Marat, montrent toutefois une aisance dans la maîtrise du pinceau, ainsi que dans les modelés et le traitement des drapés.
De cette période datent aussi quatre portraits, celui d'Alphonse Leroy, ceux de ses beaux-parents les époux Pécoul, et celui de François Desmaison. Les tons plus clairs, les coloris plus vifs et harmonieux et une attention portée dans les détails naturalistes des accessoires le rendu de la lampe dans le portrait d'Alphonse Leroy par exemple, résultent de l'influence des maîtres flamands qu'il observe lors d'un court séjour dans les Flandres à la fin de 1781.

Des Horaces à Brutus, la radicalisation néoclassique

Avec le Serment des Horaces David expose son manifeste du néoclassicisme. Le style se radicalise, autant dans le traitement de l'espace géométrique délimité par les colonnes et les arches, que dans le hiératisme des poses. L'œuvre constitue une nouveauté, par son fini, la précision des lignes, le caractère froid des couleurs, la rigueur anatomique. Le tableau est en rupture avec la peinture de son temps et n'est comparable avec aucune des œuvres réalisées à l'époque41. Les règles de compositions académiques, basées sur l'unité, sont bousculées par David qui partage l'espace en deux groupes aux expressions différenciés, le groupe masculin construit sur des lignes droites opposé aux lignes courbes du groupe féminin. Cette manière de diviser le tableau sera reprise dans le Brutus et les Sabines. La facture est lisse, alors que la technique picturale du xviiie siècle français favorisait la touche en pleine pâte186. Les observateurs de l'époque, artistes et critiques contemporains, s'entendent à constater que David s'est amélioré dans le traitement des coloris, en abandonnant les tons noirs du caravagisme qui caractérisait son Andromaque. Mais ils reprochent le caractère uniforme et l'alignement des poses qui rappellent les bas-reliefs. Cette constante stylistique dans la peinture d'histoire davidienne fut souvent incomprise et considérée comme son défaut.
Avec ce tableau, le style davidien devient la norme dans la peinture néoclassique, aussi bien chez David dont les peintures d'histoire suivantes Socrate et Brutus confirment cette orientation, que chez des artistes qui lui sont contemporains, dont la jeune génération représentée principalement par ses élèves. L'œuvre caractéristique qui marque cette influence fut Marius à Minturnes de Jean-Germain Drouais, dont la pose et l'ordonnance sont empruntées aux Horaces de David.
Dans la Mort de Socrate, David, réceptif aux critiques qui avaient reproché la trop grande rigueur de construction et le dépouillement des figures, a adoucit son style, en utilisant des couleurs plus chatoyantes et une ordonnance des figures plus naturelles. Par contre le décor demeure, comme pour les Horaces, construit selon une stricte géométrie.
Les licteurs rapportent à Brutus les corps de ses fils est le dernier tableau de la série des peintures d'histoire pré-révolutionnaire. Dans cette œuvre David, conscient du reproche qu'on lui a fait de mettre systématiquement ses personnages sur un seul plan à l'imitation des bas-reliefs, décide de répartir les figures sur trois niveaux de profondeur. Au premier plan Brutus dans l'ombre, au second les femmes éplorées, et au troisième la procession des licteurs qui portent les corps des fils du consul. Il tente aussi d'insuffler du mouvement, là où ses précédents tableaux d'histoire péchaient par leur statisme191. Dernier tableau du style néoclassique romain de David, il en est aussi l'aboutissement, par la volonté du peintre d'insuffler un caractère d'authenticité archéologique, en reprenant le buste de Brutus du Capitole pour la figure du consul, et en faisant figurer la statue allégorique de Rome sur la gauche du tableau, et le mobilier de style romain.
Dans l'évolution du style de David se détache une œuvre particulière par son traitement et son sujet Les Amours de Pâris et d'Hélène. Peint entre Socrate et Brutus c'est son premier tableau sur le thème du couple mythologique il peindra aussi, Sapho et Phaon, les Adieux de Télémaque et Eucharis et l'Amour et Psyché. Il tente ici le registre galant et pour la première fois s'inspire de l'esthétique grecque, qui culminera avec les Sabines, notamment dans le choix de la nudité comme expression du beau idéal, proche en cela des idées de Winckelmann.
Le portrait d'Antoine-Laurent Lavoisier et de sa femme est le seul portrait important de cette période. David montre ici sa virtuosité à traiter les accessoires, les instruments de chimie constituent une nature morte dans le tableau. Il choisit une gamme réaliste et intimiste dans un format inhabituel plutôt dévolu à la peinture d'histoire ou au portrait de cour. Le portrait des Lavoisier est mis en scène en faisant endosser à Marie-Anne Paulze le rôle de la muse. Avec ce portrait il se rapproche du style du portrait mondain alors en vogue à l'époque, notamment avec les portraits d'Élisabeth Vigée Le Brun.

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Posté le : 29/08/2015 18:51
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Jacques-Louis David 4
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La Révolution, entre idéalisme et réalisme

Le style de David pendant la Révolution se caractérise par une manière de peindre plus libre, liée en partie à l'abandon pendant un temps, de la peinture d'histoire antique et mythologique. Il peint des sujets contemporains et des portraits intimistes. Sa carrière politique va réduire son activité artistique, il laisse plusieurs tableaux inachevés, mais il réalise à cette époque une de ses œuvres majeures la Mort de Marat.
Le Serment du jeu de paume était un projet d'envergure qui ne fut jamais achevé. Dans ce tableau l'ambition de David était d'adapter son style de peintre d'histoire à un événement qui lui était contemporain. Il s'était inspiré de l'exemple des peintres américains qui représentaient les événements de la guerre d'indépendance des États-Unis, comme John Trumbull qu'il rencontre à cette époque. Mais il ne fut pas satisfait du traitement. Le caractère trivial des costumes de ville, ne lui semblait pas adapté à la peinture d'histoire, dont l'idéal était la représentation de héros nus.
Entre 1789 et 1791, la série des portraits qu'il peint montre un nouveau style. Les personnages sont cadrés sous les genoux, et se détachent devant un fond nu et brossé, de telle manière qu'on perçoit des frottis vibrants. Ses tableaux rompent avec le sentimentalisme affecté des portraits de l'époque. Les portraits de la comtesse de Sorcy-Thélusson et de madame Trudaine inachevé, sont représentatifs de cette nouvelle manière. Tous ces portraits montrent une exécution plus rapide et plus libre, David laisse délibérément certaines parties, des détails du vêtement, les cheveux, ou le fond, moins achevés que d'autres.
Dans la Mort de Marat David mélange l'idéal et le réalisme, avec une économie de moyens qui confine au dépouillement. Il choisit la simplicité du motif en donnant une image épurée débarrassée de tout accessoire. Il fait une entorse à son réalisme en idéalisant Marat, sans les stigmates de la maladie de peau qui l'affectait en réalité. En s'inspirant de la Mise au tombeau du Caravage, il fait à nouveau référence au caravagisme. L'œuvre emprunte à l'art religieux de la Renaissance italienne. Hormis Caravage, la posture de Marat rappelle la pietà de Baccio Bandinelli que David a pu voir à la basilique Santissima Annunziata de Florence, et aussi à un modèle antique, un bas-relief dit le lit de Polyclète.
Le tableau est redécouvert par Baudelaire en 1846 lors de l'exposition du Bazar Bonne-Nouvelle. En plein essor du mouvement réaliste il écrit :
Tous ces détails sont historiques et réels comme un roman de Balzac; le drame est là vivant dans toute sa lamentable horreur, et par un tour de force étrange qui fait de cette peinture le chef-d'œuvre de David et une grande curiosité de l'art moderne, elle n'a rien de trivial ni d'ignoble.
Pour Charles Saunier c'est l'indispensable précurseur de ce courant artistique. Mais Verbraeken pointe l'ambigüité du terme appliqué à ce tableau qui est antérieur à ce mouvement, car pouvant autant signifier le traitement et le rendu pictural, que la représentation de la réalité. En tant que peintre de propagande l'intention de David était d'abord d'exalter un modèle de vertu républicaine, en faisant du Marat un exemplum virtutis moderne. D'où le rôle des inscriptions que l'on perçoit sur la toile, qu'il s'agisse des lettres ou de la dédicace de David sur le billot de bois, pour appuyer le message du tableau. Il fera usage de ce procédé rhétorique dans plusieurs toiles dont Les Derniers Moments de Michel Lepeletier disparu ou détruit, qui constituait le pendant du Marat.

Des Sabines à Léonidas: vers le grec pur

Les Sabines inaugure l'orientation esthétique de David vers le grec pur. Sous l'influence des illustrations de l'Iliade et l'Odyssée par John Flaxman il trace ses figures de manière plus linéaires, plus idéalisées. Il abandonne le caractère martial et les musculatures apparentes qui caractérisaient son style romain, pour des figures lisses. Il répartit aussi la lumière de manière égale, et opte pour une gamme de couleurs claires, alors que ses précédentes peintures d'histoire étaient marquées par le clair-obscur. Le paradoxe veut que David, qui cherche par ce tableau à retourner aux sources de l'art grec, choisisse un sujet de l'histoire romaine206. Par contre comme dans les Horaces David revient à une composition où les personnages principaux sont sur le même plan.
Mais surtout il peint ses personnages principaux nus. Cette nouvelle façon de représenter ses figures fut expliquée par David dans une notice qui accompagnait l'exposition du tableau : De la nudité de mes héros. Dans sa biographie sur David, Delécluze expose le programme de son maître : J'ai entrepris de faire une chose toute nouvelle ... je veux ramener l'art aux principes que l'on suivait chez les Grecs. En faisant les Horaces et le Brutus j'étais encore sous l'influence romaine. Mais, messieurs, sans les Grecs, les Romains n'eussent été que des barbares en fait d'art. C'est donc à la source qu il faut remonter, et c'est ce que je tente de faire en ce moment. David reprend à son compte les conceptions de Winckelman sur le beau idéal, influencé aussi par certaines œuvres de ses élèves dont le Sommeil d'Endymion de Girodet. Cette nouvelle approche esthétique était déjà sous-jacente dans une de ses dernières œuvres de sa période révolutionnaire la Mort du jeune Bara qui présentait une figure d'éphèbe androgyne inspirée de l'hermaphrodite Borghèse208. Ces nus choquèrent le public lors de l'exposition du tableau et firent scandale. En 1808 pour la deuxième exposition de l'œuvre, afin de calmer les pudeurs, David masqua le sexe de Tatius par un repeint, en déplaçant le fourreau de son glaive209.
Cette orientation vers le beau idéal et le nu grec, fut critiquée par les élèves les plus radicaux de David. Ceux-ci regroupé en secte des Barbus, reprochèrent au maître de ne pas avoir été assez loin dans l'archaïsme et le primitivisme esthétique. C'est en tenant compte de certaines des objections de ce groupe, que David peignit un tableau dont la facture et le sujet ambitionnaient d'être encore plus grec que les Sabines, Léonidas aux Thermopyles210. Mais pour Nanteuil le style pâtit d'une exécution en deux temps, commencé en 1799, il ne fut achevé qu'en 1814, ce qui se ressent dans la composition, l'ordonnance et les mouvements des personnages.
L'influence de l'antiquité grecque se fit sentir aussi sur trois portraits qu'il peint entre 1799 et 1803. Le Portrait de madame de Verninac qui représente le modèle habillé à l'antique dans un décor dépouillé et une pose hiératique, donnant à Henriette de Verninac l'apparence de la déesse Junon. Le style est plus froid, plus précis. Dans sa technique David se fait moins libre, il abandonne les frottis caractéristiques de ses portraits révolutionnaires. Il réitère cette formule dans le portrait de Madame Récamier qu'il abandonne dans un état inachevé, dont il traduit ce que Nanteuil désigne comme l'esprit de simplicité qui l'attirait vers l'art grec. Avec Bonaparte franchissant le Grand-Saint-Bernard, David adapte le style héroïque de ses peintures d'histoire à un portrait équestre. En dehors des accessoires et des effets du costume, tous véridiques, toute la toile idéalise Napoléon Bonaparte dans la ligne stylistique du beau idéal, au point d'en sacrifier la ressemblance213. Pour Philippe Bordes, l'esthétique sculpturale de David n'a peut-être jamais été plus explicite que dans ce tableau.

Le Sacre et l'apogée du style Empire

Avec Le Sacre de Napoléon conçu comme une grande galerie de portraits, David contribue à la vogue du style Empire. Ce style à l'origine décoratif et architectural, désigne en peinture principalement les œuvres officielles réalisées pour le régime napoléonien, dont David est, avec François Gérard, Antoine-Jean Gros et Robert Lefèvre, un des principaux représentants. La production de David dans le style Empire est représentée par deux grandes toiles de cérémonies Le Sacre, et la Distribution des aigles; et plusieurs portraits d'apparat dont le portrait du pape Pie VII, celui de l'Empereur en costume de Sacre; de dignitaires et épouses, dont les portraits d'Estève, de la comtesse Daru, de Français de Nantes que Klaus Holma considère comme exemplaire de ce style, ainsi que le dernier portrait que David peint de l'empereur, Napoléon dans son cabinet de travail.
Chez David ce style se traduit par une facture sèche, raide dans le dessin, et des tons froids empruntés à Véronèse et Rubens. Le Sacre est d'ailleurs une référence directe au Couronnement de Marie de Médicis du peintre flamand. David s'éloigne de ses peintures néoclassiques et s'inspire des grands tableaux de cour comme ceux de Rubens, mais peut être aussi de Raphaël et son Couronnement de Charlemagne du Vatican. Contrairement à son habitude de distinguer les groupes séparément dans ses peintures d'histoire les Horaces, le Brutus, les Sabines, l'œuvre est caractérisée par une composition unifiée. Dans le hiératisme des poses qui évitent toute théâtralité, la lumière qui relie les différents groupes tout en concentrant le regard vers les protagonistes principaux, et des couleurs froides et discrètes, David donne à la scène un caractère équilibré et harmonieux.
Le caractère harmonieux qui avait fait le succès du Sacre fait défaut dans la Distribution des aigles de facture plus faible. La composition est déséquilibrée, notamment à cause de la suppression de la victoire ailée, ce qui crée un vide dans la toile, et à l'effacement de la figure de Joséphine de Beauharnais, lié aux circonstances du divorce de Napoléon. Le caractère théâtral et grandiloquent des attitudes des soldats et des maréchaux trahissent des maladresses dans le traitement des attitudes qui sont figées et sans aplomb. David n'arrivait pas à restituer l'animation des mouvements, à la différence de son ancien élève Gros. Tous ces éléments affaiblissent la composition dont l'aspect général paraît confus.

Le peintre de Napoléon

Avec Bonaparte, David trouva définitivement son grand homme, auquel il devait, jusqu'à sa mort, comme beaucoup d'autres Jacobins, vouer une fidèle admiration. Il n'entra vraiment en contact avec le général que vers 1797, souhaitant faire son portrait ébauché et resté inachevé, Louvre), sortant enthousiasmé de leur première rencontre et disant à ses élèves le mot est rapporté par Delécluze : Quelle belle tête il a ! C'est pur, c'est grand, c'est beau comme l'antique ! ... C'est un homme auquel on aurait élevé des autels dans l'antiquité .... Bonaparte est mon héros. Cet engouement ne devait pas toujours être payé de retour. Le consul, puis l'Empereur firent certes de David une sorte de conseiller officieux en matière artistique – il fut nommé premier peintre en 1804 –, mais son rôle fut relativement mineur : il donna quelques dessins de costumes et des modèles de mobilier il avait déjà, bien auparavant, fait exécuter par Georges Jacob, pour son usage personnel, les meubles du Brutus), mais, en matière d'art décoratif, il se heurtait à la faveur de Charles Percier et de Pierre François Léonard Fontaine.
Quant à la peinture, il rencontra sur son chemin, outre l'active ambition de Vivant-Denon et l'hostilité latente de ses collègues de l'Institut, toujours jaloux de ses succès et de ses élèves, l'inertie de l'administration, peu désireuse de lui accorder les prérogatives qu'il demandait, et qui auraient fait de lui une sorte de Le Brun. Ses fonctions furent en réalité purement honorifiques et cela n'empêcha pas de graves et permanents conflits, tant pour les commandes que pour les paiements, jugés excessifs, que l'artiste exigeait. Ses relations avec la bureaucratie impériale furent infiniment plus tendues que ne l'avaient été, sous Louis XVI, ses rapports avec la direction des bâtiments, et il est très loin d'avoir été le dictateur des arts que l'on imagine. C'est ainsi que, dans son atelier, se manifestaient les courants les plus divers, celui des primitifs, partisans d'un retour à une pureté archaïque de la ligne, regroupés autour de Maurice Quaï, ou celui des troubadours » avec Pierre Révoil ou Fleury Richard. Venus de toute l'Europe, ses élèves, au total plusieurs centaines, trouvèrent en David un pédagogue libéral aux qualités unanimement reconnues, soucieux de leur individualité, ses disciples les plus doués poursuivant dans des voies souvent très différentes de la sienne, mais en lui restant tous très attachés : rares sont ceux qui, comme Ingres, se détachèrent du maître. Celui-ci se consacra presque uniquement, pendant toute cette période, à des œuvres en rapport avec l'épopée impériale : portraits de Bonaparte au Grand-Saint-Bernard cinq versions ; original : 1800, Malmaison, portraits de Pie VII trois versions ; original : 1805, Louvre, portraits de Napoléon en costume impérial plusieurs versions, 1805-1807, Napoléon dans son cabinet de travail deux versions ; original : 1812, National Gallery, Washington ; et surtout les scènes du sacre de l'Empereur : quatre étaient prévues, deux seulement furent exécutées, Le Sacre proprement dit 1805-1807, Louvre et La Distribution des aigles 1810, Musée national du château de Versailles. David, dans toutes ces œuvres, sut allier le réalisme dans la description des décors et des costumes à l'idéalisation de la composition et du caractère, insistant tantôt sur un aspect, tantôt sur un autre. Le général conquérant, « calme sur un cheval fougueux– ce qui a peu à voir avec la réalité historique de Bonaparte franchissant les Alpes à dos de mulet –, s'intègre naturellement à la tradition picturale et sculpturale de la grande figure équestre. L'Empereur dans son cabinet des Tuileries est représenté après une nuit de travail, alors qu'il s'apprête à passer ses troupes en revue : c'est ici le souverain soucieux du bonheur de son peuple qui est mis en valeur grâce à de multiples détails, comme le bureau surchargé de papiers, les chandelles de la lampe ou les aiguilles de la pendule. Le Sacre, qui rivalise sciemment avec les compositions de Rubens, est une galerie de portraits, particulièrement soignés, que David a su unifier par la composition et le traitement, performance qui obtint un succès considérable auprès de l'Empereur comme du public du Salon de 1808. La Distribution des aigles, qui reprend la thématique du serment, exalte également le régime, mais par des moyens formels plus apparents. David, tout à ces grandes compositions, peignit peu d'autres œuvres durant l'Empire : quelques portraits, notamment ceux de sa famille, un tableau sur un sujet antique mais d'inspiration aimable, dans la veine du Pâris et Hélène exposé au Salon de 1789, Sapho, Phaon et l'Amour 1809, musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg, qui préfigure par le thème et la facture le coloris en est très recherché les peintures de la fin de sa vie et enfin Léonidas aux Thermopyles, commencé en 1800, abandonné ensuite, repris vraisemblablement en 1811, pour être terminé en 1814 Louvre. Le sujet visait selon le peintre à caractériser ce sentiment profond, grand et religieux qu'inspire l'amour de la patrie. La composition, savamment équilibrée, poursuit la veine historique héroïque traditionnelle de David. Mais l'Empereur fut surpris du thème, une histoire de vaincus, dimension encore accentuée par les circonstances où se trouvait la France au moment de l'achèvement du tableau.

La période de Bruxelles

David, régicide et signataire de l'Acte additionnel aux Constitutions de l'Empire, fut forcé à l'exil après Waterloo. Interdit de séjour à Rome, il s'établit à Bruxelles, ayant confié son atelier à Gros. Il devait y passer ses dix dernières années, continuant assidûment à travailler, participant de loin à une vie artistique parisienne dans laquelle sa place devint en réalité de plus en plus marginale. La période bruxelloise de David a toujours été sévèrement jugée, mais sans aucun doute plus pour les tableaux d'histoire que pour les portraits, souvent d'une exceptionnelle qualité (Le Comte de Turenne, 1816, Ny Carlsberg Glypthotek, Copenhague ; Sieyès, 1817, Fogg Art Museum, Cambridge, Mass. ; La Comtesse Villain XIIII et sa fille, 1816, National Gallery, Londres ; Juliette de Villeneuve, 1824, Louvre. David, sciemment, donne une nouvelle orientation à sa peinture d'histoire : coloris nettement plus affirmé, parfois criard, rehauts plus apparents, cadrage dans certains cas beaucoup plus resserré, traitement plus réaliste, synthèse des influences flamande et caravagesque. Il passe surtout à des sujets nettement différents de ceux qu'il avait traités jusque-là, abandonnant l'héroïsme de l'Antiquité pour des sujets plus littéraires La Colère d'Achille, 1819, Kimbell Art Museum, Fort Worth, légers Apelle peignant Campaspe devant Alexandre, commencé en 1813, inachevé, musée des Beaux-Arts, Lille, voire galants Télémaque et Eucharis, 1818, The Paul Getty Museum, Malibu. Sa dernière œuvre, significativement, représente Mars désarmé par Vénus et les Grâces(1824, Musées royaux des beaux-arts, Bruxelles. Lors de son exposition payante à Paris, ce tableau fut très favorablement reçu ; mais la peinture française, à cette date, suivait d'autres voies : Mars désarmé par Venus et les Grâces vient cinq ans après Le Radeau de la Méduse et est contemporain des Massacres de Scio. Géricault et Delacroix, imprégnés pourtant de la tradition classique dont David était issu, et qui de surcroît l'admiraient Delacroix parlait de sa « sublime brosse, se détournaient de la mythologie pour trouver leur inspiration dans les événements les plus contemporains, tentaient des essais de couleur et de touche à l'encontre des idées qu'il avait toujours défendues. Mais David était en dehors de la lutte entre classiques et romantiques, qui prenait son ampleur justement au moment où il disparaissait. Ses élèves eurent beau se réunir chaque année en son honneur, il appartenait désormais au passé. Le flambeau avait été repris par d'autres, Gros d'abord, Ingres ensuite, qui allait incarner, pour longtemps, les principes du beau idéal.

Néoclassicisme de David peinture néoclassique.

En 1780, l'apparition de David sur la scène du néoclassicisme est tardive, alors qu'à la suite de l'ouvrage de Winckelmann Réflexion sur l’imitation des grecs, les peintres avaient déjà amorcé ce retour vers le modèle antique depuis les années 1760. Son maître Vien, comme Pompeo Batoni, est considéré comme un artiste de transition entre le rococo et le néoclassicisme, Mengs et Gavin Hamilton étant les premiers artistes représentatifs de ce style. Selon Michael Levey, la nouveauté de David est d'avoir combiné une inspiration à la fois esthétique et morale dans son néoclassicisme, d’avoir voulu mêler la raison et la passion, plutôt que la nature et l’Antiquité.

Attributions contestées

Malgré plusieurs listes des œuvres de Jacques-Louis David, établies par l'artiste lui-même, qui donnaient un aperçu assez complet de sa production, à la mort du peintre, apparaît un nombre important de nouvelles toiles qui lui sont attribuées par erreur. Ce qui a amené quelques historiens d’art à analyser son style artistique sur la base de fausses attributions. Jean-Jacques Lévêque souligne que le succès de David et sa cote élevée a longtemps permis d'écouler des œuvres mineures en profitant de la confusion du style ou du nom au xviiie siècle le patronyme David était partagé par plusieurs artistes ; dans d’autres cas, l’absence de signature, mais la notoriété du modèle, amènent à faire des attributions erronées, comme pour le portrait de Barère à la tribune exposé comme un David à l'exposition Les Portraits du siècle 1883, aujourd’hui restitué à Laneuville Kunsthalle, Brême ou celui de Saint-Justn 5 ou celui du flûtiste François Devienne Musées royaux des beaux-arts de Belgique, considéré encore comme un authentique David dans les années trente.
En 1883, Jacques-Louis Jules David, le petit-fils du peintre et auteur d'une importante monographie Le peintre David, souvenirs et documents inédits, remarqua lors de l’exposition Les Portraits du siècle que sur les dix-neuf toiles présentées comme autographes, seules quatre pouvaient être considérées sans conteste de la main de David, et signale qu’aucun des six autoportraits exposés n’est authentique.
Il arrive que l’erreur soit propagée par des experts qui se sont laissé abuser, ce qui fut le cas pour le portrait du conventionnel Milhaud dont l'attribution était soutenue par la présence d'une dédicace Au conventionnel Milhaud, son collègue, David-1793 qui s'est avérée être fausse : en 1945 Gaston Brière révéla à partir d'une réplique en miniature qu’il avait été peint par Jean-François Garneray, un de ses élèves. Dans d’autres cas, la controverse s’est réglée au tribunal : le jugement concernant l’attribution du Marat assassiné du château de Versailles, réplique non signée, que des experts et artistes renommés soutenaient être authentique, fut prononcé en première instance contre la plaignante, veuve de Jacques-Louis Jules David, qui possédait pourtant l’original.
Les expositions rétrospectives ont permis de faire le point sur l’état des collections. Celle de 1948 David, exposition en l'honneur du deuxième centenaire de sa naissance, a exclu des œuvres de David le Conventionnel Gérard et sa famille et le portrait du flûtiste Devienne ; en 1989, lors de l’exposition David 1748-1825, Antoine Schnapper écarte l’attribution pour un portrait de Quatremère de Quincy et pour les Trois dames de Gand musée du Louvre dont, comme pour le conventionnel Milhaud, la signature était falsifiée, et émet des doutes concernant le portrait dit le Geôlier du musée de Rouen.

Technique artistique de David

À la dissolution de l'Académie royale de peinture et de sculpture, les enseignements des maîtres anciens sont perdus, selon Eugène Delacroix. David était le dernier détenteur des traditions picturales du passé.
La technique de David est visible à travers les ébauches inachevées qu'il a laissées, qui permettent d'observer sa manière de peindre et d'en connaître les processus de réalisation. Quelques toiles, comme le Portrait inachevé de Bonaparte, laissent apparaître l'enduit préparé à la céruse de ton clair, sur lequel il peint ; il peignait aussi sur des fonds à base de colle. J. P. Thénot, dans son ouvrage Les Règles de la peinture à l'huile 1847, donne les couleurs qui forment la palette du peintre :
Palette de David, ordre des couleurs à partir du pouce, blanc de plomb, jaune de Naples, ocre jaune, ocre de ru, ocre d'Italie, brun rouge, terre de Sienne brûlée, laque carminée fine, terre de Cassel, noir d'ivoire, noir de pêche ou de vigne. Indistinctement bleu de Prusse, outremer bleu, bleu minéral, puis il plaçait en dessous de ces couleurs le cinabre et le vermillon. Vers la fin de sa carrière il ajouta à sa palette le jaune de chrome et le chrome rouge pour peindre les draperies seulement.
Dans la composition de ses toiles, il abandonne la structure en pyramide alors en vogue au xviiie siècle, pour préférer des compositions en frise inspirées des bas-reliefs antiques, ce qui lui est reproché par Jean-Baptiste Pierre : Mais où avez-vous vu qu'on pût faire une composition sans employer la ligne pyramidale ? Il généralise cette construction à partir du Serment des Horaces en s'appuyant sur des constructions symétriques et parallèles. Charles Bouleau indique que David utilisait un schéma orthogonal basé sur le rabattement des petits côtés du rectangle ; Louis Hautecœur, observe que l'armature du Sacre fut divisée en moyenne et extrême raison. Aucun tableau ni croquis de David ne montre de tracé régulateur qui permette de vérifier sa manière de composer. Ce tracé fut déduit par Charles Bouleau à partir d'un dessin de Girodet pour Hippocrate refusant les présents d'Artaxercès, qui montre un rare exemple de cette technique de composition dans une œuvre néoclassique.
Minutieux, voire laborieux dans son travail pictural, David refait plusieurs fois un motif qui ne le satisfait pas. Dans le Serment des Horaces, il repeint vingt fois le pied gauche d'Horace.

Å’uvres principales Å’uvre de Jacques-Louis David.

Envois aux salons Salon de 1781

Bélisaire demandant l'aumône 1781, huile sur toile, 288 × 312 cm, palais des beaux-arts de Lille.
Portrait du comte Stanislas Potocki 1780, Muzeum Narodowe à Varsovie
Saint Roch intercédant la Vierge achevé en 1780, au musée des beaux-arts de Marseille
Les Funérailles de Patrocle 1778 National Gallery of Ireland, Dublin

Salon de 1783

La Douleur d'Andromaque (1783), musée du Louvre, Paris.
Jacques-François Desmaisons (1782), Albright-Knox Art Gallery, Buffalo, portrait d'un de ses oncles
Portrait du médecin Alphonse Leroy (1783), musée Fabre, Montpellier
Frise dans le genre antique dessin.

Salon de 1785

Le Serment des Horaces 1784, musée du Louvre, Paris.
Portrait de Charles-Pierre Pécoul 1784, musée du Louvre à Paris

Salon de 1787

La Mort de Socrate 1787, Metropolitan Museum of Art, New York.

Salon de 1789

Les Amours de Pâris et d’Hélène 1788, musée du Louvre, Paris.
Les licteurs rapportent à Brutus les corps de ses fils 1789, musée du Louvre, Paris.

Salon de 1791

Dessin préparatoire pour Le Serment du jeu de paume 1791 château de Versailles.
Portrait de la comtesse de Sorcy-Thélusson 1790, Neue Pinakothek, Munich.

Salon de 1795

Portrait d'Émilie Sériziat et son fils 1795, musée du Louvre à Paris
Portrait de Pierre Sériziat 1795, musée du Louvre à Paris

Salon de 1808

Le Sacre de Napoléon (1805-1807), musée du Louvre à Paris
Portrait de Napoléon en costume impérial, esquisse (1808), Cassel.

Salon de 1810

La Distribution des Aigles 1810, musée national du Château de Versailles, Versailles
Expositions personnelles Salle des séances de la Convention 1793
Les Derniers moments de Michel Lepeletier 1793 disparu, probablement détruit. Est connu par une gravure et un dessin.
La Mort de Marat 1793, musées royaux des beaux-arts de Belgique, Bruxelles

Expositions payantes du Louvre 1800-1801

Les Sabines 1799, musée du Louvre, Paris.
Bonaparte franchissant le Grand-Saint-Bernard 1800-1803, 5 versions Château de Malmaison, musée national du Château de Versailles, château de Charlottenburg à Berlin, musée du Belvédère à Vienne

Exposition à l'atelier de David 1814

Léonidas aux Thermopyles 1814, musée du Louvre, Paris.
Exposition payante de la rue de Richelieu 1824
Mars désarmé par Vénus et les grâces 1824, musée royal d'art ancien à Bruxelles.

Principaux portraits

Portrait d'Antoine-Laurent Lavoisier et de sa femme 1788, Metropolitan Museum of Art, New York
Portrait de la marquise d'Orvilliers 1790, musée du Louvre à Paris
Autoportrait (1794), musée du Louvre Paris
Portrait de Jacobus Blauw 1795, National Gallery, Londres
Portrait de madame de Verninac 1799, musée du Louvre à Paris
Portrait du pape Pie VII 1805, musée du Louvre à Paris
Portrait du comte Antoine Français de Nantes 1811. Paris, Musée Jacquemart-André
Napoléon dans son cabinet de travail 1812, 2 versions National Gallery of Art, Washington, musée National du Château de Versailles, Versailles
Portrait de Sieyès 1817 Fogg Art Museum, Cambridge, Massachusetts
Charlotte et Zénaide Bonaparte 1821, J. Paul Getty Museum, Los Angeles

Tableaux inachevés

Le Serment du jeu de paume 1791, château de Versailles.
Portrait de Madame Marie-Louise Trudaine 1791-1792 musée du Louvre.
La Mort du jeune Bara 1794, Avignon, musée Calvet.
Portrait inachevé de Bonaparte 1798, Paris musée du Louvre.
Portrait de madame Récamier 1800, musée du Louvre.

Expositions rétrospectives

1883 et 1885 Les Portraits du siècle, Paris, École des beaux-arts
1913 David et ses élèves, Paris, palais des beaux-arts
1936 Gros ses amis et ses élèves, Paris, Petit Palais
1948 David, exposition en l'honneur du deuxième centenaire de sa naissance, Orangerie du château de Versailles
1974-1975 De David à Delacroix, Metropolitan Museum of Art, New York ; Grand Palais, Paris
1989 Jacques-Louis David 1748-1825, musée du Louvre et musée national du château de Versailles
2004 Le Sacre de Napoléon peint par David, musée du Louvre
2005 David, Empire to exile, Institut d'art de Chicago
2005 Jacques-Louis David 1748-1825, musée Jacquemart-André, Paris

L'École de David Liste des élèves de Jacques-Louis David.

L'influence de David s'évalue par le nombre d'élèves qu'il reçut dans son atelier : de 1780 à 1821, sont sortis entre 280 et 470 élèves, voire plus selon Verbraeken, sans préciser le nombre. Il observe que la liste la plus longue publié par J. L. J. David omet des élèves inscrits dans le registre de l'école des beaux-arts, dont l'appartenance à l'école de David est précisée.
L'école est fondée en 1780 à son retour de Rome ; les premiers élèves furent entre autres Jean-Baptiste Wicar, Jean-Germain Drouais, Girodet-Trioson. L'expression École de David est utilisée au début du xixe siècle et qualifie à la fois son atelier et l'influence sur la peinture de son temps. Qualifié de dogmatique, David favorisa cependant l'expression de talents originaux et éloignés de sa peinture, dont les exemples les plus caractéristiques furent ceux du paysagiste François-Marius Granet et d'Antoine-Jean Gros, dont le style annonce le romantisme de Géricault et de Delacroix, et s'éloigne, par la peinture et les sujets, de la manière classique de son maître. Loin d'être opposé, il lui reste fidèle et reprendra l'atelier de David lors de son exil.
D'autres élèves ont adopté une attitude de dissidence envers l'enseignement de David. En voulant aller plus loin que leur maître, le groupe des Barbus voulait radicaliser le néoclassicisme en l'orientant vers une Antiquité plus primitive, inspiré du style grec le plus archaïque. David s'opposa aussi à Girodet et à Ingres dont il ne comprenait pas les orientations esthétiques ; après avoir vu le tableau de Girodet L'Apothéose des héros français morts pour la patrie, il réagit en ces termes :
Ah ça ! il est fou, Girodet !... Il est fou, ou je n'entends plus rien à l'art de la peinture. Ce sont des personnages de cristal qu'il nous a fait là... Quel dommage ! Avec son beau talent, cet homme ne fera jamais que des folies... Il n'a pas le sens commun.
Concernant Ingres, son Jupiter et Thétis tient au délire. Il ajoute : je ne sais plus peindre .... J'ai été le maître de Ingres, c'est à lui de m'enseigner. .
Plusieurs élèves de David furent ses assistants. Drouais aida son maître dans la réalisation du Serment des Horaces, Jean-Baptiste Isabey travailla sur Les Amours de Pâris et d’Hélène, François Gérard sur les Derniers moments de Michel Lepeletier, trois élèves ont collaboré sur les Sabines , Jean-Pierre Franque, Jérôme-Martin Langlois et occasionnellement Ingres, qui travaille aussi sur le portrait de Madame Récamier. Georges Rouget est considéré comme l'assistant préféré de David, il travailla sur deux des répliques du Bonaparte au Grand-Saint-Bernard, Le Sacre de Napoléon, où il est représenté aux côtés de son maître, Léonidas aux Thermopyles et la répétition du Sacre.

Historiographie et études

Détail de la tombe de Jacques-Louis David au cimetière de Bruxelles à Evere, sur l'obélisque on y lit l'inscription : A Jacques-Louis David restaurateur de l'école moderne de peinture de France .
La première biographie sur le peintre fut rédigée de son vivant par Chaussard dans le Pausanias français. Elle s'arrêtait en 1806, avant l'exposition du Sacre. En 1824, un auteur anonyme fait paraître une Notice sur la vie et les ouvrages de David. Mais c'est en 1826, un an après sa mort, que la première biographie complète du peintre paraît : Vie de David, publiée anonymement sous les initiales A. Th., tente alors de dédouaner l'artiste de son rôle sous la révolution. L'identité de l'auteur est disputée ; la police royaliste pensait que c'était Adolphe Thiers qui avait écrit une critique sur le peintre en 1822, mais actuellement cette attribution est généralement écartée. Les anciennes bibliographies l'attribuent à un Thomé, neveu du conventionnel Thibaudeau, prénommé par erreur Antoine, c'est en fait Aimé Thomé qui à l'occasion de son mariage ajouta de Gamond à son patronyme. Lui-même affirmait en être l'auteur et aurait perçu des droits d'auteur. Cependant, pour Antoine Schnapper, l'attribution est contestable du fait qu'il donne des détails précis sur la période révolutionnaire du peintre,ce qui fait pencher pour une attribution de l'ouvrage à Antoine Claire Thibaudeau, ancien conventionnel régicide et ami de David, et comme lui en exil à Bruxelles. Cette attribution avait déja été suggérée par A. Mahul dans sa notice nécrologique et Delafontaine. Wildenstein précise que Thibaudeau reprend l'essentiel des informations du livre anonyme Notice sur la vie eles ouvrages de David de 1824. D'autres sources l'attribuent à son fils Adolphe Thibaudeau, journaliste et important collectionneur de dessins. Plusieurs biographies qui paraissent à la suite de celle-ci, de A. C. Coupin à Miette de Villars, adoptent le même point de vue.
En 1855, Étienne-Jean Delécluze se veut plus objectif sur le rôle de son ancien maître durant cette période ; il fut élève de David et s'appuya sur ses souvenirs et des témoignages de première main pour rédiger sa biographie Louis David son école et son temps. Malgré son ancienneté et certaines imprécisions, cet ouvrage est encore considéré comme une référence. Lors des expositions rétrospectives, l'intérêt pour l'œuvre du peintre est ravivé ; plusieurs historiens font paraître, dans la Gazette des beaux-arts ou la Revue de l'art français ancien et moderne, des études détaillées sur David. Au début du XXe siècle, des essayistes abordent l'œuvre de David selon les courants politiques du temps, comme Agnès Humbert, qui fait paraître en 1936 Louis David, peintre et conventionnel: essai de critique marxiste. À partir de 1948, le bicentenaire de la naissance du peintre, et après la grande exposition rétrospective de l'Orangerie, le renouveau des études davidiennes voit émerger des approches plus objectives et moins passionnées. D. Dowd publie une étude approfondie sur le rôle de David sous la révolution Pageant-master of the Republic: Jacques-Louis David and the French Revolution, Louis Hautecœur écrit en 1954, un siècle après Delécluze, Louis David la première monographie moderne sur le peintre, Alvar Gonzales Pallacios dans son David et la peinture napoléonienne s'intéresse à l'art du peintre sous le Premier Empire. Après la grande biographie d'Antoine Schnapper en 1980 David témoin de son temps, l'exposition de 1989 est l'occasion d'aborder de nouvelles thématiques sur l'art de David dans le cadre du colloque David contre David, où l'artiste est analysé sous plusieurs aspects par plusieurs historiens d'art.



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Posté le : 29/08/2015 18:48
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Re: L'atelier de Mafalda
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Je fais aussi de la photo...

Posté le : 20/08/2015 03:46
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Re: L'atelier de Mafalda
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Une photo d' un arbre, que j' ai trouvé féerique.

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Posté le : 20/08/2015 03:43
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Jean-Emile Laboureur
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Le 16 août 1877 naît Jean-Émile Laboureur

à Nantes, mort à 65 ans à Kerfalher près de Pénestin, dans le Morbihan, le 16 juin 1943, est un peintre, dessinateur, graveur, aquafortiste, lithographe et illustrateur français, formé à l'académie Julian, il apour maître Auguste Lepère et pour élèves Marie Laurencin, André Dunoyer de Segonzac
Influencé par Paul Gauguin, Henri de Toulouse-Lautrec, cubisme, il a lui-même influencé John Buckland Wright
Il a trouvé son expression la plus originale, influencée par la stylisation cubiste, dans l'emploi du burin (Petites Images de la guerre, 1916 ; le Balcon sur la mer, 1923. Il a illustré Larbaud, Colette, Maurois, P. J. Toulet et surtout Giraudoux.
Auteur de nombreuses gravures au burin, en planches individuelles ou pour des livres, il a illustré près de quatre-vingts livres, souvent d'auteurs contemporains comme André Maurois, Jean Giraudoux, Colette, André Gide, Paul-Jean Toulet, Maurice Maeterlinck ou François Mauriac.
Peintre de tableaux de genre, de paysages animés ou non, de natures mortes, il a réalisé aussi quelques fresques et des sculptures. Ses œuvres sont conservées dans plusieurs musées nationaux et provinciaux.
Il a fondé ou présidé des associations d'artistes indépendants.


Sa vie

Émile Laboureur est issu d'une famille de la bourgeoisie locale de Nantes. Il est cousin du peintre Jules Grandjouan. Il part étudier à Paris en 1895. Il s'inscrit en faculté de droit, selon la volonté de son père, mais ne s'y plait pas et s'inscrit en lettres.
Laboureur fréquente plutôt l'Académie Julian. Il est initié à la gravure par Auguste Lepère, et débute au Salon de 1896. Ses premières œuvres sont des gravures sur bois d'un type primitif, à la manière de Paul Gauguin5. Il rencontre des artistes comme Guillaume Apollinaire, Marie Laurencin ou Henri de Toulouse-Lautrec, lequel influence son art.
Laboureur part voyager en Europe et en Amérique du Nord. Il va d'abord en Allemagne où il visite les musées, puis aux États-Unis en 1904, où il adopte le prénom de Jean-Émile, puis de nouveau en Amérique du Nord où il séjourne et expose à plusieurs reprises de 1905 à 1909, aux États-Unis et au Canada. Il va aussi en Grande-Bretagne, en Italie, en Grèce et en Turquie en 1911.
Il expose à Paris à partir de 1911 et s'y fixe en 1912. Il utilise alors moins le bois gravé et préfère l'eau-forte. Son dessin se rapproche du cubisme vers 1912-1913. Son rôle est jugé considérable dans le grand mouvement de l'art moderne. Mobilisé en 1914, il continue cependant à créer, il compose trois suites de gravures sur le thème de la guerre, et s'inspire de son vécu pour d'autres œuvres ultérieures.
Laboureur expérimente la technique du burin pour l'illustration de L'Appartement des jeunes filles de Roger Allard en 1919. C'est le premier d'une longue série de soixante-six livres illustrés. Il collabore aussi à des revues comme la Gazette du Bon Ton, La Revue musicale. Dans son atelier parisien, Laboureur enseigne l'art de la gravure à des élèves comme Marie Laurencin et André Dunoyer de Segonzac.
Il illustre Suzanne et le Pacifique, de Jean Giraudoux, et des livres de Valery Larbaud, Colette, André Gide, Maeterlinck, Mauriac. En 1930, il compose de nombreuses gravures pour Les Contrerimes de Paul-Jean Toulet.
Selon Anne Lombardini, il atteint alors le sommet de son art. Pendant l'entre-deux-guerres, en moins de vingt ans, il aura illustré près de soixante-dix livres, sans compter les frontispices. Il continue par ailleurs de créer des planches individuelles et organise plusieurs expositions.
Il travaille essentiellement à Paris, mais passe chaque année plusieurs mois en Bretagne où il a acheté une maison. Il y dessine un paysage breton pour un timbre gravé par Jean Antonin Delzers et émis en 1935 pour une valeur faciale de 2 francs.
Jean-Émile Laboureur fonde en 1923 le groupe des Peintres-graveurs indépendants, et préside en 1929 le Comité de l'art français indépendant, créé par le peintre Victor Dupont. Membre de plusieurs sections de l'Exposition universelle de 1937, il contribue en 1938 à créer le Comité national de la gravure française.
En plus des livres illustrés et des gravures, il élabore plusieurs fresques, notamment à la Maison du travail en 1937 et travaille pour l'École nationale de la marine marchande de Paimpol avec Jean Frélaut et Pierre Dubreuil.
De 1928 à 1937, Laboureur écrit plusieurs ouvrages et articles sur la gravure et l'approche qu'il en a. Il établit aussi le catalogue de l'œuvre gravée de Marie Laurencin.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, il se retire, malade, dans sa maison de Pénestin où il meurt en 19432. Une rue de Nantes porte son nom.

Å’uvres

1728 gravures, dont 74 séries de gravures ou dessins pour livres illustrés.

Ouvrages illustrés

Jean Giraudoux, Promenade avec Gabrielle, NRF, 1919
Évariste Parny, Chansons madécasses, trente bois, NRF, 1920
Jacques Cazotte, Le Diable amoureux, Bloch, 1921
André Maurois, Les Silences du colonel Bramble2, 1926-1929
Remy de Gourmont, Un cœur virginal, gravures en couleur, Pour les Cent bibliophiles, 1937
Marcel Proust, À l’ombre des jeunes filles en fleur, volume 1, NRF, 1946
Colette, L'envers du Music Hall, trente gravures sur cuivre en taille-douce, Au sans pareil, 1926
Les Avantures satyriques de Florinde, habitant de la Basse Région de la Lune, publiées d'après l'exemplaire de 1625 et décorées d'eaux-fortes par J.-E. Laboureur, Paris, impr. Jacoub et Cie, 1928

Collections publiques

Paris, musée du Louvre, département des Arts graphiques : plusieurs dessins
Paris, musée d'Orsay : dessin
Paris, Bibliothèque nationale de France, Cabinet des estampes : collection la plus considérable de son œuvre
Nantes, musée des beaux-arts : peintures, dont Le Café du commerce, dessins, nombreuses estampes
Blérancourt, musée national de la coopération franco-américaine : plusieurs dessins
Granville, musée d'art moderne Richard Anacréon : dessin
Gravelines, musée du dessin et de l'estampe originale
Ecomusée de Saint-Nazaire : plusieurs dessins, estampes, croquis concernant le passage des troupes américaines à Saint-Nazaire entre 1917 et 1919

Principales expositions

Galerie André Groult, mars 1914.
Galerie Marcel Guiot, Paris, 1926 œuvre gravée et 1931 dessins et aquarelles
Rétrospective, Bibliothèque nationale, Paris, 1954.
Laboureur et J. Villon, Excelsior, Anvers, 1955.
Musée des beaux-arts de Nantes, décembre 1966-janvier 1967.
Galerie Marcel Lecomte, Paris, 1974.
Alliance française, New York, 1977.
Gravures, Château-musée de Nemours, septembre-octobre 1977.
Musée des beaux-arts de Pont-Aven, mars-juin 1993.
Médiathèque-espace Jacques Demy, Nantes, 1996.
Bois gravés, Quimperlé, été 1999.
Galerie Antoine Laurentin, Paris, 2002.
Galerie Bruno Jansem, Paris, 2011.
Jean Émile Laboureur : images de la Grande Guerre, château des ducs de Bretagne, Nantes, janvier - avril 2015.



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Posté le : 15/08/2015 17:05
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Re: Périgord Joli
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Bonjour Loriane,

Vos photos sont vraiment très belles. J'habite dans le Périgord, plus précisément à Cendrieux. C'est un petit village situé à proximité de Sainte-Alvère, le Bugue, Vergt et Périgueux. Cela me fait plaisir de voir les photos de ma région.
Merci pour vos photos.

Amitiés

Audrey

Posté le : 04/08/2015 16:15
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Thomas Gainsborough
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Le 2 août 1788 meurt Thomas Gainsborough

à 61 ans, à Londres, il naît à Sudbury le 14 mai 1727, l'un des plus célèbres portraitistes et paysagistes du XVIIIe siècle britannique. Ses Œuvres réputées les plus réputées sont L'Enfant bleu et Lady Alston
Élève, notamment, du Français Gravelot, influencé par Van Dyck, il fit une carrière mondaine à Ipswich, à Bath en 1759 puis à Londres en 1774, conférant un grand charme à ses portraits, surtout féminins, s'inspirant des Hollandais dans ses paysages, d'une liberté et d'une sensibilité nouvelles. Sa rivalité avec Reynolds lui inspira le Blue Boy du musée de San Marino Californie. Son art élégant, sa technique frémissante jettent un pont entre l'époque rocaille et le romantisme.

En bref

Contemporain et rival de Reynolds, Gainsborough a connu le succès grâce à ses portraits. Son extraordinaire aptitude à saisir la ressemblance, sa virtuosité dans le rendu des étoffes et le traitement de l'arrière-plan, l'élégance formelle de la composition ont été vite appréciées à Bath, puis à Londres, et ont fait sa réputation depuis lors. Pourtant, le genre préféré de l'artiste a toujours été le paysage. Influencé tour à tour par les peintres de pastorales rococo, par les maîtres flamands du XVIIe siècle, enfin par Claude Lorrain, Gainsborough a fini par trouver un style très personnel dans ce domaine, en faisant du paysage imaginaire le champ d'une recherche plastique et poétique libérée des exigences de la représentation topographique. Méfiant à l'égard des artistes plus savants et plus académiques, il a toujours affiché son goût de la spontanéité et du naturel. Mais ce masque de désinvolture dissimule une qualité de facture et d'invention exceptionnelle.
Comme Constable, Gainsborough est originaire du Suffolk, où il naquit en 1727 dans la famille d'un drapier de Sudbury. Il manifesta des dons précoces de dessinateur, et sa famille accepta de l'envoyer à Londres vers 1740, où il devint l'assistant du graveur français Gravelot, qui diffusa en Angleterre le style rococo. Le jeune homme se mit à peindre sans recevoir de véritable formation, et sans avoir la possibilité de se rendre en Italie. Ses premiers portraits furent influencés par le style de Hogarth et de ses amis de l'académie de Saint Martin's Lane. Ne pouvant gagner sa vie dans la capitale, Gainsborough retourna en 1746 dans son pays natal, après avoir épousé Margaret Burr. À Sudbury, puis à Ipswich, il se fit rapidement une clientèle parmi la bourgeoisie et la petite noblesse locales grâce à son talent de portraitiste. Dans le même temps, il peignit de nombreuses vues du Suffolk à la manière de Ruisdael et Wijnants, dont il pouvait étudier les œuvres dans les collections locales. Afin d'élargir sa clientèle, Gainsborough s'installa avec sa famille à Bath en 1759. Dans cette ville d'eaux où affluaient les gens aisés, il devint rapidement le portraitiste à la mode. Il eut également la possibilité d'exposer à Londres dès 1761. Ce succès ne lui laissait guère de répit pour approfondir son art de paysagiste : Si les gens avec leurs fichus visages me laissaient seulement respirer un peu, j'apparaîtrais bientôt sous un jour plus flatteur, écrit-il en 1768. Durant cette période, il découvre Van Dyck et Rubens, et se libère des conventions du rococo. En dehors de la peinture, l'artiste se passionne pour la musique et le théâtre ; il joue de la viole de gambe et se lie à des musiciens et à des acteurs dont il donnera de nombreux portraits. C'est aussi un bon vivant aimant la compagnie et la bonne chère. Les écrivains et la littérature, en revanche, l'attirent peu, ce qui est à rapprocher de son indifférence à l'égard de la peinture d'histoire et de la peinture narrative.
En 1774, Gainsborough quitte Bath pour s'établir à Londres où sa réputation était déjà grande. Il se trouve confronté à la concurrence de Reynolds, mais réussit toutefois à se faire attribuer de nombreuses commissions par des membres de l'aristocratie et de la famille royale. Il expose parfois à la Royal Academy, mais n'entretient pas de bons rapports avec l'establishment artistique, qui lui reproche son indépendance vis-à-vis de la grande tradition picturale italienne. Toujours à l'affût de nouveaux moyens d'expression, le peintre se passionne pour les effets de lumière et de mouvement obtenus par Loutherbourg dans son Eidophusicon. Il se construit lui-même une boîte d'optique pour laquelle il peint des paysages sur une plaque de verre doublée de soie et illuminée de l'intérieur. Succombant à la mode des voyages pittoresques, Gainsborough se rend en 1783 dans la région des lacs, sans pour autant prendre goût à la représentation topographique. Jusqu'à sa mort survenue à la suite d'un cancer, le peintre, fidèle à lui-même, poursuit sa double carrière de portraitiste et de paysagiste, sans changement de style notable, mais avec une intensité expressive et une économie de moyens toujours plus grandes.

sa vie

Gainsborough est né en 1727 à Sudbury, dans le Suffolk, en Angleterre. Son père était un instituteur en relation avec le commerce de la laine. À 13 ans, il impressionne si bien son père par ses talents de dessinateur, qu’il peut partir à Londres pour étudier l'art en 1740. À Londres, il est d'abord formé par le graveur Hubert-François Gravelot, puis il s'associe avec William Hogarth et son école, la St Martin's Lane Academy. Un autre de ses mentors est Francis Hayman. Au cours de ces années, il participe à la décoration de ce qui est maintenant la Thomas Coram Foundation for Children et des Supper Boxes des Vauxhall Gardens.
En 1746, Gainsborough épouse Margaret Burr dont il a deux filles. Le père illégitime de Margaret, le duc de Beaufort, Henry Scudamore, leur verse une rente de 200 £.
Son œuvre, essentiellement des paysages, ne se vend pas très bien. Il repart à Sudbury en 1748-1749 et concentre son activité sur les portraits. Un homme, dira Gainsborough, peut faire de grandes choses et pourtant mourir méconnu dans un grenier s’il ne maîtrise pas ses inclinations et ne se conforme pas à l’œil du vulgaire en choisissant la spécialité que tout le monde paiera et encouragera.
En 1752, avec sa famille, il déménage à Ipswich. Les commandes de portraits augmentent, mais sa clientèle est surtout constituée de marchands locaux et de propriétaires terriens. Il doit emprunter, gageant la rente de sa femme.
En 1759, Gainsborough se rend à Bath et s'installe au 17 du complexe résidentiel The Circus. Il y étudie des portraits d'Antoine van Dyck et finit par attirer une clientèle de la haute société, plus rémunératrice. En 1761, il commença à envoyer des œuvres à la Society of Arts exhibition de Londres devenue la Royal Society of Arts, dont il est l’un des premiers membres et à partir de 1769 aux expositions annuelles de la Royal Academy. Il choisit des portraits de clients célèbres pour attirer l'attention. Les expositions l’aident à gagner une réputation nationale, et il est invité à devenir un des membres fondateurs de la Royal Academy en 17681. Pourtant, sa relation avec l’Académie n'est pas facile et il cesse d'y exposer ses tableaux à partir de 1773.
Gainsborough et sa famille retournent à Londres en 1774 pour vivre à Schomberg House, Pall Mall. En 1777, il recommence à exposer à la Royal Academy, avec des portraits de célébrités de l'époque, notamment le frère et la belle-sœur du roi, le duc et la duchesse de Cumberland. Ces expositions se poursuivent pendant 10 ans.
En 1780, il réalise les portraits du roi George III et de la reine Charlotte, et reçoit par la suite de nombreuses commandes royales. Cela lui donne de l’influence sur l’Académie pour définir de quelle façon son œuvre doit être exposée. Mais, en 1783, il reprend ses toiles et les ramene à Schomberg House. En 1784, le peintre officiel de la cour, Allan Ramsay, meurt. Le roi doit offrir le titre au rival de Gainsborough, le président de l’Académie, Joshua Reynolds, même si Gainsborough reste le peintre préféré de la famille royale.
À la fin de sa vie, il peint souvent des paysages d’une composition très simple. Avec Richard Wilson, il est l’un des fondateurs de l’école britannique du paysage du XVIIIe siècle et, avec Joshua Reynolds, il est le portraitiste britannique dominant de la seconde moitié du même siècle.
Gainsborough peignait plus selon ses observations de la nature qu’en appliquant des règles formelles. Il travaillait rapidement, fusionnant souvent ses portraits avec la scène en arrière-plan, recourant à une palette restreinte et à de légers coups de pinceaux.

L'originalité du portraitiste

Les portraits de Gainsborough sont généralement mieux connus, et ont été longtemps plus admirés que ses paysages. Cette prééminence pourrait bien être remise en question, à la lumière d'expositions et des travaux exhaustifs publiés par John Hayes, qui ont révélé l'extrême richesse de son œuvre de paysagiste. Cependant, on ne peut manquer de reconnaître la qualité constante de ses portraits, quelle que soit la période considérée. Les critiques du XXe siècle ont révisé le jugement de naïveté qui avait été porté sur les œuvres datant de la décennie 1745-1755 : il est vrai qu'une toile comme Mr. & Mrs Andrews (1749, National Gallery, Londres) a de quoi séduire par son réalisme psychologique, l'originalité de sa composition et la qualité de son arrière-plan. Mais il faut bien admettre que le peintre maîtrise encore mal l'éclairage des modèles, qui reste cru et artificiel, et éprouve des difficultés à les relier au paysage environnant. Il n'en surpasse pas moins aisément Mercier et Hayman, qui avaient pratiqué avant lui le portrait de groupe dans un décor de plein air réaliste.
C'est à Bath que Gainsborough acquiert la virtuosité qu'on lui reconnaît dans l'art du portrait : qu'il représente de belles dames de l'aristocratie aux atours somptueux, d'élégants gentilshommes, ses propres amis acteurs et musiciens, ou encore ses propres filles Margaret et Mary, il manifeste, au dire de ses contemporains, une habileté exceptionnelle à saisir la ressemblance. Il renonce aux poses rigides jadis choisies par Kneller et Lely, et montre la même attirance que Hogarth pour les lignes serpentines et les légères torsions du rococo. C'est que Gainsborough ne s'intéresse pas seulement au visage mais à l'ensemble du corps du modèle en tant qu'élément d'un espace pictural. Dans ses meilleurs tableaux, il parvient à intégrer le personnage et l'arrière-plan dans une structure formelle complexe. Ainsi dans le portrait de Mrs. Philip Thicknesse 1760, Art Museum, Cincinnati, le galbe de la viole de gambe, les courbes de la guitare et les amples volumes de la robe bouffante du modèle ébauchent un fascinant contrepoint.
Cette attention portée à l'ensemble de la toile comme espace pictural homogène est une nouveauté en Angleterre. Elle se traduit chez Gainsborough par des exigences particulières lors des séances de pose. Celles-ci commencent dans la pénombre, afin que le peintre, sans être distrait par les détails, puisse esquisser les grandes lignes du tableau. Mary Woodall a pu ainsi écrire qu'il regardait ses modèles de la même manière qu'il regardait un paysage. Pour ce qui touche à la physionomie des clients, le peintre se refusait à toute idéalisation, contrairement à Reynolds, répétant avec un solide bon sens que la ressemblance est la beauté et l'intérêt principal d'un portrait. Dans le même souci d'authenticité, il préférait faire poser ses modèles dans des vêtements contemporains. Seuls quelques personnages furent peints dans des costumes à la Van Dyck, L'Enfant bleu, 1770, Huntington Art Gallery, San Marino, et cela à la demande de clients qui possédaient déjà des œuvres du XVIIe siècle. Quel que soit le costume choisi, il était toujours exécuté par le peintre lui-même, qui se plaisait à détailler soieries et mousselines, écharpes de gaze et coiffures sophistiquées. Non sans quelque ironie probablement, il apportait le même soin à peindre la fourrure immaculée des petits chiens blancs que ses riches clientes voulaient également immortaliser sur la toile, La Promenade nationale, 1785, National Gallery, Londres. Pour ces morceaux de bravoure, il avait mis au point une technique très personnelle à base de hachures rapidement posées au moyen de très longs pinceaux, afin d'être à égale distance de la toile et du modèle. Reynolds, qui était assez critique à l'égard de son rival, dut reconnaître l'efficacité de ces griffures et marques bizarres, à condition qu'on les observe de loin : Ce chaos, cet aspect brut et confus, par un tour de magie, prennent forme s'ils sont vus d'une certaine distance, écrit-il dans une conférence publiée après la disparition du peintre.
Les portraits d'enfants de Gainsborough méritent une mention particulière parce qu'ils sont caractéristiques d'un nouveau regard porté sur cet âge à la fin du XVIIIe siècle. Le peintre prit tour à tour comme modèles ses propres filles, les enfants de ses amis, de jeunes clients aristocratiques mais aussi des enfants pauvres rencontrés au hasard de ses promenades. Il ne les représenta jamais comme des adultes en miniature, à l'instar de ses prédécesseurs du XVIIe siècle, pas plus qu'il ne s'intéressa à leurs moments de joyeuse exubérance, comme l'avait fait Hogarth. Il donna à ses jeunes modèles des expressions graves et pensives Les Enfants Marsham, 1787, coll. privée, Paris. Vers la fin de sa vie, influencée par Murillo, le peintre représenta souvent des enfants de la campagne, en haillons, portant cruche ou fagot Villageoise, avec chien et cruche, 1785, coll. privée, Londres. On a rapproché ces œuvres du courant sentimental alors à la mode en littérature, et suggéré qu'elles visaient à susciter la compassion, à une époque où la charité et la philanthropie étaient de mise dans les couches supérieures de la société britannique. Mais on peut aussi se demander si le halo de mélancolie voilant ces portraits ne traduit pas une vision calviniste de l'innocence édénique perdue, dont l'enfance offrirait un reflet expressif.

Paysage et imagination

Gainsborough a souvent répété que le paysage était son genre pictural de prédilection, la réalisation de portraits étant seulement son gagne-pain. Cela ne saurait être mis en doute, si l'on en juge par les centaines de dessins et aquarelles qu'il produisit tout au long de sa carrière, pour son propre délassement, et par les quelque trois cents paysages à l'huile qu'il réalisa sans vraiment chercher à les vendre. Très sensible aux influences, Gainsborough a mis longtemps à trouver son style propre dans ce domaine. C'est par l'intermédiaire de Wijnants et de Ruisdael, dont il copia un certain nombre de toiles, qu'il aborda ce genre ; mais ses paysages de la période d'Ipswich sont aussi fondés sur une observation attentive de la campagne du Suffolk, qu'il appréciait d'une façon moins sentimentale que Constable, mais tout aussi précise. Pourtant, Gainsborough ne s'intéressait pas à la représentation exacte d'un lieu, comme son contemporain Paul Sandby ; à ses yeux, un paysage peint devait être avant tout une composition plastique. À lord Hardwicke, qui lui avait demandé une vue topographique en 1764, il répondit poliment que pour ce qui était des vues exactes d'après nature dans ce pays, il n'avait jamais connu de lieu qui offre un sujet aussi intéressant que les plus faibles imitations de Gaspard ou de Claude ». Malgré son titre très localisé, le Bois de Cornard, 1748, National Gallery, Londres est une composition imaginaire, très inspirée de Ruisdael. Les paysages de la période de Bath marquent, sous l'influence de Rubens, un tournant décisif dans sa manière. La véhémence de la touche et les contrastes dramatiques d'ombre et de lumière sont ses caractéristiques nouvelles, perceptibles dans le Paysage boisé de montagne 1763, Art Museum, Worcester, Massachusetts. Mais les œuvres de Claude Lorrain, si appréciées des connaisseurs britanniques à cette époque, ont aussi inspiré le peintre, bien qu'il les ait jugées « banales et insipides. Enfin, l'art si typiquement britannique des jardins paysagers, alors illustré par Lancelot Brown, a laissé sa marque dans ses toiles de la période londonienne finale : on le voit au soin nouveau qu'il met à étager les plans et à ménager une ouverture sur le lointain, tout en jouant sur les couleurs contrastées de la végétation. Dans l'étonnant Paysage rocheux de montagne, 1783, National Gallery of Scotland, Édimbourg, on voit clairement ce qui fait l'apport individuel de Gainsborough à l'école anglaise de paysage : sa maîtrise du rythme plastique à des fins d'expressivité psychologique, sensible dans la variété des textures et des valeurs. Afin de stimuler son imagination plastique, le peintre inventait des paysages en chambre, à l'aide de fragments de mousse, de plantes et de cailloux ; il pouvait ainsi jouer librement mais concrètement avec les volumes et les surfaces, sans référence à une quelconque topographie. Comme dans ses meilleurs portraits, il rend complètement expressif tout l'espace pictural, sans hiérarchisation des parties. Reynolds ne s'y est pas trompé, lorsqu'il a loué « sa façon d'élaborer ensemble tous les éléments du tableau – le tout simultanément, de la même manière que la nature lorsqu'elle crée.
La distinction traditionnelle entre le portrait et le paysage doit par conséquent être nuancée, dans la mesure où le peintre conçoit dans tous les cas ses toiles en termes purement plastiques. En outre, elle s'efface tout à fait dans les scènes de genre rustiques qu'affectionna toute sa vie Gainsborough, et que les Anglais désignent sous le nom de fancy-pictures. Il s'agit de paysages avec figures, qui sont au début dans la lignée des pastorales rococo (Paysans allant au marché de bon matin, vers 1773, Royal Holloway College, Londres. Les personnages féminins y sont d'une élégance invraisemblable, et la vie rurale y est présentée comme une longue et gracieuse somnolence. Plus tard, dans la dernière période londonienne, le thème du Seuil de la chaumière 1778, Huntington Art Gallery, San Marino revient souvent sous son pinceau : dans un décor de feuillages assez oppressant, on découvre un groupe d'enfants et d'adolescentes assis avec leur mère devant une chaumière, observant le retour d'un paysan portant des fagots. Uvedale Price avait noté, lors de ses promenades avec le peintre, sa fascination pour ce genre de spectacle : Quand nous approchions de chaumières et de villages où des groupes d'enfants et des scènes de la vie rurale attiraient son attention, j'ai observé que son visage respirait la douceur et la satisfaction. Les représentations qu'en donne Gainsborough dans la dernière décennie de sa vie sont pourtant loin d'être idylliques, et même si les personnages féminins ont toujours l'air de ladies, on sent percer l'angoisse de beaucoup de ses contemporains devant la montée de la pauvreté dans les campagnes. La nostalgie des citadins pour la vie rurale est désormais d'autant plus grande que, avec la révolution industrielle, le retour en arrière vers la bonne vieille Angleterre est de plus en plus mythique. D'autre part, cette nostalgie se double d'une peur de la surpopulation dont Malthus se fera le porte-parole en 1798, dix ans seulement après la mort du peintre. Rien d'étonnant, à vrai dire, qu'un artiste aussi influençable évoque mélancoliquement les aspirations et les inquiétudes de ses contemporains, même si le registre qu'il choisit reste constamment poétique.
C'est donc une œuvre tout à fait caractéristique des goûts et des préoccupations de la société anglaise de son temps qu'a laissée Gainsborough. Son culte du naturel et son côté autodidacte ont plu à la bourgeoisie urbaine et à la petite noblesse, qui constituaient la majeure partie de sa clientèle et qui se méfiaient de l'engouement des connaisseurs aristocratiques pour la tradition italienne. Il a su tirer profit des influences successives des artistes rococo, puis des peintres flamands et hollandais, pour se forger un langage personnel, brillant et désinvolte, mais toujours efficace et parfaitement maîtrisé. À cause de la variété des genres qu'il a pratiqués, il a souvent dérouté la critique ; mais, s'il est vrai que l'occultation de ses paysages au profit de son art du portrait a déformé, pour un temps, le jugement porté sur Gainsborough, on peut aujourd'hui reconnaître l'unité plastique de son œuvre et rendre justice à l'originalité de sa recherche expressive. Jacques Carré

Ses meilleures Å“uvres, comme

Portrait de Mrs Graham ;
Les filles du peintre ;
William Hallett et son épouse Elizabeth, née Stephen, connue sous le nom de Promenade matinale 1785 ;
et Petite paysanne au chien et à la cruche 1785,
montrent le caractère unique l'individualité de ses sujets. Son seul assistant fut son neveu Gainsborough Dupont.

Gainsborough meurt d'un cancer le 2 août 1788 dans sa 62e année, à sa maison, Schomberg House en Pall Mall, Londres. Il est enterré à l'église de Kew à Londres.


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Posté le : 01/08/2015 19:50
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Stanley Kubrick1
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Le 26 juillet 1928 naît Stanley Kubrick

dans la ville de New York à Manhattan, réalisateur, photographe, scénariste et producteur américain, mort, à 70 ans, le 7 mars 1999 dans son manoir de Childwickbury, entre St Albans et Harpenden Hertfordshire, au nord de Londres.Ses films les plus notables sont : Les Sentiers de la gloire, Spartacus, Docteur Folamour, 2001, l'Odyssée de l'espace, Orange mécanique, Barry Lyndon, Shining, Full Metal Jacket, Eyes Wide Shut
Après des débuts dans la photographie, Kubrick, autodidacte, sera également son propre directeur de la photographie, producteur, scénariste ou encore monteur. Ses treize longs métrages en quarante-six ans de carrière l'imposent comme un cinéaste majeur du XXe siècle. Quatre de ses films sont classés dans le top-100 de l'American Film Institute. Actuellement, sept de ses films sont classés dans le top 250 de l'IMDB Internet Movies DataBase.

En bref

Un mélange de grotesque, qui peut aller jusqu'au cauchemar, et de dérision plus subtile, plus satirique, tel a été d'abord le trait le plus manifeste des préoccupations du cinéaste Stanley Kubrick. Esprit versatile et paradoxal, de tendance progressiste mais hanté par le pessimisme quant à la « bonté » de la nature humaine, il a pratiqué un cinéma presque confidentiel avant de se trouver hissé à la célébrité internationale avec 2001 : A Space Odyssey (2001, l'Odyssée de l'espace), qui est à la fois le film de science-fiction le plus adulte tourné à ce jour et un chef-d'œuvre de photographie. Le style de Kubrick, où des tentations baroques corrigent une feinte objectivité, et où un « tape-à-l'œil » soigneusement dosé sert à faire passer des messages volontiers expérimentaux, fait de lui l'un des cinéastes actuels les plus originaux, dont l'indépendance de caractère a su s'appuyer sur une remarquable organisation financière.
Né le 26 juillet 1928 à New York, dans le quartier populaire du Bronx, Stanley Kubrick a d'abord été journaliste, notamment pour le magazine Life. Très tôt passionné de photo, il tourne avant 1953 des courts métrages d'amateur, puis fait la quête autour de lui et rassemble 50 000 dollars pour produire son premier vrai film, joué par des acteurs amis. Il en est aussi le scénariste, le photographe et le monteur : le film ne trouvera pas de distributeur et l'argent sera perdu. Nullement découragé, Kubrick réitère l'exploit et réussit à faire distribuer par United Artists un premier long métrage dont le personnage principal est un tueur névropathe, Killer's Kiss (Le Baiser du tueur, puis il met en scène The Killing L'Ultime Razzia.
Cette histoire de hold-up sur un champ de courses relève de la tradition du thriller, jusque dans le vœu du personnage central : retrouver la prairie de son enfance où l'attendent... des chevaux.
L'action est riche en détails incongrus : on abat un pur-sang en pleine course pour détourner l'attention avant le hold-up, les gangsters portent des masques de carnaval. La mise en scène est très influencée, dans ses accès de violence, par celle de Robert Aldrich ; mais Kubrick s'inspire aussi de cinéastes européens longs travellings suivant les acteurs comme chez Max Ophüls, plans importants réservés à des temps d'accalmie dans l'action, comme chez Rossellini.
Le film bénéficie d'un certain succès, auprès du public comme de la critique. C'est alors que Kirk Douglas, acteur en pleine ascension, accepte de s'associer au producteur et ami de Kubrick, James Harris, pour monter un film antimilitariste, Paths of Glory 1957, Les Sentiers de la gloire, qui sera mis en scène par Kubrick et joué par Douglas. Le tournage a lieu à Munich, dans le but de reconstituer un minimum d'atmosphère européenne. Il s'agit en effet d'une évocation romancée des fusillés pour l'exemple sur le front français, en 1917.
Prudemment, les distributeurs présentèrent d'abord le film à Bruxelles : d'anciens combattants français n'en provoquèrent pas moins des incidents, et United Artists renonça à sortir le film en France on était en pleine guerre d'Algérie. Il n'a été projeté à Paris qu'en 1972. Ce qui frappe dans cette œuvre, bien plus que l'ironie du constat le général qui ordonne les fusillades sera pris au piège de son machiavélisme, l'un des condamnés est tiré à la courte paille ou que le message humanitaire dont la force n'exclut pas un certain flou, c'est la maîtrise dont Kubrick fait preuve tant dans la description d'une attaque absurde et meurtrière que dans celle d'un procès hideusement vide de sens, voire dans celle, encore plus périlleuse, de l'exécution. Il y a là, outre un parfait contrôle des interprètes, excellents mais enclins au cabotinage, une géométrisation du meilleur aloi.
Une autre expérience de Kubrick avec Kirk Douglas sera moins heureuse. Ayant dû renoncer à un projet avec Marlon Brando on juge de l'ambition croissante du cinéaste, il accepte de remplacer, sur le tournage de Spartacus, Anthony Mann qui s'est brouillé avec la vedette-producteur. Le résultat sera un film remarquable, qui contient de splendides morceaux et de grands numéros d'acteurs sur un sujet passionnant, mais souvent impersonnel : Spartacus doit ses qualités à l'omniprésence de l'équipe rassemblée par Douglas et au scénario de Dalton Trumbo bien plus qu'à Kubrick qui affectera de renier le film.
Comme pour retrouver les ambiguïtés qui lui sont chères en s'éloignant de Hollywood, le cinéaste entreprend en Grande-Bretagne une adaptation alors jugée audacieuse : celle de Lolita le roman de Nabokov est encore plus ou moins interdit dans nombre d'États américains. Le film ne cherche pas à rivaliser avec le style ni même avec les évocations du romancier. À la peinture d'une Amérique à la fois puritaine et hypersexualisée, il substitue celle d'une frénésie énigmatique. Cette frénésie habite le personnage de Quilty : entre lui et Humbert-Humbert, le narrateur, Lolita est moins une héroïne provocante que l'enjeu d'un duel sans règle. On songe, devant ce film dont Nabokov assura lui-même l'adaptation, au théâtre de l'absurde plus qu'à la description d'une fixation érotique. En outre, les interprètes, James Mason Humbert-Humbert et Peter Sellers Quilty qui, à cette occasion, échappe pour la première fois à une longue routine de comédie anglaise traditionnelle et prélude à ses meilleurs rôles, sont excellents.
C'est à cette époque que Kubrick décide d'installer à Londres son quartier général. Il met bientôt en scène son premier film ouvertement personnel, adaptation d'un roman sans intérêt dont il bouleverse et approfondit les données. De ce film, Dr. Strangelove Docteur Folamour, le sous-titre Comment j'ai appris à ne plus m'en faire et à aimer la bombe donne le sujet et le ton. C'est une farce pacifiste située dans un avenir à peine lointain. Tandis que Russes et Américains, également ridicules, mènent le ballet habituel des chantages diplomatiques, un général fou et quelques comparses s'apprêtent à déclencher la guerre atomique à la première alerte : le général un Yankee est persuadé que les Russes ne cherchent qu'à capter la force sexuelle des mâles de la terre entière. De son fauteuil roulant, un ex-nazi, récupéré par les États-Unis, conduit leur politique étrangère à coup de vaticinations sur le devenir de l'espèce, mais ne peut de temps à autre empêcher son seul bras valide de faire le salut hitlérien. La sottise intrinsèque de la course aux armements est rageusement dénoncée, ainsi que les contradictions de la technologie : d'insignifiants gadgets prennent une importance énorme, et la bombe nucléaire s'envole à la fin vers sa cible par suite d'une erreur. Tous les personnages portent des noms puérils Mandrake ou des sobriquets insultants le général fou s'appelle Jack l'Éventreur. Sans remédier entièrement à la dispersion un peu gênante de l'action, Peter Sellers interprète trois rôles : l'inquiétant Dr. Strangelove, un officier de bonne volonté mais d'esprit assez lent, et enfin le président, une ganache surnommée Muffley mot obscène. Le film connut un réel succès en Europe et même, dans une moindre mesure, aux États-Unis ; Kubrick a maintenant sa pleine autonomie créatrice. On observe, d'autre part, dans Dr. Strangelove, un travail de stylisation visuelle d'autant plus notable qu'il ne se réduit pas aux personnages tous plus ou moins des pantins menés par ce pantin qu'est lui-même devenu l'ex-nazi et qu'il s'applique à des décors abstraits notamment une salle des cartes au grand quartier général de Washington. Ce même travail va se retrouver, amplifié et magnifié, dans 2001 : A Space Odyssey.
Il s'agit ici d'un sujet original concocté par Kubrick à partir d'un récit d'Arthur C. Clarke, éminent astronome et connaisseur de l'astronautique, qui, selon un processus fréquent dans le monde anglo-saxon, ne dédaigne pas de rédiger des nouvelles de science-fiction. Il participera d'ailleurs étroitement à la conception et à la préparation du film. Préparation énorme et tournage minutieux, qui demanderont quelque trois ans pour être menés à bien. L'ambition de l'œuvre est en effet sans limites : il s'agit d'embrasser l'histoire humaine, à partir d'un objet volant, qui n'est pas une soucoupe, mais une plaque monolithique flottant dans l'espace. Cet objet n'a pas de pouvoir défini bien qu'il rappelle certains objets analogues de Lovecraft : il est le symbole intangible et inaccessible de quelque chose d'inconnu. Son passage marque d'abord la mutation des singes de la préhistoire en hommes : c'est le prologue du film. Puis nous sommes au seuil du XXIe siècle il perturbe la compétition amicale des Américains et des Russes pour l'exploitation quasi commerciale de l'espace, déjà conquis le film est sorti juste avant les premiers pas réels de l'homme sur la Lune. Délaissant le rythme coutumier de leurs stations sur orbite, des astronautes remarquent sur notre satellite naturel les traces d'une autre civilisation ?, traces liées au passage du monolithe.
Pour en savoir davantage, une mission est envoyé vers Jupiter. Un seul de ses membres échappe à la logique meurtrière de l'ordinateur ou cerveau électronique, qu'il déconnecte délibérément pour sa propre sauvegarde le dialogue entre l'homme et la machine agonisante est une trouvaille stupéfiante par son audace. Le cosmonaute atterrit enfin non sans un choc violent en un lieu mystérieux : il y voit vivre un vieillard qui semble sorti comme son ameublement du XVIIIe siècle siècle des Lumières, qui fascine et inquiète à la fois Kubrick. À cette évocation de l'Éternel Retour, le cinéaste oppose pour finir un nouveau passage du monolithe, et à la figure du vieillard, celle d'un embryon humain géant, sorte de mutant qui, dans sa coque translucide, plane en quelque galaxie la nôtre ?.
Le film doit beaucoup de sa réussite à sa division en chapitres ou segments égaux, qui lui confère un rythme ample, à la mesure des grands problèmes qu'il évoque. Il n'y a presque pas d'effets visuels excessifs sauf un court passage de coulées d'encre filtrées et accélérées. L'étrangeté naît du contraste entre la vie finalement prosaïque, routinière des personnages, et la splendeur du cosmos qui les environne. Elle naît aussi du spectacle de la perfection technique fonctionnant comme une entité autonome stations s'arrimant l'une à l'autre, couloirs immenses du cerveau..., et, enfin, de la manière dont est rendue présente la double possibilité évoquée par Arthur C. Clarke : Parfois je pense que nous sommes seuls dans l'Univers et parfois je pense que non, et cette double possibilité me fait chanceler. Le film oscille entre un penchant à l'humour les savants sont soupçonneux les uns envers les autres, tout en menant une existence entièrement programmée ; Kubrick fait graviter les stations au rythme du Beau Danube bleu... et une tendance au mysticisme plus modéré toutefois que celui qui s'est épanoui depuis dans Rencontres du troisième type, de Steven Spielberg.
En définitive, il doit son impact à sa visualisation extrême le dialogue y est purement fonctionnel, à l'exception de quelques traits anecdotiques, et Kubrick assure que ce sont les enfants qui ont fait le succès d'un film pourtant destiné aux adultes.
Autre anticipation de quelques dizaines d'années, A Clockwork Orange Orange mécanique s'inspire d'un roman d' Anthony Burgess. Cette fois, la verve du cinéaste s'attaque au public lui-même, et il semblerait que le triomphe, mêlé de scandale, rencontré par le film repose sur un malentendu. Les métamorphoses du héros sont en effet entièrement commandées par l'arbitraire cinématographique ; le cadre de ses évolutions est un rappel de tous les thèmes traités par Kubrick il y a des mannequins comme dans Killer's Kiss, des nymphettes comme dans Lolita, la musique joue un rôle aussi important que dans 2001 : A Space Odyssey, les institutions sont aussi dérisoires et nauséeuses que dans Dr. Strangelove. Par-dessus tout, Kubrick fait intervenir des personnages qui commentent l'action, généralement pour la persifler et se moquer indirectement du spectateur candide. L'intrigue où l'on peut voir une dénonciation de la violence est linéaire : le protagoniste, qui est aussi le narrateur, dirige un gang d'adolescents minables, voués à la cruauté gratuite et au viol. Sa seule passion est Beethoven. Trahi par ses complices, emprisonné, il accepte de servir de cobaye à une expérience de traitement bonifiant, dit traitement Ludovico Ludwig !. Devenu vertueux par réflexe conditionné, il tombe peu après sa libération aux mains de l'opposition qui va l'employer contre le gouvernement, mais celui-ci intervient et le guérit en sens inverse.
De cette histoire qui ne paraissait guère engageante, Kubrick a tiré une farce amère, aux effets visuels discutables, mais qui vaut par l'application d'un principe plastique récurrent : la figure du cercle, qui prédomine tant dans la structure narrative que dans les innombrables accessoires futuristes du décor. En outre A Clockwork Orange révèle crûment chez son auteur une tendance, jusque-là toujours présente mais latente, à unir étroitement la sexualité et la mort.
Enfin, le regard critique porté par le narrateur si peu sympathique qu'il soit sur le cinéma, lors des séances de bonification où l'on juge de sa conversion à sa non-violence, implique de la part de Kubrick une réflexion nouvelle sur son art et sur ses limites. Notre croyance coutumière est battue en brèche par cette phrase du héros inventée par Kubrick : C'est drôle comme les couleurs du monde comme qui dit réel ne semblent réellement réelles que quand on les voit sur l'écran. Le public qui s'exclame à telle scène de violence ou d'érotisme est pris au piège de son propre intérêt, puisque ces scènes sont, à l'intérieur du film, données pour irréelles. Cela a été calculé, évidemment, par le cinéaste.
Comme s'il avait opéré à cette occasion une sorte de catharsis, et aussi faute de pouvoir entreprendre après 2001 un Napoléon qui en eût été le pendant dans le passé, Kubrick est revenu pour Barry Lyndon à une narration plus traditionnelle, d'après un roman d'éducation de Thackeray, situé au XVIIIe siècle. Narration picaresque, aux incidents souvent prévisibles. Un intéressant travail sur la couleur attribue l'orangé des éclairages à la bougie à toutes les séquences et à elles seules mettant en jeu l'intégrité morale du héros, lorsqu'il ressent de façon subjective cette intégrité en péril. Au reste, Barry Lyndon est le frère des personnages favoris de Kubrick : son ambition, son refus de l'injustice, son goût de l'aventure entrent en conflit permanent avec l'étroitesse des préjugés, le vieillissement et le refroidissement des sentiments. Le pessimisme de Kubrick s'exprime ici plus radicalement qu'ailleurs le film se clôt sur l'épitaphe collective des gens de cette lointaine époque, mais aussi sur un ton feutré : nuances roses des drapeaux, verdoyants paysages d'Irlande et d'Allemagne, mobilier rococo. L'échec commercial retentissant et inattendu de Barry Lyndon oblige ensuite Kubrick à se rabattre sur un genre qu'il méprise : le surnaturel. Le résultat, Shining, est un film extrêmement inégal, où de grandes trouvailles de mise en scène se heurtent à des laideurs peut-être calculées mais insupportables : Shining serait-il l'aveu rageur de sa propre difficulté d'être ? Stanley Kubrick renoue avec les thèmes de la folie guerrière et du corps dressé ou robotisé dans Full Metal Jacket. Le film à la forme d'un diptyque : une partie sur l'entraînement des marines dans un camp de Floride, une partie sur les marines au Vietnam. Le metteur en scène meurt à Londres le 7 mars 1999, alors qu'il vient de mettre la dernière main à Eyes Wide Shut, commencé à l'automne de 1996. Gérard Legrand.

Sa vie

Stanley Kubrick a toujours été réticent à s'entretenir sur ses œuvres, laissant au spectateur la liberté de formuler sa propre interprétation. Les deux principaux livres auxquels il a participé activement avec Michel Ciment et Alexander Walker sont consacrés au récit image et son et à la symbolique de ses films.

Débuts dans la photographie

Stanley Kubrick est issu d'une famille juive originaire d'Europe centrale habitant dans le quartier du Bronx. Son père, Jacques Jacob Leonard Kubrick 1901-1985, né aux États-Unis d'une mère roumaine et d'un père austro-hongrois, était cardiologue, pianiste et photographe amateur. Il apprend à son fils Stanley âgé de douze ans à jouer aux échecs4. Cette passion suivra Stanley Kubrick toute sa vie. Sa mère Gertrude, née Perveler 1903-1985, chanteuse et danseuse, lui a donné le goût des livres et de la lecture. Il a une sœur cadette, Barbara, née en 1934.
De 1940 à 1945, Kubrick ne trouve aucun intérêt à l'école. Mis à part la physique, rien ne l'intéresse, et il n'arrive pas à obtenir une moyenne suffisante pour s'inscrire à l'université. D'autant plus que la guerre terminée, nombre de soldats revenant du front tentent d'y entrer, mais les inscriptions sont limitées.
Pour son treizième anniversaire, son père lui offre son premier appareil photo. Cette nouvelle activité le passionne et lui fait oublier sa passion de jeunesse, le jazz, et son rêve de devenir batteur de jazz professionnel. Il prend de nombreuses photos et les développe avec un ami dans la chambre noire familiale. Il devient le photographe officiel de son collège et a pour idole le reporter-photographe Weegee.
En avril 1945, à l'âge de 16 ans, il réussit à vendre au magazine illustré Look une photographie d'un vendeur de journaux en larmes après la mort de Franklin D. Roosevelt, qu'il a prise alors qu'il se rendait au lycée. La rédactrice en chef l'engage comme photographe indépendant, par pitié dira-t-il plus tard. Stanley Kubrick y travaille durant quatre ans et y apprend les ficelles du métier, la composition d'une image, les éclairages, l'usage des extérieurs et l'art de saisir le mouvement. Plutôt perfectionniste, il lui arrive de prendre plusieurs centaines de clichés pour réaliser une seule photo. Grand amateur de boxe, son premier photos-récit intitulé Prizefighter Le Professionnel raconte une journée de la vie du boxeur Walter Cartier. C'est ce photo-récit qui sera à l'origine de son premier film : Day of the Fight.
En 1947, à l'âge de 18 ans, il se marie avec une camarade de classe de la Taft High School, Toba Metz. Ils s'installent au Greenwich Village deux ans plus tard.

Un destin de réalisateur

Pendant ses premières années de photographe de magazine, Kubrick fréquente assidûment les salles de cinéma. Ses goûts sont éclectiques, avec une préférence, comme il le dit en 1963 dans la revue Cinéma, pour le cinéma d'auteur européen comme Ingmar Bergman, Michelangelo Antonioni, Federico Fellini. Les films de Max Ophüls comme Le Plaisir ou Madame de... — mouvement complexe et sans heurt de la caméra, travelling — influencent le jeune Stanley Kubrick.
En 1950, l'autodidacte Stanley Kubrick, âgé de 22 ans, se décide à sauter le pas et se lance dans le cinéma. Pour lui, sa meilleure formation, ce sont les longues séances cinématographiques qu'il s'impose, des meilleurs films au pire des navets. Je ne peux pas faire pire se dit-il.

Courts métrages et série TV

Dans ses premiers films, Kubrick fait tout lui-même : il est à la fois scénariste, cadreur, ingénieur du son, monteur et réalisateur.
Entre 1950 et 1951, Kubrick réalise deux documentaires, consacrés l'un à un boxeur, l'autre à un missionnaire. Il reprend l'idée de son photos-récit Prizefighter et réalise avec Alexander Singer, un camarade de classe, le court métrage Day of the Fight — une journée de la vie du boxeur Walter Cartier —, filmé comme un reportage. Autofinancé avec un budget de 3 900 $, le documentaire est vendu à RKO Pictures avec seulement 100 $ de bénéfice. Pour Flying Padre, Stanley Kubrick reprend la même idée et suit durant deux jours Fred Stadtmueller, un missionnaire catholique. D'une durée de 9 minutes, ce film est en partie financé et distribué par RKO.
Les deux documentaires sont des succès mineurs, mais Kubrick se fait remarquer par le brillant de sa photographie. Lui-même dira : Même si mes deux premiers films étaient mauvais, ils étaient bien photographiés.
En 1951, il divorce de Toba Metz. L'année suivante, à la demande de Richard de Rochemont, futur producteur de son premier film Fear and Desire, Kubrick est réalisateur d'une deuxième équipe sur une séquence d'un omnibus consacré à Abraham Lincoln. Par la suite, il réalise plusieurs épisodes, toujours en qualité d'assistant réalisateur. C'est en 1953 qu'il réalise son premier documentaire en couleurs, The Seafarers. Dans ce film promotionnel sur la marine marchande, on retrouve les travellings à la Max Ophüls.

Premiers longs métrages

Fear and Desire et Le Baiser du tueur.
Pour réaliser son premier long métrage Fear and Desire, Kubrick emprunte à sa famille 9 000 $. Il persuade un ami poète de lui écrire un scénario original : l'histoire d'un groupe de soldats chargés d'éliminer une troupe ennemie dans une guerre fictive ; à la fin du film, les soldats voient leurs propres visages dans ceux de leurs ennemis. Le réalisateur tourne son film en 35 mm noir et blanc près de Los Angeles. Une nouvelle fois, il fait tout. Il décide de ne pas enregistrer le son avec les images et son erreur lui coûte 30 000 $ de post-synchronisation. Malgré tout, il est fier d'avoir réussi à terminer son film. Plus tard, il qualifiera son film de tentative inepte et prétentieuse et décidera de le retirer des circuits de distribution et d'en interdire toute projection.
Encouragé par une critique honorable, Stanley Kubrick quitte définitivement le magazine Look bien que le film soit un échec commercial. C'est lors du tournage du film qu'il rencontre sa future femme, Ruth Sobotka.
En 1954, Le Baiser du tueur Killer's Kiss, son second long-métrage, film très court tourné dans les rues de New York, raconte l'histoire d'un boxeur minable obligé de fuir la mafia. L’histoire manque d'originalité — c'est le seul scénario original écrit par Kubrick — mais ce film démontre son talent à jouer avec l'ombre et la lumière et confirme sa maîtrise technique dans la scène de règlement de comptes dans un entrepôt de mannequins.
Sa réalisation est récompensée par un Léopard d'or au Festival international du film de Locarno.

Les débuts de la collaboration avec James Harris

L'Ultime Razzia et Les Sentiers de la gloire.
Le Baiser du tueur attire l'attention de James B. Harris, producteur indépendant qui a de bonnes relations avec les majors de Hollywood. C'est Alexander Singer, qui a connu Harris quelques années auparavant, qui fait se rencontrer les deux hommes. Cette rencontre est décisive, et ensemble ils fondent la Harris-Kubrick Pictures alors qu'ils ne sont tous les deux âgés que de 26 ans.
Deux ans plus tard, en 1956, naît de leur association le troisième film de Kubrick, L'Ultime Razzia The Killing, le premier grand film avec un budget de 320 000 $ financé en partie par Harris et les United Artists. Pour la première fois le réalisateur dispose d'acteurs professionnels et d'une équipe technique complète. Encore une fois, l’histoire n'a rien d'exceptionnel : un tireur embusqué doit abattre le cheval de tête dans une course hippique pour créer une diversion et ainsi faciliter le braquage de la caisse des paris. Un film noir de braquage comme il en existe beaucoup à cette époque, mais Stanley Kubrick fragmente l'histoire que seule la voix off très influencée par Citizen Kane d'Orson Welles permet de reconstituer. Plus d'une décennie plus tard, la critique Pauline Kael considérait que L'Ultime Razzia avait lancé la carrière de Kubrick. Elle ne s'était pas trompée. Leurs chemins vont souvent se croiser par la suite car elle va détester tous ses films : une froide et distante atmosphère, des films qui n'ont pas d'âme.
Au cours du tournage, Kubrick affirme son autorité : alors que le directeur de la photographie, Lucien Ballard, change l’objectif que Kubrick avait choisi pour une scène avec un travelling, ainsi que son emplacement en lui expliquant que cela n’aura aucune incidence sur les changements de perspective, calmement, le cinéaste lui intime l’ordre de remettre la caméra à son emplacement d’origine avec l’objectif initial, ou bien de quitter le plateau et de ne jamais y revenir. Ballard obéit et le tournage se termine tranquillement.
Malgré un budget important, Kubrick n’apparaît encore dans ce film que comme l’un des nouveaux maîtres de la série B. Orson Welles, interrogé par André Bazin sur les autres cinéastes, déclare : L'Ultime Razzia de Kubrick n'est pas trop mal. Dans la revue Cahiers du cinéma, Jean-Luc Godard lui reconnaît quelques qualités tempérées : C'est le film d'un bon élève sans plus. Ce qui correspond chez Ophüls à une certaine vision du monde n'est chez Kubrick qu'esbroufe gratuite. Mais il faut louer l'ingéniosité de l'adaptation qui, adoptant systématiquement la déchronologie des actions, sait nous intéresser à une intrigue qui ne sort pas des sentiers battus.

L'Ultime Razzia étant un succès, United Artists accepte de financer à hauteur d'un million de dollars le prochain film de Harris-Kubrick tiré d'un best-seller américain de 1935, The Paths of Glory, inspiré d'événements réels s'étant produits en 1915, l'affaire des caporaux de Souain, fusillés pour l'exemple, et pas du tout des mutineries de 1917 comme on le dit couramment. Les fusillés de Souain n'étaient aucunement des mutins, ce qui rend leur condamnation encore plus insupportable. Harris ne disposant que d'un budget très modeste selon les critères hollywoodiens et d'un scénario de Kubrick, Calder Willingham et Jim Thompson, le projet ne suscite guère d'enthousiasme auprès des majors. Tout bascule quand Harris envoie une copie du scénario à Kirk Douglas, lequel répond : Stanley, je crois que ce film ne fera pas un rond, mais il faut absolument le tourner. En 1957, sept ans après son premier court-métrage, Kubrick dirige Kirk Douglas dans le film sur l’absurdité de la guerre, Les Sentiers de la gloire.
Le film se déroule durant la Première Guerre mondiale. Un général de l'armée française décide de lancer une de ses unités dans des attaques désespérées contre les lignes allemandes retranchées à Verdun. Pour l’exemple, trois soldats innocents seront fusillés pour lâcheté. Le film est entièrement tourné en Allemagne avec 800 policiers allemands pour jouer les troupes françaises. Les scènes en intérieur sont tournées au studio Geiselgasteig à Munich. On y voit apparaître des séquences qui caractérisent Kubrick et qu'il ne cesse de perfectionner par la suite : travelling compensé arrière, utilisation de la musique et mouvements de caméra sans heurt filmés avec une Dolly pour la marche ininterrompue du colonel Dax dans les tranchées. Cette scène est d'ailleurs similaire à celle du labyrinthe de Shining filmée en steadicam. La scène du chant de la jeune prisonnière, jouée par sa future épouse, l'actrice allemande et nièce de Veit Harlan Christiane Susanne Harlan, montre la capacité de Kubrick à filmer l'émotion sans tomber dans la sensiblerie. Il divorce de Ruth Sobotka en 1957 pour épouser en 1958 Christiane Harlan qu'il a rencontrée pendant le tournage. Son frère, Jan Harlan, deviendra le producteur délégué du réalisateur à partir de 1975.
Dans ce film apparaissent deux thèmes de prédilection de Kubrick : la double personnalité et un monde au bord de l'effondrement. Dans le livre et dans le film, les personnages sont clairement identifiés, avec le colonel Dax Kirk Douglas, homme sobre, intelligent et courageux, et le général Mireau George Macready, vaniteux, ambitieux et incompétent. Le personnage le plus machiavélique du film est le général Broulard Adolphe Menjou. Kubrick joue habilement avec la bonhomie du personnage rusé et raffiné mais s'avérant incroyablement amoral il va détruire les dernières illusions du colonel et ruiner définitivement la carrière du général et sans aucune pitié envers les hommes de troupe.
Le film est projeté à Munich le 18 septembre 1957. Il est perçu comme une critique directe de l'armée française, par la cruauté des scènes finales et la satire violente des états-majors français, même si le film souffre de nombreuses invraisemblances. Il reçoit plusieurs récompenses dont le prix Chevalier de la Barre. Sous la pression d'associations d'anciens combattants français et belges, le gouvernement français proteste auprès de la United Artists, mais ne demande pas la censure du film. Devant l'ampleur du mouvement contestataire, les producteurs du film décident de ne pas le distribuer. De nombreux pays en Europe, comme la Suisse, refusent également de le diffuser. C'est dix-huit ans plus tard, en 1975, que le film est finalement projeté en France.

Un bref passage à Hollywood

Kubrick dirigeant Woody Strode et Kirk Douglas sur le tournage de Spartacus.

De retour aux États-Unis, Stanley Kubrick écrit deux scénarios qui seront refusés par les majors hollywoodiens. La MGM lui propose de travailler sur le scénario d'un western avec comme vedette Marlon Brando. Après six mois de travail de préparation, le cinéaste et l’acteur se fâchent. Marlon Brando, star hollywoodienne, obtient facilement le départ de Kubrick et décide de réaliser lui-même La Vengeance aux deux visages.
Au même moment sur un autre film, Kirk Douglas, acteur et producteur principal du péplum Spartacus, insatisfait du travail d'Anthony Mann, sollicite Stanley Kubrick pour terminer le film. Après le succès commercial des Sentiers de la gloire, celui-ci accepte et termine le film. Le tournage dure 167 jours, partagé entre la Californie et l’Espagne pour les scènes de combat tournées avec 10 000 figurants issus de l'armée espagnole.
Mais des conflits artistiques apparaissent rapidement entre Kirk Douglas et Russell Metty, le directeur de la photographie. Kubrick intervient également sur le scénario fondé sur l'histoire vraie du soulèvement d’esclaves romains qu'il trouve moralisateur et sans intérêt. Le film sort en 1960, il obtient un grand succès critique et commercial et gagne quatre Oscars. Quelques années plus tard, Stanley Kubrick renie le film dont il garde un souvenir amer. Dans l'œuvre de Kubrick, c'est son film le plus impersonnel, le film reprenant l'intrigue et le traitement du roman historique de Howard Fast.

Les derniers films en noir et blanc

Lolita et Docteur Folamour.
En 1962, pour la réalisation de Lolita, le réalisateur préfère éviter la censure et les ligues puritaines américaines26 et se tourne vers l'Angleterre pour le tournage. Il avait prévu de revenir ensuite aux États-Unis mais pour son projet suivant, Docteur Folamour, l'acteur principal qu'il a choisi, l'anglais Peter Sellers, ne peut pas quitter le territoire car il est au milieu d'une procédure de divorce. Pendant le tournage de Lolita, Kubrick achète une grande maison au nord de Londres où il s'installera avec sa famille27. Il dira : À côté de Hollywood, Londres est probablement le deuxième meilleur endroit pour faire un film, en raison du degré d'expertise technique et des équipements que vous trouvez en Angleterre, de plus, malgré sa licence de pilote amateur, Kubrick n'aime pas prendre l'avion.
Stanley Kubrick réalise donc Lolita, son premier film polémique, sur le sol anglais, d'après le roman éponyme de Vladimir Nabokov. Le livre avait été publié pour la première fois en France comme ouvrage pornographique. Pour la rédaction du scénario, le cinéaste travaille en étroite collaboration avec Vladimir Nabokov. Ils écrivent ensemble une nouvelle version du roman qui est jugé plus acceptable pour un film commercial et la morale imposée au cinéma en 1962.

James Mason en 1959.

Le film raconte l'histoire d'un homme d'âge mûr, Humbert Humbert, joué par James Mason, pris d'une passion ardente pour une adolescente, Lolita, âgée de 12 ans dans le livre, 15 ans dans le film, interprétée par Sue Lyon qui obtiendra le Golden Globe de la meilleure actrice. Peter Sellers y fait une interprétation remarquée.
Le film, tout comme le roman, provoque la colère des puritains qui le trouvent trop sulfureux malgré sa mise en scène très chaste, bien éloignée des allusions sexuelles explicites de l'ouvrage de Nabokov. À la sortie du film, Stanley Kubrick reconnaît que s'il avait pu prévoir la sévérité des censeurs américains qui l'obligent à couper des scènes au montage et à remanier certaines séquences jugées trop licencieuses, il aurait probablement renoncé à la réalisation du film.
Le film est présenté à la Mostra de Venise en 1962, mais la critique est déçue. Le schéma d'accueil de ses films par la critique, dont la plus virulente est Pauline Kael, sera toujours le même par la suite : une partie ne lui fait pas de cadeau, tandis que l'autre l'admire. Ce premier film polémique est un succès outre-Atlantique, sans nul doute nourri par la controverse. En 1963, Jean-Luc Godard décrit Lolita comme un … film simple et lucide, avec des dialogues justes, qui montre l'Amérique et son puritanisme mieux que Melville et Reichenbach, et prouve que Kubrick ne doit pas abandonner le cinéma, à condition de filmer des personnages qui existent […]30. En 1998, Sue Lyon déclare à l'agence Reuters que Lolita est le film qui a causé sa destruction en tant que personne. Il s'agit du dernier film produit par le duo Kubrick-Harris. Après ce long-métrage, Stanley Kubrick produit et réalise seul ses films, en laissant la distribution à la Warner Bros Pictures.
En 1963, Kubrick prépare son second film polémique et le premier opus d'une trilogie de films de science-fiction, Docteur Folamour ou : Comment j'ai appris à cesser de m'inquiéter et à aimer la bombe, considéré comme un chef-d'œuvre d'humour noir. Kubrick se tient constamment au courant de l’actualité et s’abonne à des revues militaires et scientifiques. Il lit le roman de Peter George, Red Alert, paru en Angleterre sous le titre de Two Hours to Doom. Il réfléchit depuis longtemps à une histoire où une guerre nucléaire serait déclenchée soit par accident, soit à cause de la folie d’un personnage. Le roman de Peter George correspond à ses attentes. Il s’associe avec Peter George et Terry Southern, scénariste d'Easy Rider, pour préparer le script, et travaille la photographie du film avec Weegee.
Le tournage débute le 26 janvier 1963, aux studios de Shepperton à Londres, pour s’achever quatre mois plus tard. La distribution comprend Peter Sellers qui tient les rôles du président des États-Unis, du docteur Folamour, ancien chercheur nazi et handicapé recruté par l'armée américaine clin d'œil à la trajectoire de plusieurs scientifiques nazis, dont Wernher von Braun, et du colonel britannique Lionel Mandrake. Une très grande liberté d’improvisation est laissée à Peter Sellers, filmé par trois caméras, tandis que le reste de la distribution et l’équipe technique doivent observer une grande rigueur. Le film doit se conclure par une bataille de tartes à la crème dans la salle de guerre, avec le président et tous ses conseillers militaires. La scène est filmée, nécessitant des semaines de tournage, mais Kubrick décide de la retirer du montage final.
Farce burlesque où la guerre nucléaire totale est déclarée à la suite de l'action d'un commandant devenu fou et d'un système de défense automatique, ainsi que satire des milieux politico-militaires, ce nouveau film sort en pleine Guerre froide. Le risque de voir l’un des deux protagonistes employer l’arme atomique est élevé. Un problème de taille apparaît : un film réalisé par Sidney Lumet, Point limite, avec Henry Fonda dans le rôle principal, traitant du même sujet, est sur le point de sortir. Stanley Kubrick intente un procès pour plagiat, et obtient gain de cause. Le film de Lumet ne sortira qu’en octobre 1964 tandis que Docteur Folamour sort sur les écrans le 29 janvier 1964 et se trouve nommé pour quatre Oscars meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur acteur, meilleure adaptation cinématographique.

Le passage à la couleur

Articles connexes : 2001, l'Odyssée de l'espace, Orange mécanique, Barry Lyndon, Shining, Full Metal Jacket et Eyes Wide Shut.
Japet, satellite de Saturne. Dans le roman Arthur C. Clarke : la porte des étoiles, au centre de laquelle se trouve un monolithe de près de 600 mètres de haut.
À partir de ce moment, installé définitivement en Angleterre, le cinéaste travaille de plus en plus lentement, poussant de plus en plus loin son perfectionnisme et sa volonté d'expérimentation technique. Il va passer cinq ans à développer son film suivant 2001, l'Odyssée de l'espace. Le 22 avril 1964, Kubrick rencontre Arthur C. Clarke au restaurant Trader Vic's du Plaza Hotel de New York. Pour imaginer le monolithe noir, clé de voûte du film, les deux coscénaristes font la tournée des galeries d'art le mois suivant leur rencontre. Selon le sémiologue français Alexandre Bourmeyster, ils se seraient inspirés des œuvres du peintre Georges Yatridès, alors mis en valeur par un des plus grands marchands de tableaux du moment, S.E. Johnson, qui exposait les œuvres de l'artiste de manière permanente aux International Galleries à Chicago.
Le tournage du film débute le 29 décembre 1965, sous le titre provisoire de Voyage au-delà des étoiles37. Il se déroule dans un premier temps aux studios de Shepperton, puis se poursuit aux Studios d'Elstree, plus proches de la villa où Kubrick a emménagé. MGM et Cinerama financent le film, dont le budget s’élève à six millions de dollars. Pour la première fois, le cinéaste interdit le plateau de tournage à la presse, ce qu’il fera systématiquement par la suite.
Artistiquement, 2001 a été un changement radical dans les films de science-fiction. Stanley Kubrick n’étant pas un partisan des films où les décors et les monstres sont en papier mâché ou en carton, il souhaite que les décors de son film soient techniquement réalisables dans le futur qu’il présente. C’est Tom Howard, lauréat de l’Oscar des meilleurs effets visuels en 1947 pour L'esprit s'amuse et en 1959 pour Les Aventures de Tom Pouce, qui est chargé de concevoir la savane préhistorique. Wally Veevers conçoit les véhicules spatiaux et le bus lunaire. On construit également une centrifugeuse de 750 000 dollars. Pour les effets spéciaux, Kubrick s’entoure d’éminents collaborateurs parmi lesquels Harry Lange, ancien conseiller de la NASA, et Marvin Minsky, directeur d’un laboratoire d’intelligence artificielle.
George Lucas, créateur de Star Wars, déclarera après la mort de Kubrick que si ce film n'avait pas été fait, il n’aurait probablement jamais réalisé sa saga. Kubrick reçoit l'Oscar des meilleurs effets visuels, le seul et unique Oscar de sa carrière, pour la qualité de son travail. Une équipe l'a aidé dans cette tâche, mais comme il est à la fois concepteur et créateur de quasiment tous les effets spéciaux du film, c'est à lui que l'on décerne la statuette. C'est également le début de la légende que le cinéaste va volontairement se forger : celle d'un homme qui, tel un ordinateur, enregistre une incroyable quantité d'informations, devenant un expert de la mise en scène et en maîtrisant parfaitement tous les rouages. Stanley Kubrick n'hésite pas à utiliser les dernières innovations techniques quand cela sert son œuvre : ordinateur et projection frontale pour 2001, éclairage à la lumière des bougies pour Barry Lyndon, grâce à un objectif Zeiss développé pour la NASA, ou encore steadicam pour Shining The Shining.

Malcolm McDowell en 2007

Orange mécanique est un film à la violence et à l’érotisme prémonitoire réalisé en 1971, d’après le roman L'Orange mécanique de Anthony Burgess et adapté par Stanley Kubrick qui travaille seul. Le thème du double, cher à Kubrick, est encore une fois développé dans ce film, avec Alex qui représente l’inconscient de l’homme qui lutte entre le bien et le mal dans un monde qui s’effondre. Kubrick réalise le film très rapidement, caméra à l'épaule, et presque entièrement tourné dans la région de Londres.
Au XXIe siècle, dans une Angleterre où l'on ne sait plus comment enrayer l'escalade du crime, Alexandre de Large Malcolm McDowell, le chef de la bande des droogs ou droogies, exerce avec sadisme une terreur aveugle sur fond de mouvement de la Symphonie no 9 de Beethoven.
En Angleterre, le film suscite une polémique importante, qui est aggravée par plusieurs faits divers où des délinquants, portant les mêmes costumes qu'Alex, déclarent s'inspirer directement du personnage principal du film. Dans un premier temps, Stanley Kubrick ne tient pas compte de ces faits divers mais les médias, frustrés par le manque d’interlocuteur, se retournent vers l’auteur du livre qui se retrouve seul à défendre un film auquel il n’a pas participé. Mais la controverse s’amplifie et, inquiété par les lettres de menaces de mort qu'il reçoit à son domicile, le réalisateur oblige la Warner à retirer le film des écrans du Royaume-Uni.
Élu meilleur film de l’année 1972 par le New York Film Critics Circle, Orange mécanique est l’un des plus gros succès de la Warner Bros. Pictures et reste à l'affiche durant soixante-deux semaines. Il n’y a aucun doute qu’il serait agréable de voir un peu de folie dans les films, au moins ils seraient intéressants à regarder. Chez moi la folie est très contrôlée ! déclarera Kubrick.
Après trois films de science-fiction, frustré de l’abandon par la Warner Bros de son projet sur Napoléon, prévu avec Jack Nicholson dans le rôle de l’empereur Kubrick a une véritable passion pour Napoléon, il ne comprend pas comment un homme aussi intelligent a pu sombrer, Stanley Kubrick réalise son premier film historique à partir de la biographie d'un jeune Irlandais Barry Lyndon d'après le roman picaresque de William Makepeace Thackeray - le destin d'un jeune et intrigant Irlandais sans le sou, Redmond Barry Ryan O'Neal, de son ascension pleine d'audace à sa déchéance.
La préparation du film dure un an. Le réalisateur veut tourner un film à l’esthétique proche des tableaux du xviiie siècle41. La réalisation du film demande plus de 250 jours de tournage en Grande-Bretagne et en Allemagne au château de Hohenzollern, à Potsdam et au palais de Ludwigsbourg. À la fin du tournage, Kubrick et Ryan O'Neal sont définitivement fâchés14. Les contraintes techniques imposées par le réalisateur font passer le budget du film de 2,5 millions à plus de 11 millions de dollars.

Le corps de garde par Le Nain en 1643

Les critiques sont sévères envers le film qui est jugé trop long, trop lent, élitiste et ennuyeux14. Le film obtient pourtant quatre Oscars : meilleure direction artistique, meilleure photographie, meilleurs costumes, meilleur arrangement musical.
Stanley Kubrick entreprend ensuite l'adaptation du roman Shining, l'enfant lumière de Stephen King. Ce film est dans la lignée de l'Exorciste, Halloween et Rosemary's Baby le meilleur du genre selon Kubrick43. Le film est moins risqué financièrement que ses productions précédentes et, après l'échec commercial de Barry Lyndon, l'adaptation d'un best-seller de Stephen King est un gage de quasi-succès les six derniers romans de l'auteur se sont vendus à plus de 22 millions d'exemplaires. Le réalisateur et Diane Johnson modifient profondément l’histoire du livre, ce qui déplaît à Stephen King qui refuse d’apparaître au générique final du film. Il ne sera pas le seul mécontent : aux États-Unis, l'exploitation du film est un échec, le public enrageant de n'avoir pas assez tremblé et reprochant aux deux scénaristes d'avoir abâtardi le genre et trahi l'esprit du livre. Comme à leur habitude, certains critiques huent le film.

Le film relate la descente aux enfers de Jack Torrance Jack Nicholson, écrivain ayant accepté un poste de gardien à l'hôtel Overlook, isolé dans les montagnes rocheuses et fermé pour l'hiver. Il s'y installe avec sa femme Wendy Shelley Duval et son fils Danny Danny Lloyd qui possède un don de médium, le Shining.
Plus que tout autre film, Shining va consolider la réputation de mégalomane perfectionniste du réalisateur. Kubrick rôde dans les immenses studios de l'Estree, la barbe et les cheveux longs, les yeux cernés, tout comme son héros Jack Torrance qui erre sans inspiration dans l'hôtel Overlook. Pour les déplacements de personnages les plus complexes à filmer, son opérateur Garrett Brown utilise un système de stabilisation de caméra qu'il a inventé quelques années auparavant : le steadicam. Le tournage de plus d'un an est particulièrement difficile pour Shelley Duvall. Alors que Kubrick laisse une certaine latitude dans l’interprétation à Jack Nicholson, Shelley Duval doit répéter de 40 à 50 fois la même scène. Aujourd'hui, Shelley Duval dit : Ce fut une expérience formidable, mais si cela était à refaire, je n'accepterais pas le rôle...
L'image finale du film, semblable à la fin quelque peu mystérieuse et ambiguë de 2001, l'Odyssée de l'espace, engendre plusieurs interprétations par les fervents du cinéaste ; Stanley Kubrick lui-même n'a jamais donné une réponse définitive, préférant laisser le soin aux spectateurs de décider par eux-mêmes. Kubrick considère ce film comme son œuvre la plus personnelle.

Kubrick veut tourner un vrai film de guerre, mais ni un film comme Apocalypse Now ou Voyage au bout de l'enfer, ni une parodie comme Docteur Folamour, ni un film antimilitariste tel que Les Sentiers de la gloire. La symbolique du film Full Metal Jacket est proche de celle d’Orange mécanique où le héros, intellectuellement supérieur à ses camarades, doit lutter entre le bien et le mal dans un monde en guerre. Le personnage central du film, le soldat Guignol Matthew Modine va petit à petit perdre son âme aux États-Unis, symbolisé par l’agression de son protégé le soldat Baleine Vincent D'Onofrio et au Viêt Nam par l’exécution sans pitié d'une prisonnière vietnamienne.
Stanley Kubrick détourne l’esprit du livre The Short Timers de l’écrivain Gustav Hasford pour mieux imposer sa propre vision de la guerre, et de l’âme humaine, au grand mécontentement de l'écrivain qui est tout de même crédité au générique final comme coscénariste.
La première partie du film suit l'entraînement intensif d'un groupe de jeunes recrues américaines dans un camp de marines à Parris Island, aux États-Unis en 1968 pendant la guerre du Viêt Nam, et l'affrontement entre le sergent instructeur Lee Ermey et une jeune recrue inadaptée Vincent D'Onofrio. La confrontation finale entre les deux hommes clôt cette partie. La deuxième partie du film se déroule au Viêt Nam et montre le baptême du feu des marines à Da-Nang puis la sanglante bataille du Têt dans la province de Hué.

Le film est entièrement tourné en banlieue de Londres, bien loin du réalisme du film d'Oliver Stone, Platoon49. Quelques plantes exotiques servent de décors d’arrière-plan, les scènes de combat sont tournées dans une usine désaffectée et l’île de Parris Island est recréée dans une ancienne base militaire britannique. Kubrick utilise plusieurs fois l’élargissement de champ pour modifier l’interprétation du spectateur lorsqu’il voit la scène de près puis de loin. Le tournage du film est interrompu pendant quatre mois à la suite de l'accident de voiture de Lee Ermey, conseiller technique en sa qualité d'ancien instructeur des marines et acteur principal de la première partie du film.
Plus de sept ans après la sortie de son dernier film, Stanley Kubrick se lance dans l'adaptation du roman la Nouvelle rêvée de l'écrivain autrichien Arthur Schnitzler, livre qu'il avait lu à la fin des années 1970. Le scénario est une fidèle adaptation du livre et raconte l'errance dans la nuit new-yorkaise du docteur Harford Tom Cruise, obsédé par la révélation de sa femme Nicole Kidman d'avoir failli céder à la tentation d'un autre homme et à la recherche de ses propres fantasmes. Un voyage entre le réel et l'imaginaire

On retrouve dans Eyes Wide Shut ce qui a toujours fasciné Kubrick : le thème du double qui envahit tout et qui engendre la perte d'identité, « nos pulsions les plus intimes, derrière les apparences. Le tournage dure quinze mois de novembre 1996 à janvier 1998 et va bloquer la carrière de Tom Cruise pendant trois ans deux ans de tournage et la sortie du film Mission Impossible de Brian de Palma est retardée d'un an. Comme à son habitude, le soir venu, Kubrick visionne sur vidéo les scènes tournées dans la journée et modifie au jour le jour le scénario en fonction des performances des acteurs. Après six mois de tournage, l'acteur Harvey Keitel claque la porte et est remplacé au pied levé par Sydney Pollack.
Ce film est le testament de Kubrick, qui meurt d'une crise cardiaque dans son sommeil le 7 mars 1999. Il est enterré à côté de son arbre préféré dans le manoir de Childwickbury, dans le Hertfordshire, au Royaume-Uni. Eyes Wide Shut sort en salle en juillet 1999, quatre mois après la mort du réalisateur. Il le considérait comme son meilleur film selon une révélation faite à son ami Julian Senior la veille de sa mort It's my best film ever, Julian.

Projets non aboutis

Parmi les projets inachevés de Stanley Kubrick, on peut citer un film sur Napoléon Bonaparte, abandonné à la demande des producteurs : un projet monumental (fruit de trente années d'un travail de bénédictin qui échoue en 1969 pour des raisons techniques, financières et d'organisation.
Après Full Metal Jacket, Kubrick travaille en même temps sur deux films dont aucun ne sera réalisé. Aryan Papers (WarTime Lies, adaptation du roman Une éducation polonaise de Louis Begley, un film abandonné pour ne pas concurrencer La Liste de Schindler de son ami Steven Spielberg dont le sujet est similaire, ainsi que A.I. Intelligence artificielle, d'après la nouvelle Les Supertoys durent tout l'été de Brian Aldiss, projet réalisé par Spielberg après la mort de Kubrick. Aryan Papers raconte l'histoire d'un enfant traversant la Pologne pendant la Seconde Guerre mondiale et échappant à la déportation vers Auschwitz ; c'est son projet de film non-réalisé le plus abouti, le casting étant établi, avec Johanna ter Steege pour le rôle de Tania et Joseph Mazzello, pour le petit garçon.
Un autre projet qui n'a jamais été réalisé était Le Lieutenant allemand, un film sur les parachutistes allemands à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il y eut de même un projet d'adaptation d'un roman de Stefan Zweig, Brûlant Secret, un projet intitulé Natural Child une fable sur la libération sexuelle, trop subversive pour l'époque, un projet intitulé One Eyed Jack un western qui sera finalement porté à l'écran par Marlon Brando et un projet intitulé Lunatic at Large, sur un scénario de Jimmy Thomson, est encore d'actualité en 2011.
Kubrick posera aussi le projet de l'adaptation du roman Le Pendule de Foucault l'auteur, Umberto Eco, s'opposera à ce projet et celui du roman Le Parfum de Süskind. Enfin, le satiriste Terry Southern tentera de convaincre Kubrick pour la réalisation du film pornographique Blue Movie.

Le style de Kubrick Réalisateurs ayant inspirés Kubrick

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Stanley Kubrick s'est inspiré principalement des films de Max Ophüls et d'Orson Welles, principalement en utilisant massivement le travelling et les mouvements de caméra ambitieux. Cependant on qualifiera les travellings de Kubrick de wellesien plutôt qu'ophulsien, car les travellings de Kubrick ne forment pas de plans séquence vertigineux comme celui de l'ouverture du Plaisir d'Ophüls. Cette dernière utilisation du travelling on pourrait aussi citer l'ouverture de La Soif du mal de Welles sera utilisée par Alfred Hitchcock Fenêtre sur cour par exemple ou Brian de Palma.
Il empruntera aussi à Welles le recours régulier à la voix off pour conter ou commenter l'histoire dans Barry Lyndon par exemple. On retrouve notamment dans les adaptations shakespeariennes de Welles cet usage de la voix off.
Kubrick s'est inspiré d'un nombre considérable de photographes et réalisateurs pour créer ses films. Cependant, bien que ses personnages à l'image des jumelles maléfiques, qui sont inspirées d'Identical Twins, Roselle, New Jersey, 1967, photographie de Diane Arbus et que la célèbre scène de Shining où Jack Torrance laisse entrevoir son visage à travers la porte provienne d'une scène de The Phantom Carriage de Victor Sjöström, Kubrick a sublimé c'est-à-dire rendu plus terrifiant les personnages et situations issus d'autres films. C'est cette force qui fait le génie de Stanley Kubrick.


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Posté le : 25/07/2015 22:16
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Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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