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Annonce : T’as quel âge quand tu fumes ?
Publié par Vadnirosta le 10-03-2023 18:39:39 ( 89 lectures ) Articles du même auteur



T’as quel âge quand tu fumes ?

(On a gardé notre sens de l’amour malgré la situation chaude…)





Au Dr E.






« -Quel âge me donnez-vous, chère Madame ?
-Je vous donne 31 ans et des décimales comme tout le monde.
-Ne croyez-vous pas que je donne plutôt 13 ans et des décimales ???
-Mais non voyons ! Pourquoi treize ans, monsieur ?
-Parce que je touche l’AAH, parce que je suis complètement fauché, parce que je porte jour et nuit un survêtement Nike, parce que j’habite en HLM dans une téci morose, parce que je cause en verlan…
-Mon c.., monsieur ! Vous faites travailler l’pinceau et c’est très fatigant… De plus, vous portez une veste Eden Park venu du Pérou… De plus, vous vous êtes fait tabasser il y a un mois par votre copine en plein 6ème à Hautes Barolles. De plus, vous causez toujours depuis les bas-fonds de la poésie russe. A ce propos, votre adresse n’est-elle pas toujours 13 Impasse des Pendus 75018 Pologne - FRANCE ???
-Sachez que je suis SDF et que la terre entière m’appartient. Tous les domiciles boiteux du monde entier sont miens. Mon fantôme crèche effectivement en Europe de l’Est puisqu’il est amateur de vodka… Quant à moi, j’habite ici- même, en terre arabe, au bled quoi !!!
-Arrêtez de vous payer ma tête et revenons à nos moutons… Pourquoi 13 ans, monsieur ?
-Parce qu’un poème dira toujours : « Et je suis toujours à l’envers/J’abrite en moi le mauvais ver/Qui ronge un regard en vacance… »…
-Vous avez raison le mot envers vous va comme un gant : regardez- donc bien droit votre œil droit, votre démarche de môme maladroit, vos cheveux en épis !!!
-Je sais je sais… Savez vous aussi que j’ai cent trente ans, chère Madame ?
-Votre écriture est trop fluide pour un tel âge ! Pourquoi parler ainsi, monsieur ?
-Car je sens votre tendresse venir à moi comme un torrent comme une cascade je suis tout émoustillé de vous voir arborer un si bel habit de lumière je déteste les césures et toute forme de ponctuation
-Stop !
-Mon Dieu ! Pardon ! Vous m’avez fait sursauter en m’indiquant la nuisette… Je donne 130 ans, chère Madame !
-Je ne comprends pas, cher Yohann… Bien que je sois médecin, tout cela m’échappe !
-Cessez de vous prendre pour une déesse vivante alors que vous en êtes une ! Je vais vous expliquer : je donne l’âge de mon corps, n’est-ce pas, chère Madame ?
-Jusque là je vous suis cher Yohann…
-Mon corps a 130 ans, chère Madame…
-Ah bon ? Et pourquoi, cher Yohann???
-Je dessine toujours beaucoup d’autoportrait et voyez-vous… … je me dessine toujours avec trois clopes et un poumons …
-Et alors ?
-Et alors JE SUIS LA CLOPE (tenue main gauche, tenue main droite et aussi embouchée) et JE SUIS LE POUMONS SOLITAIRE SANS FRANGIN !
-Qu’est-ce que cela signifie, cher Yohann ?
-Que ces trois clopes et ce poumons sont écrits avec la même encre que les lignes de mes rides, de mes oreilles pointues, de ma ceinture, de mon sexe, de ma fourche. Que tout ici fait bloc âgé jusque parfois même dans le papier que je laboure tant et tant que je le râpe et le troue par endroit. Oui vraiment tout ici est hors d’usage, d’occase, à la casse…
-Mais c’est votre mélancolie qui vous pousse nonchalamment à ressentir de telles atrocités, cher Yohann !
-Tout ceci n’a rien à voir avec la mélalcolie, surtout que j’ai (presque) arrêté de boire ! La vérité, c’est que j’ai un poumons encore sain, une gorge à dérouler comme un palimpseste et des yeux délavés, parce que trop pluvieux…
-Vous parlez de palimpseste. Sachez par là que vous reconnaissez que ce qui est vieux est très précieux, cher Yohann !
-Vous avez raison, tellement raison que vous m’enluminez et que je vais de ce pas me rouler une cigarette et après, promis, je sors la gouache et les lettrines… Au fait, j’ai remarqué : depuis que j’ai prononcé le mot nuisette, vous terminez toutes les répliques par cher….
-Suffit ! Il n’y a rien à en tirer ! Occupez-vous à faire de votre corps un objet à fumer convoité par tous les meilleurs antiquaires de Varsovie car j’imagine que vous parlez ici pour votre fantôme…
-Non, chère Madame ! Tous deux fumons… sauf que l’un achète des cigarettes à la menthe et l’autre du tabac à rouler Fleur (fanée) Du Pays…
-On dirait que cela vous plaît de donner les âges de l’enfant et du vieillard… Pourquoi n’essayeriez-vous pas d’arrêter de fumer ou de grandir un peu ?
-Si je m’arrêtais de fumer, alors je me remettrais à boire à coup sûr alors vous comprenez je n’ai aucune envie de faire 1133 ans cette fois-ci… Comprenez par ailleurs que si je cessais de faire l’enfant, alors il me faudrait renoncer à mon joli métier de peintre poëte amoureux de personne…
-Et pourquoi donc ?
-Parce qu’en art tout est affaire de sensibilité et de rêve… En tout cas c’est ainsi que je le conçois…
-Voyons, monsieur Inconnu, vous êtes illustre (au sein de l’hôpital de jour)… et vous savez très bien que l’on peut être adulte sans avoir entaché sa capacité d’émerveillement ainsi que sa faculté à imaginer et rêver… Il me semble par ailleurs que ces qualités évoquent davantage la sphère féminine plutôt que le registre enfantin…
-Chère Madame, avez-vous seulement plongé un œil dans ma série de dessins récente ? Voyez-vous une once de féminitude dans la manière dont je me représente ? Je n’y vois pour ma part que visions mortifères d’épouvantails, de déchets macérés, d’odeurs fétides en tous genres, de consumations internes, de fatigues saturniennes,de coassements d’organes, d’enrouements et de crachats obscurs et j’en passe et des pires… Oui vraiment, la femme trône dans un palais, non un manoir hanté comme le mien…
-Cessez tout de même de fumer : votre avenir en dépend…
-Ne dites pas de sottises, Madame. Pensez à ma gloire posthume. On ne songe pas au poëte sans faire référence au suicide… Si je m’arrête de fumer, la vie sera trop belle : elle ne me poursuivra plus tel un poëte maudit. Non, il faut s’occuper de son autolyse… Si j’arrête la fume, je n’arriverai pas à me suicider. Si j’arrête la fume, je ne serai plus tout seul sur cette route tortueuse aux multiples embûches. Il me faut enrichir au contraire ma biographie de chemins de ronces, d’avatars, d’évènements inattendus… Ne riez pas, chère Madame, il me faut des hôpitaux, n’importe quoi, de quoi faire causer…
-Malheureux ! A mon goût, L’évènement inattendu serait plutôt l’arrêt du tabac vu que vous semblez aimer demeurer un cas désespéré extrême…
-Vous savez Madame, j’ai toujours aimé l’élégance des vieilles yeuses pour les ramifications de leurs branches tordues, pour leurs troncs crevassés… Aussi, c’est pour cette raison que je parsème chacun de mes dessins de…
-Suffit ! Vous êtes vraiment un cas désespéré. Je suis là pour soigner des gens qui veulent aller mieux et non des pervers de votre rang ! Sortez de mon bureau !
-Madame ! Nous sommes dans le couloir de l’HDJ et notez que je vous parle sans distance, pratiquement les yeux dans les…
-Suffit ! Sale gosse ! Maudit poëte ! Aller draguer ailleurs que dans notre centre !!! J’accueille ici des malades mentaux et non des délinquants sexuels…
-…Chère Madame, vous vous êtes laissée embarquer dans ce dialogue qui s’est étiré sans que vous vous en rendiez compte… …alors, que vous vous le voulez ou non, j’en déduis que vous avez pris pl…..
-Arrêtez ! Disparaissez ! Allez fumer et adieu !... »
(…)
-Au fait, chère Madame, combien me donnez-vous quand je dors ?
-Voyons, monsieur, comment pourrais-je le savoir ?
-Car vous habitez mes nuits, Madame…
-Vous êtes vraiment un cas à part, monsieur Inconnu ! Seul mon mari partage mes couvertures et ma nuisette…
-A propos de nuisette, l’avez-vous acheté à Tati ? Est-elle marron ?
-Oui, tout- à- fait. Comment le savez-vous ?
-Je le sais parce que je l’ai achetée il y a trois ans… Alors Madame, combien fais-je en nuisette ?
-Deux ans. Car vous dormez comme un bébé…
-Ah ! Je préfère cette réponse ! Passons aux choses sérieuses à présent… Savez-vous que les clairs de lune ont tendance à poncer la peau des mélancoliques comme par magie et que lorsque Pierrot Vous prête sa plume pour m’écrire un mot, la lune s’arrondit parfaitement et blanchit la nuit ?
-Ça suffit ! Sachez que je suis experte en littérature et que vous ne m’impressionnez nullement : vous êtes un nabot et moi je suis Louise Labé en personne, EN PERSONNE, m’entendez-vous ? (….) Au fait, monsieur, j’ai remarqué hier que vous aviez tendance à vous réfugier au soleil. Est-ce normal ?
-Ce serait plutôt à moi de vous poser la question mais comme j’aime autant mieux donner des réponses aux praticiens, je vais Vous donner l’explication à ce mystère: chère Madame, voyez-vous, je suis un cas désespéré et un désespéré recherche toujours un coin de soleil afin de se régénérer. Pour ma part, sachez que j’ai 3131 ans lorsque je m’expose à l’ombre. Par exemple, je respire moins bien à l’intérieur d’une structure : les sillons s’accentuent ; les glaires s’étalent et remontent comme un volcan froid ; mon autoportrait se craquelle ; l’obscurité vient voiler mon regard. Si je devais me peindre en ces moments-là, je me dessinerais nu, complètement nu, avec une brume au fond du regard et des trous dans la gorge afin de mieux récupérer les résidus de ce que l’on appelle une bronchite chronique…
-Ah ! Je comprends mieux ! Vous seul, monsieur, êtes capable de me donner de tels cours. Je n’ai jamais rencontré d’individus aussi sensibles que vous. Sachez que votre souffrance m’effraie… Je préfère laisser là mon métier de praticien (de couloir !, bien entendu…)
-Vous m’abandonnez comme toutes les autres parce que vous n’aimez pas que je vous apprenne des choses. Vous vous sentez ridicule devant la majesté du sur- praticien que je suis et vous avez peur devant le cloaque dégoulinant que vous inspire mon fantôme.
-Stop ! Vous m’exaspérez, monsieur Gardon !... …Vous êtes amoureux en ce moment n’- est-ce pas ?
-Oui. Devinez- donc de qui…
-Je le sais mais hélas c’est impossible.
-Tout est possible. Rien ni personne ne peut résister à mon charme fou… Vous percevez là évidemment ma mésestime totale de moi-même je suppose…
-Je vais vous remettre à votre place : vous êtes laid avec votre œil bleu à l’endroit, votre peau d’enfant, vos cheveux blonds soigneusement peignés, vos ailes d’angelot, la fumée (de votre feu de joie…) ainsi que votre voix cristalline de chanteur lyrique…
-Merci Madame ! J’aime lorsque vous me complimentez de la sorte ! Vous savez, je connais la rhétorique mais je doute que vous ayez les capacités intellectuelles pour insérer ces figures dans de jolies phrases finement menées… Savez-vous ce qu’est l’ironie, chère Madame ???
-Non, hélas. J’aime les intestins, les estomacs, les pancréas mais l’yronie ça m’échappe. C’est une maladie, dites, n’est-ce pas ?
-L’ironie, c’est se donner 1313 ans tout en étant amoureux…
-Je ne comprends pas…
-Je veux dire par là que depuis que je Vous ai vue pour la première fois j’ai perdu 1300 ans. Est-ce clair ?
-Vous avez donc 13 ans depuis que je vous déteste. Je comprends votre désarroi, monsieur. C’est bien la première fois qu’un patient me réclame un autre coup de fouet… Imbécile heureux ! Et en plus, ça croit m’apprendre la définition de l’ironie !!!
-Je suis un saint homme, Madame. Je tends l’autre joue. Je vous ferais remarquer au passage que vous désiriez être vous aussi une sainte…
-JE SUIS SAINTE P. et vous n’êtes qu’un moine imbécile dans un manoir hanté. Vous ne savez que faire joujou avec vos tubes de gouache et vos auréoles de lumière… Au fait, demandez pour moi la nouvelle coupe de cheveux, monsieur Inconnu…
-J’aime que les femmes me parlent ainsi… Venez- donc me coiffer et m’inspecter (mon travail) au scriptorium… »





Brignais, 06-07-08/02/2011.



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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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